Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
D

dîme, (suite)

Selon le Décret de Gratien (XIIe siècle), les dîmes perçues sont divisées en trois ou quatre parts destinées à l'évêque, au clergé paroissial, à l'entretien des bâtiments ecclésiastiques et à l'aide aux pauvres (système romain), à la fabrique de l'église (système espagnol). Frappant nobles, ecclésiastiques et roturiers, elles sont personnelles (10 % des revenus de toute activité individuelle), réelles (perçues sur les revenus du sol) ou mixtes (sur les produits du bétail).

Les résistances ouvertes au paiement des dîmes furent rares (groupes hérétiques, nouveaux convertis), mais les fraudes paysannes étaient répandues. Seuls les lépreux et certains établissements monastiques en étaient exemptés. Néanmoins, la perception de la dîme devient de plus en plus difficile à assurer à la fin du Moyen Âge. Elle est imposée aux protestants par l'édit de Nantes en 1598, et n'est supprimée que par la Révolution. Aux alentours de 1700, la mise en place d'une dîme royale est proposée, destinée à remplacer les taxes diverses dues au roi ; d'où la capitation, établie en 1695, puis le dixième, en 1710.

Directoire,

régime politique mis en place à partir d'octobre 1795 et aboli en 1799 par le coup d'État du 18 brumaire de Bonaparte.

Ce système politique, en vigueur pendant plus de quatre années - soit près de la moitié de la période révolutionnaire -, a contribué à asseoir définitivement les innovations de la Révolution ; il n'en est pas moins considéré, le plus souvent, comme une période hybride, entre dégénérescence des idéaux et bricolage politicien.

Un équilibre politique subtil.

• Le Directoire est d'abord un système politique particulier élaboré par la Convention thermidorienne durant le printemps et l'été 1795, et dont la Constitution est adoptée le 22 août. Le législatif est divisé en deux Chambres (Conseil des Cinq-Cents et Conseil des Anciens), qui doivent prendre des décisions conjointes : la première propose des lois que la seconde ne peut qu'accepter ou rejeter en bloc ; elle établit aussi la liste des personnalités au sein de laquelle la seconde élit les cinq directeurs. L'exécutif est composé d'un Directoire de cinq membres, dont l'un est remplacé chaque année. Treize directeurs se sont ainsi succédé, un seul, le très influent Barras, ayant conservé son siège pendant toute la période. Ministres et commissaires dans les départements, nommés, font appliquer les décisions prises. Les administrations départementales, profitant de la disparition des comités révolutionnaires, demeurent cependant élues et puissantes. La Révolution semble stabilisée sur les principes de 1789.

Pour les Français ordinaires, le changement tient à l'abandon du suffrage universel masculin, remplacé par un suffrage censitaire à deux degrés, qui ne concerne que les propriétaires : seuls 30 000 électeurs du deuxième degré élisent les membres des institutions législatives. Enfin, des « devoirs » sont ajoutés aux « droits » des citoyens dans la Constitution. Un régime libéral, inspiré des Lumières, est mis en place, sur fond de rivalités entre les différentes composantes majeures du personnel politique (anciens girondins devenus majoritaires, ex-montagnards, partisans de la Terreur reconvertis, modérés et royalistes du club dit « de Clichy »). Les révolutionnaires qui se réclament des idées de 1789 paraissent ainsi avoir triomphé sur leur gauche comme sur leur droite, et semblent en mesure de terminer la Révolution. Le régime qui dirige la France à partir de 1795 se veut un subtil équilibre fondé sur les élections, alors que la guerre de Vendée, principale menace intérieure jusqu'alors, s'épuise, et que des traités de paix sont signés avec les pays européens.

La réorganisation de la vie publique est générale, reprenant souvent des idées de la Convention, mais les appliquant selon des principes libéraux. Dès 1795, des écoles centrales sont installées dans chaque département, pour les élèves du secondaire ; avec les écoles de santé, un Conservatoire des arts et métiers, une École normale, une École polytechnique, elles forment un système chargé de faire émerger des élites, système couronné par un Institut qui, remplaçant l'Académie royale, regroupe les savants. Les hôpitaux et les hospices civils retrouvent leur autonomie et leurs propriétés non vendues, mais ne bénéficient plus d'aides de l'État, ce qui aggrave leurs charges. Malgré quantité de désertions, l'armée reste l'une des institutions importantes ; elle est réorganisée, en 1798, autour de la conscription (avec la possibilité, pour les riches désignés, de se faire remplacer par le tirage au sort). Les catégories de Français les plus pauvres restent en marge des évolutions qui affectent ainsi l'instruction, la santé et l'armée.

Divisions intérieures et guerres extérieures.

• Les problèmes majeurs demeurent la crise financière et les graves difficultés économiques. L'assignat, qui a perdu presque toute sa valeur, est remplacé par le « mandat territorial » en mars 1796, mandat qui sera lui-même démonétisé un an plus tard. Les impôts ne rentrent plus, obligeant l'État à lancer des emprunts à l'étranger, et à vivre aux dépens des pays conquis (Belgique, Italie investie par le général Bonaparte). Toutes ces mesures ne permettent pourtant pas d'éviter la banqueroute, au détriment des créanciers de l'État, tandis que les fournisseurs des armées obtiennent de véritables monopoles.

Cet échec s'accompagne de difficultés économiques et sociales. Après les années de disette 1794-1795, les récoltes sont abondantes en 1796, entraînant une baisse des prix des denrées, ce qui affaiblit la demande de produits manufacturés, mais soulage les couches populaires urbaines. Globalement, les inégalités ne cessent de se creuser entre celles-ci et les profiteurs du régime, dont les plus voyants sont ces « incroyables » et ces « merveilleuses » qui composent un demi-monde particulièrement tapageur. Dernière tension grave : les rivalités concernant la religion, puisque quatre courants s'affrontent. L'Église constitutionnelle essaie de s'établir, mais il lui manque le soutien de l'État. De leur côté, les prêtres réfractaires, restés fidèles à Rome, entament une reconquête de l'opinion dans une conjoncture difficile. Un directeur, La Revellière-Lépeaux, souhaite diffuser une religion morale inédite, la théophilanthropie, tandis que certains de ses collègues, plus radicaux, veulent instaurer un régime entièrement laïque, et imposent à nouveau le calendrier républicain, avec ses décades et ses fêtes, sur fond de répression armée. Les années 1797-1798 voient renaître une persécution religieuse virulente, notamment avec l'incarcération de prêtres belges.