Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Sully (Maximilien de Béthune, baron de Rosny, duc de), (suite)

Parallèlement, Sully perçoit le lien entre puissance financière de l'État et prospérité économique : c'est pour cette raison qu'il engage de grandes réalisations, encourageant les innovations agricoles, l'abolition de certains péages et, surtout, la remise en état du réseau des routes et des voies navigables (mise en chantier du canal de Briare en 1604, canalisation du Clain et de la Vesle). Ses interventions urbanistiques sont nombreuses, tant à Paris (construction de l'hôpital Saint-Louis, de la place Royale - aujourd'hui place des Vosges -, de la place et du quartier Dauphine, achèvement du pont Neuf, édification d'une liaison Louvre-Tuileries par galeries) qu'en province : création, dans la principauté de Boisbelle, de la ville d'Henrichemont (1609) et élévation de deux ailes nouvelles au château de Saint-Germain-en-Laye. Sully prête aussi attention à la défense du royaume, souci que traduisent la remise en état de l'Arsenal, l'affectation, dans chaque province frontière, d'un ingénieur ayant la mission de procéder aux travaux de fortification, à la fabrication de canons.

Bernard Barbiche a démontré que Sully avait amassé une fortune considérable, supérieure à celle de la plupart des ducs et pairs de France, par des pratiques comparables à celles que mettront en œuvre par la suite Richelieu ou Mazarin. Après sa disgrâce à la mort d'Henri IV, Sully se consacre à la gestion de son patrimoine (5 millions de livres), mais aussi à la rédaction des Économies royales (imprimées en 1638-1640) et des Estranges amours de la reine Myrrha. Fait maréchal de France (1634), demeuré calviniste sans prendre part toutefois aux dernières guerres protestantes, il meurt en 1641.

Surcouf (Robert Charles),

corsaire et armateur (Saint-Malo 1773 - id. 1827).

À l'âge de 13 ans, Surcouf est mousse sur un navire marchand. Trois ans plus tard, il s'embarque pour les Indes. Capitaine à 20 ans, il pratique la traite pour les planteurs de la Réunion, avant de se lancer, en 1795, dans la guerre de course. Aux commandes de l'Émilie, Surcouf traque les navires anglais dans l'océan Indien et le golfe du Bengale. Mais, sans lettres de marque, il voit ses prises confisquées au début de 1796, à son retour à l'île de France (île Maurice). Il rentre alors en France pour plaider sa cause et obtient la restitution d'une partie du butin. En 1798, il reprend la mer à bord du Clarisse, opérant cette fois tout à fait officiellement, pour le compte du Directoire. Habile et téméraire, il inflige de sérieuses pertes aux Anglais, qui reconnaissent bien vite son talent en mettant sa tête à prix. En 1800, c'est avec le Confiance qu'il capture le Kent, un navire de la Compagnie britannique des Indes, jaugeant 1 200 tonneaux, armé de 38 canons, et fort de 400 hommes d'équipage. Lorsqu'il regagne la France l'année suivante, sa fortune s'élève à 2 millions de livres.

En 1803, après la rupture de la paix d'Amiens, Napoléon veut nommer Surcouf capitaine de vaisseau dans la marine impériale et lui donner le commandement de deux frégates dans la mer des Indes. Le Malouin refuse la proposition, préférant armer des navires pour la course. Néanmoins, il obtient la Légion d'honneur en 1804. En 1807, il embarque pour une dernière campagne à bord du Revenant. Baron d'Empire, il est chef de légion pendant les Cent-Jours. Sous la Restauration, il se contente d'armer des navires de commerce.

surréalisme.

Ni école ni groupe clairement délimité, le surréalisme s'apparente plutôt à un mouvement qui bouscule l'écriture artistique et cherche à appréhender le réel selon d'autres voies que celles de la conscience et de la raison.

Le jeu de l'imaginaire.

• C'est après avoir accueilli les productions dadaïstes, d'abord applaudies pour leur dimension provocatrice puis jugées trop destructrices, que les poètes qui ont fondé la revue Littérature en 1919 - Louis Aragon, André Breton, Philippe Soupault -, attirés par l'écriture automatique et les recherches sur l'inconscient, fondent en 1924, en compagnie de Paul Eluard, la Révolution surréaliste. Dirigée par Benjamin Péret et Pierre Naville, la revue attire autour d'elle des écrivains tels qu'Antonin Artaud, Michel Leiris, Raymond Roussel, Max Jacob...

Les préoccupations communes au groupe se font jour dans l'acte de naissance théorique du surréalisme, signé par Breton en 1924, le Manifeste du surréalisme. Priorité est donnée à l'« automatisme psychique », à la recherche de l'insolite, à la part du rêve et de la démesure. Les univers surréalistes sont ainsi peuplés de personnages rapprochés par des hasards non fortuits, comme dans le Paysan de Paris (1926) d'Aragon ou dans Nadja (1928) de Breton, d'objets décontextualisés ou curieusement associés, comme dans les représentations fantastiques de Salvador Dalí ou visionnaires de Max Ernst. L'amour fou, qui donne son titre à une œuvre (1937) de Breton, apparaît comme une ouverture privilégiée à l'imaginaire et à la liberté. Le langage est également renouvelé : les poètes multiplient les jeux d'écriture tels les « cadavres exquis », les calembours, les associations d'images inattendues ; les peintres explorent de nouvelles techniques créatives telles que collages, frottages, réemploi de photographies (Max Ernst, Pierre Reverdy). Les correspondances poétiques de Rimbaud, l'œuvre d'Apollinaire, les recherches de Freud, les pratiques hypnotiques et occultes, les expériences hallucinatoires mais aussi les arts dits « mineurs » sont autant de sources d'inspiration pour la famille surréaliste, avide de sonder l'inconscient humain et les multiples possibilités de création.

Divergences et ruptures.

• Cependant, les relations se détériorent rapidement au sein du groupe initial, et notamment pour des raisons politiques. Dès 1925, le rapprochement des revues Clarté et la Révolution surréaliste semble suggérer que la révolution poétique peut être associée à un projet de transformation politique. À partir de 1927, les adhésions des membres du groupe au Parti communiste, celles de Breton et d'Aragon en particulier, singularisent des surréalistes qui entendent jouer un rôle révolutionnaire. Le Second Manifeste du surréalisme, paru en 1929, incite les artistes à adopter une position politique claire ; en 1930, la revue est d'ailleurs rebaptisée le Surréalisme au service de la révolution. Mais plusieurs membres du groupe, Desnos par exemple, refusent cette allégeance politique. Aussi, une nouvelle coupure apparaît-elle entre les partisans d'une stricte obéissance à la ligne du PCF et les défenseurs d'une création autonome : Aragon, au service du parti, rompt en 1932 avec Breton.