Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
C

communiste français (Parti), (suite)

Le repli (1947-1977).

•  Une nouvelle phase d'isolement débute en mai 1947, à la suite de l'exclusion des ministres communistes du gouvernement par le président du Conseil Ramadier. Le déclenchement de la guerre froide, en septembre 1947, rend la rupture irréversible. Se conformant rigoureusement aux directives du Kominform (succédané de l'Internationale communiste, dissoute par Staline en 1943), le parti s'engage avec ardeur dans la dénonciation de l'« impérialisme américain » et de ses « valets », les dirigeants français : les grandes grèves de 1947 et 1948 sont intégrées dans sa stratégie de « mobilisation des masses » et d'intimidation du pouvoir ; les campagnes pacifistes permettent de resserrer les liens avec les « compagnons de route ». La stalinisation du PCF s'accentue encore, ainsi qu'en témoignent son fonctionnement monolithique, le culte de la personnalité rendu à Maurice Thorez et les purges qui frappent, notamment, André Marty et Charles Tillon en 1952. Le parti se montre réticent devant la déstalinisation initiée par Khrouchtchev en 1956. Il conserve en effet une puissante base ouvrière et populaire : parti de la protestation sociale, il joue un rôle « tribunicien » et structure une véritable « contre-société ». Mais les intellectuels s'éloignent de lui après son approbation de l'intervention soviétique en Hongrie en 1956 ; son électorat recule à partir de 1958 sous la poussée gaulliste : il passe de 25 à 20 % des suffrages. Au cours de la dizaine d'années qui suit la mort de Thorez, en 1964, sous la direction de Waldeck Rochet, secrétaire général de 1964 à 1972, puis de Georges Marchais, le PCF est confronté à des phénomènes nouveaux : la tertiarisation de la société française et l'explosion de mai 68, qui le prend au dépourvu. Il décide de jouer la carte de l'Union de la gauche en soutenant sans condition la candidature de François Mitterrand en 1965, puis en signant les accords électoraux de 1966 et le programme commun de gouvernement avec le PS en 1972. Alors première force de la gauche, il espère en tirer un profit tout particulier. Cette stratégie le conduit à émettre des réserves sur l'intervention soviétique en Tchécoslovaquie (1968) et à évoluer sur d'importants points de doctrine : en 1976, le parti abandonne le principe de la dictature du prolétariat. Cependant, les résultats décevants aux élections - il apparaît, dans les années soixante-dix, que l'union profite surtout aux socialistes - et la crainte de perdre une identité révolutionnaire poussent les dirigeants à rompre l'alliance avec les socialistes en 1977 et à s'engager une nouvelle fois dans la voie de l'isolement.

Le déclin (1977-2006).

•  Inaugurée en 1977, combinant une offensive violente contre les socialistes, un réalignement sur l'URSS et la mise au pas des communistes critiques, la nouvelle stratégie aboutit à un échec total. Les années quatre-vingt voient une érosion rapide des positions électorales du PCF : Georges Marchais, grand maître d'œuvre de cette politique, obtient à peine 15 % des suffrages lors de l'élection présidentielle de 1981 ; au début des années quatre-vingt-dix, le score électoral du PCF stagne aux alentours de 8-9 %, la rétraction géographique sur les « bastions » et l'effritement de l'adhésion militante accompagnant le recul global. La politique du parti explique largement ce recul : elle oscille en effet entre la participation au gouvernement à direction socialiste (1981-1984), l'opposition à ses anciens alliés et des accords électoraux circonstanciels. Des phénomènes correspondant à des tendances profondes - la désyndicalisation, elle-même conséquence de la restructuration des industries lourdes traditionnelles, et la désaffection générale pour les formes classiques de militantisme - rendent le déclin du parti sans doute irréversible. Au début des années quatre-vingt-dix, l'effondrement économique et politique des régimes communistes d'Europe orientale, que le PCF avait présentés comme référence, approfondit encore la crise dans laquelle il est plongé. La succession de Georges Marchais - Robert Hue devient secrétaire général au début de 1994 - s'accomplit sans rupture apparente. Mais l'abandon officiel du centralisme démocratique traduit une situation de fait : maires et syndicalistes, tenants du pouvoir dans les derniers bastions du PCF, manifestent de plus en plus leur indépendance, alors que le parti hésite entre deux stratégies : l'alliance traditionnelle avec le PS ou la constitution d'un pôle de radicalité. Sur le plan du fonctionnement comme sur celui de la stratégie, le PCF, sous l'impulsion de Marie-Georges Buffet qui codirige avec Robert Hue avant de lui succéder en 2002, se voit confronté à des choix qui conditionnent désormais son existence même.

Commynes ou Commines (Philippe Van den Clyten, sire de),

diplomate et chroniqueur (Renescure, Flandre, entre 1445 et 1447 - château d'Argenton 1511).

Attaché dès l'enfance à la maison de Bourgogne, favori de Charles le Téméraire qui l'arme chevalier en 1467 et le charge de missions diplomatiques, Commynes se rallie pourtant à l'ennemi en août 1472. Il se met au service de Louis XI, qu'il avait sauvé lors de l'entrevue de Péronne (1468). Richement doté par le roi, il joue alors auprès de lui un rôle politique capital, qui s'estompe néanmoins après la disparition de Charles le Téméraire en 1477. À la mort de Louis XI, en 1483, Commynes connaît de sérieux revers de fortune. Au service du duc d'Orléans, futur Louis XII, il complote contre la régente Anne de Beaujeu : en 1486, il est arrêté et emprisonné jusqu'en 1489. S'il récupère ensuite la quasi-totalité de ses biens, il est exilé sur ses terres. Et s'il retrouve quelque crédit grâce au duc d'Orléans, s'il négocie le mariage de Charles VIII avec Anne de Bretagne et accomplit à Venise, sans succès, une mission diplomatique pendant les guerres d'Italie, il ne joue plus, jusqu'à sa mort, de rôle de premier plan.

Les Mémoires de Commynes, rédigés entre 1489 et 1498, reflètent la complexité du personnage. Les six premiers livres se rapportent au règne de Louis XI, et les deux derniers relatent l'expédition de Charles VIII en Italie. Tous ont en commun l'obsession de la trahison, que Commynes présente comme une attitude politique, voire psychologique, universelle. C'est qu'il ne se contente pas de relever des faits mais se livre à des appréciations sur les hommes et à des jugements politiques : utilité de l'équilibre des forces en Europe, intérêt du Parlement en Angleterre, etc. Peut-être faut-il voir dans la rancœur qu'il garde envers Louis XI - en raison de sa disgrâce partielle après 1477 - la cause principale de l'objectivité relative avec laquelle il peint le roi. Il reste que, tout en justifiant son propre parcours, Commynes mène souvent une réflexion pessimiste mais lucide sur la philosophie de l'histoire, et peut donc être considéré comme un véritable moraliste.