Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
J

JANCSÓ (Miklós) (suite)

L'apport le plus révolutionnaire du cinéaste hongrois est incontestablement son écriture. Jancsó procède par longs plans-séquences en permanent devenir (Psaume rouge en compte 27, Sirocco d'hiver, 12 !), qui conjuguent, dans la profondeur de champ, le travelling, le zoom et parfois la grue. Il instaure et maîtrise ainsi un montage dans le cadre et une dialectique sans précédents entre l'espace et le temps, chacun pouvant exalter la continuité/contiguïté de l'autre ou la détruire. Dans tel cadre d'Électre, le jour s'est levé entre le début et la fin du plan. Dans tel plan de Rouges et Blancs, entre son début et sa fin, la durée s'est contractée (ellipse) et l'espace prodigieusement dilaté. Ces jeux entre l'espace et le temps culminent dans l'Horoscope de Jésus-Christ (1989), où le réalisateur utilise avec malice et ambiguïté le « temps » des écrans vidéo comme l'une des nouvelles dimensions d'une sorte de thriller métaphysique et poétique.

Films 

Les cloches sont parties pour Rome (A harangok Rómába mentek, 1959) ; Trois Étoiles (Három csillag, Ier épisode, 1960) ; Cantate (Oldás és kötes, 1963) ; Mon chemin (Igy jöttem, 1965) ; les Sans-Espoir (Szegénylegények, 1966) ; Rouges et Blancs (Csillagosok, katonák, 1967) ; Silence et Cri (Csend és kiáltás, 1968) ; Ah, ça ira ! / Vents brillants (Fényes szelek, 1969) ; Sirocco d'hiver (Sirokkó, id.) ; Agnus Dei (Égi bárány, 1971) ; La pacifista (IT, id.) ; La tecnica e il rito (1971, IT) ; Psaume rouge (Még kér a nép, 1972) ; Roma rivuole Cesare, 1973, IT) ; Pour Électre (Szerelmem Elektra, 1975) ; Vices privés, vertus publiques (Vizi privati, pubbliche virtù, 1976, IT-YOUG) ; Rhapsodie hongroise (Magyar Rapszódia, 1979 ; Allegro Barbaro, id. ; 2 films) ; le Cœur du tyran (Il cuore del tiranno / A zsarnok szive, 1981) ; Budapest (Budapesti muzski, MMTV, 1982) ; Faustus doktor boldogsagos pokoljarasa (série TV, 1983) ; Omega, omega (DOC, 1984) ; l'Aube (1986, FR-ISR) ; la Saison des monstres (Szörnyek évadja, 1987) ; l'Horoscope de Jésus-Christ (Jézus Krisztus horoszkópja, 1988) ; Dieu marche à reculons (Isten hátrafelé megy, 1990); la Valse du Danube bleu (Kék Duna keringő, 1991) ; les Restes (Maradékok, DOC, 1993) ; le Message des pierres (A kövek üzenete) : I-III (Hegyalia, Móldova, Máramaros, DOC, 1993-94), IV (Budapest, DOC, 1995), Aimez-vous les uns les autres (Szeressük egymást gyerekek, id. ; 3e épis.), la Lanterne du Seigneur à Budapest (Nekem Lámpást adott kezembe az Ur Pesten, 1998), Au diable les moustiques ! (Anyád ! a szúnyogok, 2000).

JANCZAR (Tadeusz)

acteur polonais (Varsovie 1926 - id. 1997).

Il étudie au Conservatoire de Varsovie et deviendra l'un des grands noms du théâtre dans la Pologne de l'après-guerre. Au cinéma, il obtient des rôles de premier plan dans les Cinq de la rue Barska (A. Ford, 1954), Génération /Une fille a parlé (A. Wajda, id.), Kanal (id., 1957) ; Eroïca (A. Munk, 1958) ; les Adieux (W. Has, id.), De la veine à revendre (A. Munk, 1960), Paysage après la bataille (A. Wajda, 1970), les Paysans (Chłopi, Jan Rybkowski, 1973), Récit en rouge (Henrik Kluba, 1974).

JANDA (Krystina)

actrice polonaise (Starachowice 1952).

Après des études à l'Académie du théâtre de Varsovie, elle débute à la télévision dans les Trois Sœurs de Tchekhov mais s'impose surtout au cinéma dans quatre films clés d'Andrzej Wajda, tournés à l'époque des « années Solidarité » (l'Homme de marbre, 1977 ; Sans anesthésie, 1978 ; le Chef d'orchestre, 1980 ; l'Homme de fer, 1981). Elle est sollicitée ensuite dans diverses productions, en Allemagne (Mephisto, I. Szabo, 1981 ; Bella Donna, Peter Keglevic, 1983 ; Laputa, H. Sanders – Brahms, 1986), en Suisse (Cœur de braises [Glut], Thomas Koerfer, 1983) et en France (Vertiges, Christine Laurent, 1985). Mais c'est en Pologne qu'elle semble donner le meilleur d'elle-même : l'Interrogatoire (Richard Bugajski, 1989 [1981]), le Décalogue (K. Kiesłowski, id.), Inventaire (K. Zanussi, id.), Fausse sortie (Zwolnïeni z zycia, Waldemar Krzystek, 1992), la Mère de sa mère (Matka Swojej matki, Robert Glinski, 1996), la Vie et les derniers instants de l'amour (Zanussi 2000). En 1996, elle réalise et interprète son premier film : Pestka.

JANG SUN-WOO

cinéaste coréen (Séoul, 1952).

Alors étudiant en anthropologie à l'université nationale de Séoul, il entre dans une troupe théâtrale. En 1980, il est incarcéré à cause de sa participation aux évènements de Kwangju et passe six mois en prison. Cherchant à continuer son activité de protestataire sans prendre le risque d'être de nouveau arrêté, il écrit des scénarios pour la télévision. En 1986, il coréalise l'Empereur de Séoul avec Son-U Wan. Par cette production indépendante, il démontre déjà sa capacité d'imagination et d'insolence, se demandant ce qu'il adviendrait de Jésus si celui-ci apparaissait aujourd'hui à Séoul. Dans le Temps du succès (1988), son premier film en solo, il fait la satire de la société de croissance économique des années 70. Avec l'Amour à Woomuk-Baemi (1989) et le Chemin de l'hippodrome (1991), il change de registre, s'intéressant aux relations hommes-femmes dans la société coréenne d'aujourd'hui. Hwa-om-kyung (1993), beaucoup plus métaphorique, suit le parcours d'un prisonnier politique vers le bouddhisme. Après To You, from Me (1995) et un documentaire sur le cinéma coréen intitulé Cinema on the Road (id.), Petal (1996) est le premier film coréen à aborder les événements de Kwangju. Jang Sun-Woo réalise ensuite Bad Movie (1998) et Fantasmes (Gojitmal, 1999), rêve d'un couple sado-masochiste capable de vivre sans avoir à travailler.

JANKOVICS (Marcell)

cinéaste hongrois (Budapest 1941).

Le réalisateur incarne une période classique et très créative du cinéma d'animation hongrois. Pétri de culture nationale et féru des contes et légendes du pays, son cinéma en a la ciselure symboliste et les envolées lyriques. Réalisateur touche-à-tout, Jankovics a travaillé tout autant pour des séries (Contes populaires hongrois, 1979) que sur des œuvres personnelles ou assuré la direction artistique d'œuvres d'autres cinéastes hongrois. Il entre au studio national Pannonia en 1960 et en devient, avec la Légende de Saint-Sylvestre (1964), l'un des réalisateurs les plus prolixes. Ses courts métrages de dessin animé Inauguration (1969), S.O.S. (1971) et Sisyphus (1973) jouent simultanément d'un registre allégorique et symbolique et d'un graphisme épuré. Réalisateur du premier long métrage d'animation hongrois, le Chevalier Janos (1973), inspiré du poète Sandor Petöfi, Jankovics y convoque la naïveté de l'héritage graphique magyar et le romantisme du XIXe siècle. Il récidive avec le Fils de la jument blanche (1980), qui marie les mythes et légendes populaires avec un graphisme dont la source formelle et chromatique est d'inspiration Art déco. Jankovics a enseigné l'animation à l'École supérieure des arts appliqués de Budapest.