Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
A

ALCOVER (Pedro Antonio Alcover, dit Pierre)

acteur espagnol (Châtellerault, France, 1893 - Paris 1957).

Il ne semble pas avoir jamais sollicité sa naturalisation. Sorti du Conservatoire pour entrer à la Comédie-Française, c'est un colosse à la figure énergique qui devient vite un des « poids lourds » du cinéma français : Champi-Tortu (J. de Baroncelli, 1921), Feu Mathias Pascal (M. L'Herbier, 1925), puis l'Argent (id., 1929) le sacrent grand premier rôle. Pourtant, le parlant le tient un peu à l'écart : la Petite Lise (J. Grémillon, 1930), Liliom (F. Lang, 1934), l'Homme de nulle part (P. Chenal, 1937), Un carnet de bal (J. Duvivier, id.), Drôle de drame (M. Carné, id.), le Château des quatre obèses (Ivan Noé, 1939), le Colonel Chabert (René Le Hénaff, 1943).

ALCY (Charlotte Faës, dite Jehanne d')

actrice française (Vaujours 1865 - Versailles 1956).

Venue à Paris vers 1888 pour tenter sa chance, elle rencontre le directeur du théâtre Robert-Houdin, qui s'appelle Georges Méliès. Lorsque celui-ci se passionne pour le cinéma naissant, elle participe aussitôt aux courtes bandes où fleurissent les trucages (le Voyage dans la Lune, 1902) et s'épanouit la poésie. Plus tard, lorsque le magicien est oublié, elle l'épouse (1925) et l'aide à vendre des jouets gare Montparnasse. On les retrouve, on leur rend hommage. Seule survivante de cette époque fabuleuse, la première vedette du cinéma français se consacre jusqu'à sa mort au culte de son mari.

ALDA (Alan)

acteur américain (New York, N. Y., 1936).

Fils de l'acteur Robert Alda (New york, N. Y., 1914 - Los Angeles, Ca., 1986), Alan Alda est lui-même acteur de théâtre, de cinéma, de télévision, auteur, producteur et metteur en scène. Il fait ses débuts sur scène à l'âge de seize ans à Barnesville en Pennsylvanie, accompagne son père en Europe, où il fait des apparitions sur les scènes romaines et à la télévision. Sa célébrité exceptionnelle aux États-Unis vient surtout de la reprise pour la télévision de M*A*S*H*, dont il met en scène un épisode. Il apparaît au cinéma, notamment dans : la Guerre des bootleggers (R. Quine, 1970), Satan mon amour (P. Wendkos, 1971), Même heure, l'année prochaine (R. Mulligan, 1978), California Hotel (H. Ross, id.), la Vie privée d'un sénateur (J. Schatzberg, 1979). Il est également scénariste de ce film, ainsi que de Four Seasons (1981) et de Sweet Liberty (1986), dont il a assuré la mise en scène. Les récents développements de sa carrière (Betsy's Wedding, 1990, où il se dirige lui-même derrière l'œil de la caméra) font d'Alan Alda un artiste boulimique, soucieux d'accéder au statut d'auteur complet de ses productions. Sous la direction de Woody Allen, il s'impose définitivement comme un acteur brillant et subtil dans Crimes et délits (1989), Meurtre mystérieux à Manhattan (1993) et surtout Tout le monde dit “I Love You” (1996). Il rappelle, sans l'imiter, Cary Grant dont il retrouve par instant la vivacité et la causticité. On le voit également dans Flirter avec les embrouilles (David O. Russell, id.) et dans Mad City (Costa-Gavras, 1997).

ALDO (Aldo Graziati, dit G. R.)

chef opérateur italien (Scorze 1905 - Albara di Pianiga, Padoue, 1953).

Venu très jeune en France, Aldo a d'abord travaillé comme photographe de plateau : ses photos de films français des années 30 comptent parmi les meilleures du genre. Après la guerre, ayant suivi en Italie le tournage de la Chartreuse de Parme (Christian-Jaque), il se fixe à Rome en 1948 et devient rapidement un des chefs opérateurs les plus recherchés. Son exceptionnel sens plastique, son goût des cadrages précis, sa maîtrise des éclairages contrastés sont mis au service de cinéastes comme Visconti (La terre tremble, 1948), De Sica (Miracle à Milan, 1951 ; Umberto D, 1952 ; Stazione Termini, 1953), Genina (la Fille des marais, 1949 ; Histoires interdites, 1952), Soldati (la Provinciale / la Marchande d'amour, 1953). Il collabore avec Brizzi à la photographie d'Othello de Welles (1952). En 1953, il retrouve Visconti pour Senso. D'emblée, il se révèle un maître dans l'utilisation de la couleur : un accident d'automobile interrompt brutalement sa carrière (Senso sera terminé par Robert Krasker et Giuseppe Rotunno).

ALDRICH (Robert)

cinéaste américain (Evanston, R. I., 1918 - Los Angeles, Ca., 1983).

Venu à Hollywood en 1941, il est engagé par la RKO comme simple employé à la production, et gravit de façon traditionnelle les échelons de la profession, devenant employé sur les scripts, puis administrateur délégué et enfin assistant (de Milestone, Renoir, Wellmann, Chaplin et surtout Polonsky et Losey). Scénariste et producteur d'une série télévisée, c'est le succès de celle-ci qui lui permet de réaliser (après un galop d'essai inédit en France) son premier film personnel : la vedette en est d'ailleurs Dan Duryea, déjà vedette de la série en question. Aldrich essaie d'y rompre la grisaille TV au profit de recherches d'angle et de chocs spectaculaires. En outre, World for Ransom, film d'aventures à médiocre budget (dont le titre sonne comme un défi), indique le type d'action où Aldrich sera toujours à l'aise (d'où les échecs répétés dans la comédie de cet homme plein d'humour) : le récit picaresque, voire éclaté, plutôt que l'intrigue bien ficelée. S'il aborde le thriller, c'est toujours en éliminant les éléments de compréhension analytique que le genre avait hérités malgré tout du policier : le spectacle l'intéresse plus que le suspense. Pendant trois ou quatre ans, Aldrich va s'affirmer par des films d'aventures dont l'outrance délibérée va de pair avec une ambition cosmique qui culminera dans En quatrième vitesse, où un récit médiocre se transforme en allégorie de la condition humaine à l'ère atomique. L'influence formelle d'Orson Welles est flagrante dans ces films. Plus coté que le précédent aux yeux de certains critiques, le Grand Couteau (qui dénonce la corruption d'Hollywood) pèche par un excès de lourdeur dans la dramaturgie, en contraste avec l'extrême liberté de ton de Vera Cruz (où Aldrich n'est nullement pris au dépourvu par le Scope-couleur). Cette lourdeur théâtrale formera plus tard chez Aldrich un mélange instable et insoluble avec son goût pour les effets de montage et surtout les plans assenés comme autant de provocations aux instants de tension extrême.