Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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LÉAUD (Jean-Pierre)

acteur français (Paris 1944).

Il est le fils du scénariste Pierre Léaud et de l'actrice Jacqueline Pierreux. Son premier vrai rôle, c'est Truffaut qui le lui donne dans les Quatre Cents Coups (1959), où apparaît le personnage du jeune Antoine Doinel. « Double » mimétique, on le retrouve dans quatre œuvres de Truffaut : l'Amour à 20 ans (1962), Baisers volés (1968), Domicile conjugal (1970) et l'Amour en fuite (1979), ce qui nous vaut une suite biographique de l'adolescence à l'âge adulte. On voit Léaud dans d'autres films de Truffaut (les Deux Anglaises et le continent, 1971 ; la Nuit américaine, 1973), mais aussi chez Jean-Luc Godard (Masculin féminin, 1966 ; Made in USA, 1967 ; la Chinoise, id. ; Week-End, id.). Il est également l'assistant de ces cinéastes sur diverses productions. Vers la fin des années 60, le mélange de pudeur issue des films de Truffaut et d'apparente froideur voulue par ceux de Godard enferme Léaud dans une espèce de masque schizophrène qui le rend étranger, comme déphasé, à son environnement. Ce style de jeu marque, hélas, toute la future carrière de l'acteur. S'il s'avère bon porteur d'une mythologie d'époque lorsqu'il est utilisé par des auteurs dont la démarche se fonde sur une certaine distanciation (Godard, la Chinoise ; Glauber Rocha, Le lion a sept têtes, 1970 ; Rivette, Out One : spectre, 1974 ; Eustache, la Maman et la Putain, 1973), il devient gênant dans les œuvres plus classiques (Aidez-moi à rêver [Aiutami a sognare, Pupi Avati, 1980]), ou même dans les derniers films de Truffaut où il apparaît... Ce jeu maniaque s'exacerbe encore lorsqu'il interprète les films de Bernard Dubois : les Lolos de Lola (1976) et Parano (1981). Léaud impose à nouveau sa présence dans Rebelote (Jacques Richard, 1984), Détective (J. -L. Godard, 1985), Ce n'est que du cinéma ! (P. Sándor, id.), Corps et biens (B. Jacquot, 1986), les Keufs (J. Balasko, 1987), la Couleur du vent (P. Granier-Deferre, 1988), Jane B. par Agnès V. (A. Varda, id.), Trente-six fillette (Catherine Breillat, id.), Bunker Palace Hôtel (Enki Bilal, 1989), J'ai engagé un tueur (A. Kaurismäki, 1990), Paris s'éveille (O. Assayas, 1991), Pour rire (Lucas Belvaux, 1997), le Pornographe (Bertrand Bonello, 2000).

LEAVITT (Sam)

chef opérateur américain (New York, N. Y., 1917 - Los Angeles, Ca., 1984).

Homme à tout faire aux studios new-yorkais de la Paramount en 1937, il vient à Hollywood comme cameraman et est engagé par la MGM (1944). Chef opérateur en 1952 (l'Espion, R. Rouse), il travaille en free-lance et remporte l'Oscar pour la Chaîne (S. Kramer, 1958). Sa filmographie, relativement peu importante, compte beaucoup de titres brillants : Carmen Jones (O. Preminger, 1954) ; Une étoile est née (G. Cukor, id.) ; l'Homme au bras d'or (Preminger, 1955) ; Autopsie d'un meurtre et Exodus (id., 1959 et 1960) ; Tempête à Washington (id., 1962) ; Major Dundee (S. Peckinpah, 1965) ; Devine qui vient dîner (Kramer, 1967).

LE BARGY (Charles)

acteur français (La Chapelle 1858 - Nice 1936).

Sociétaire important, élégant et irascible de la Comédie-Française, il préside en 1908 à la naissance du Film d'Art en signant avec André Calmettes et en interprétant l'Assassinat du duc de Guise, dont le retentissement fut énorme et les conséquences multiples. Le Bargy y dirige les comédiens et essaie avec succès de donner une épaisseur psychologique à son interprétation d'Henri III. Il joue dans quelques autres films sous la direction de Calmettes, puis, à la fin du muet, il interprète Chateaubriand dans Madame Récamier (Gaston Ravel, 1928) et, au début du parlant, l'évêque du Rêve (J. de Baroncelli, 1930).

LEBLANC (Georgette)

actrice de théâtre et cantatrice française (Rouen 1869 - Le Cannet 1941).

Celle qui fut, vingt ans durant, l'épouse et la « muse » de Maurice Maeterlinck, contribuant par sa grâce alanguie au renom du théâtre symboliste, n'apparut à l'écran que dans un film, dont elle était en outre la productrice : l'Inhumaine, de Marcel L'Herbier (1924). Ce dernier convient lui-même que, si sur scène elle jouait et chantait à la perfection (encore que Debussy l'ait récusée pour le rôle de Mélisande, dans Pelléas), « à l'écran il y avait quelque chose qui ne passait pas ». Elle y incarne une sorte de femme fatale de feuilleton, à la prestance tapageuse et au cœur sec. L'échec retentissant du film mit un terme à sa brève carrière cinématographique.

LEBOVICI (Gérard)

producteur français (Paris 1932 - id. 1984).

Fondateur en 1960 d'une agence d'acteurs, il construit la puissante Artmédia et gère très vite la carrière des plus grands acteurs français. Devenu, au niveau européen, une personnalité qui « fait » le cinéma, il était normal que cet agent qui, parallèlement, était devenu éditeur (Éd. Champs libres et G. Lebovici) et protecteur d'œuvres et théories d'extrême-gauche, se lançât dans la production, encourageant les acteurs à s'autoproduire et promouvant le système de package. Mis en cause par la Chambre syndicale des producteurs en 1981, il est contraint de choisir entre ses activités d'agent et de producteur, quitte officiellement Artmédia pour fonder la Soprofilms. Il crée la maison de distribution A.A.A. et, fidèle à son autre univers, il rachète une salle de cinéma (le studio Cujas) pour y projeter uniquement les œuvres de son ami, le philosophe et cinéaste Guy Debord. À partir de 1982, ses productions sont des succès publics (la Balance, B. Swaim ; Vivement dimanche, F. Truffaut ; les Compères, F. Veber ; La vie est un roman, A. Resnais ; les Morfalous, H. Verneuil). Il est assassiné le 5 mars 1984, victime d'un crime non élucidé.

LE CHANOIS (Jean-Paul Dreyfus, dit Jean-Paul)

cinéaste français (Paris 1909 - id. 1985).

D'abord comédien et metteur en scène de théâtre (il appartiendra au groupe Octobre), il aborde le cinéma comme acteur en 1930. Formé à bonne école (il a été assistant et scénariste de Tourneur, Renoir et Ophuls notamment), il réalise un premier film en 1938, la Vie d'un homme (documentaire sur Vaillant-Couturier), puis se tourne vers la fiction, la même année, avec le Temps des cerises. La guerre interrompt sa carrière ; c'est à cette époque qu'il adopte son pseudonyme. Il obtient ensuite de grands succès populaires dans des films simples, de style traditionnel, souvent teintés d'un humanisme un peu laborieux : l'École buissonnière (1949), Sans laisser d'adresse (1951), le Cas du docteur Laurent (1957). Il s'efforce d'acclimater la veine boulevardière de Robert Lamoureux dans Papa, maman, la bonne et moi (1955). Auteur de la plupart de ses scénarios, il a aussi réalisé : Messieurs Ludovic (1946) ; Au cœur de l'orage (DOC, 1948) ; Agence matrimoniale (1952) ; le Village magique (1955) ; les Évadés (id.) ; les Misérables (1958) ; la Française et l'amour (un sketch, 1960) ; Par-dessus le mur (1961) ; Mandrin (1962) ; Monsieur (1964) ; le Jardinier d'Argenteuil (1966). Il était marié à l'actrice Sylvia Monfort.