Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
H

Henri II Plantagenêt, (suite)

En 1154, Henri II Plantagenêt hérite d'une Angleterre affaiblie par l'anarchie féodale après le règne d'Étienne, qui se caractérise par l'indépendance de l'Église et des barons. Il entreprend alors de rétablir l'autorité monarchique et de donner une unité à l'« Empire Plantagenêt », qui s'étend des Pyrénées à l'Écosse. Pour l'assister dans cette tâche, clercs et lettrés, tels Thomas Becket ou Richard de Lucy, ébauchent une administration centrale et une activité législative fondées sur une « autorité raisonnable ».

Mais cet effort se heurte aux privilèges de l'Église et des barons, dont Henri II Plantagenêt doit briser l'opposition féodale en Angleterre et en Aquitaine. À cette fin, il s'appuie sur la classe moyenne des villes en accordant judicieusement des chartes de franchise. Le conflit avec l'Église est plus douloureux : par les Constitutions de Clarendon de 1164, Henri II subordonne la justice ecclésiastique à la justice royale, se heurtant ainsi à son ami Thomas Becket, archevêque de Canterbury. Ce dernier se réfugie en France, où il bénéficie du soutien du roi Louis VII, qui s'efforce par tous les moyens de contrer la puissance angevine. Thomas Becket excommunie Henri II, puis rentre en Angleterre en 1170, sous la protection de Louis VII, mais il est assassiné dans sa cathédrale. Le scandale est retentissant : la culpabilité du Plantagenêt, qui ne fait aucun doute, est aggravée par la canonisation de Becket deux ans plus tard, si bien qu'Henri II doit faire publiquement pénitence en 1174.

Les épreuves ne font que commencer, car sa nombreuse et remuante famille lui cause les pires difficultés. En 1173, son fils aîné, Henri, soutenu par Aliénor et par Louis VII, déclenche une révolte, assez facilement maîtrisée. Bien qu'Aliénor soit enfermée à Chinon, la révolte gronde à nouveau en 1183, exploitée cette fois par Philippe Auguste, qui soutient le futur Richard Cœur de Lion. La dernière rébellion, en 1188-1189, menée par Jean sans Terre et Richard, a raison des forces d'Henri II, qui meurt à la tâche, à Chinon. Il est enterré à l'abbaye de Fontevraud, toute proche, qui devient ainsi par hasard la nécropole de l'empire angevin.

Henri III,

roi de France de 1574 à 1589, dernier représentant de la branche des Valois (Fontainebleau 1551 - Saint-Cloud 1589).

Troisième fils d'Henri II et de Catherine de Médicis, Henri, tout comme sa mère, a été de son vivant l'objet d'une légende noire le présentant comme un roi faible et efféminé. Une image qui ne rend pas compte d'une pratique politique complexe.

Un prince dans la crise.

• Au cours de sa jeunesse, qui se déroule sous le préceptorat de l'humaniste Jacques Amyot, Henri se trouve directement confronté à la crise née de la Réforme : il est présent aux états d'Orléans et au colloque de Poissy, ainsi qu'à la reddition du Havre (juillet 1563), puis participe au grand voyage de la Cour à l'issue duquel il reçoit le titre de duc d'Anjou. Sa promotion politique intervient durant la deuxième guerre de Religion, quand, après la mort d'Anne de Montmorency, il est élevé à la charge de lieutenant général du royaume. Il remporte la victoire de Jarnac le 13 mars 1569 et y fait probablement procéder à l'exécution de Louis de Condé, dessinant une conception de la « prudence » qui n'exclut pas du champ politique le meurtre. Après la victoire de Moncontour (3 octobre 1569), il est exalté par Ronsard comme un émissaire divin destructeur de l'« hydre » protestante. Il demeure, au lendemain de la paix de 1570, au cœur du système politique : il est l'un des exécutants de l'édit de pacification. L'appréciation de son rôle lors de la Saint-Barthélemy est, en revanche, problématique.

L'année suivante, alors qu'il a mis le siège devant La Rochelle, il est élu roi de Pologne (le 11 mai 1573) ; un règne interrompu par la mort de son frère Charles IX : Henri fuit la Pologne dès juin 1574 pour rentrer en France. Il est sacré le 13 février 1575 ; il épouse deux jours plus tard Louise de Lorraine.

Une science du pouvoir.

• Face à la crise de l'État, le jeune souverain, s'appuyant sur sa mère et sur un entourage de techniciens, reprend la politique de concorde de son frère, avec une science des équilibres constante : la promotion des « mignons » (du Guast, Saint-Luc, Joyeuse, Épernon...) a pour fin de créer, face aux clientèles aristocratiques, une clientèle royale. Parallèlement, la monarchie accorde aux calvinistes un certain nombre de privilèges ; Catherine de Médicis se voit assigner un rôle de négociatrice face aux menées de François d'Alençon et du parti protestant : édit de Beaulieu (mai 1576) ; paix de Monsieur (août 1576), qui réhabilite les victimes de la Saint-Barthélemy ; convention de Nérac (février 1579). La pratique politique conduit aussi Henri III à tenter de désamorcer les tensions : en 1576, pour neutraliser la ligue de Péronne, hostile à toute concession aux protestants, il en prend lui-même la tête et convoque des états généraux au cours desquels il paraît opter temporairement pour l'élimination de la Réforme par les armes. Mais il laisse ensuite la guerre se défaire d'elle-même, faute d'argent, et la paix de Bergerac (septembre 1577), restrictive par rapport à l'édit de Beaulieu, est un succès pour la monarchie.

Henri III pense également que la réforme de l'État est un préliminaire au règlement de la crise civile, et qu'elle doit s'appliquer d'abord au roi et à sa cour : il institue la congrégation des Pénitents de l'Annonciation de Notre-Dame (1583), par laquelle il entend assumer les péchés de son peuple ; il met en place une étiquette accentuant la sacralité du Prince isolé comme un nouveau Christ, et renouvelle l'organisation des conseils (1582). L'administration judiciaire, les offices, les universités, les hôpitaux..., font l'objet d'un effort de rationalisation (grande ordonnance de Blois, 1579), et l'administration financière est réformée (1578-1583).

Une royauté de l'échec.

• Malgré cette activité intense qui préétablit nombre de bases de la pacification henricienne, le règne d'Henri III est déstabilisé par la stérilité de la reine, la mort du duc d'Alençon, qui fait d'Henri de Navarre l'héritier présomptif du trône (1584), et la formation de la seconde Ligue (septembre 1584-janvier 1585). De nouveau, le roi utilise la médiation de sa mère et cherche à neutraliser la tension en l'assumant (édit du 18 juillet qui déchoit Henri de Navarre de ses droits à la couronne), tout en ménageant le parti protestant. Mais il ne peut empêcher que la Ligue s'organise en force politique, ni que sa propagande tende à une contestation du pouvoir monarchique.