Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
S

SCOLA (Ettore) (suite)

Films  :

Parlons femmes (Se permettete parliamo di donne, 1964) ; Cent millions ont disparu (La congiuntura, 1965) ; Thrilling (premier épisode : Il vittimista, id.) ; Belfagor le Magnifique (L'arcidiavolo, 1966) ; Nos héros réussiront-ils à retrouver leur ami mystérieusement disparu en Afrique ? (Riusciranno i nostri eroi a ritrovare l'amico misteriosamente scomparso in Africa ?, 1968) ; le Fouineur (Il commissario Pepe, 1969) ; Drame de la jalousie (Dramma della gelosia, tutti i particolari in cronaca, 1970) ; Permette ? Rocco Papaleo (1971) ; la Plus Belle Soirée de ma vie (La più bella serata della mia vita, 1972) ; Festival Unità 72 (MM, id.) ; Trevico-Torino, viaggio nel Fiat-Nam (1973) ; Nous nous sommes tant aimés (C'eravamo tanto amati, 1974) ; Affreux, sales et méchants (Brutti, sporchi e cattivi, 1976) ; Mesdames et messieurs, bonsoir (Signore e signori, buonanotte, CO L. Comencini, N. Loy, L. Magni, M. Monicelli, id.) ; Une journée particulière (Una giornata particolare, 1977) ; les Nouveaux Monstres (I nuovi mostri, CO M. Monicelli, D. Risi, id.) ; la Terrasse (La terrazza, ) ; Passion d'amour (Passione d'amore, 1981) ; la Nuit de Varennes / Il mondo nuovo (IT-FR, 1982) ; le Bal / Ballando Ballando (ALG-IT-FR, 1983) ; Macaroni (Maccheroni, 1985) ; la Famille (La Famiglia, 1987) ; Splendor (1989) ; Quelle heure est-il (Che ora è, id.) ; le Voyage du Capitaine Fracasse (Il Viaggio di Capitan Fracassa, 1990) ; Mario, Maria e Mario (1992) ; le Roman d'un jeune homme pauvre (Romanzo di un giovane povero, 1995) ; le Dîner (La cena, 1998) ; Concorrenza sleale (2001).

SCOPE.

Suffixe, issu du grec skopeîn (regarder), abondamment employé au XIXe siècle, avec ou sans le e final, pour baptiser les appareils permettant de créer l'illusion du mouvement : Phenakistiscope, Fantascope, Stroboscope, Tachyscope, Kinetoscope, Praxinoscope, Vitascop, etc. ( INVENTION DU CINÉMA.) Passé de mode dans la première moitié du XXe siècle, ce suffixe connut à nouveau une grande popularité à partir de 1953 grâce au nom de marque — CINÉMA-SCOPE — imaginé par la Fox pour son procédé d'écran large par anamorphose conduisant, sur l'écran, au format d'image 2,35 × 1. Il fut alors utilisé dans de nombreux noms de marque de procédés similaires (Superscope, Techniscope, Warnerscope, Dyaliscope, Totalscope, Sovscope, Agascope, etc.), voire dans des pseudo-noms de marque (Nudoscope). SCOPE y gagna son autonomie : c'est devenu le terme générique pour désigner le procédé d'écran large par anamorphose. ( FORMAT.)

SCOPITONE.

Nom de marque d'un appareil de type juke-box utilisant du film cinématographique (16 mm) permettant la vision, dans des lieux publics, de films musicaux.

SCORSESE (Martin)

cinéaste américain (Flushing, N. Y., 1942).

Petit-fils d'immigrants siciliens, élevé dans la « Little Italy » de New York, il est détourné de sa vocation religieuse par le rock and roll et le cinéma. Étudiant, puis chargé de cours à l'université de New York, il y réalise ses premiers essais (It's Not Just You, Murray, 1964 ; The Big Shave, CM, 1967) avant d'entreprendre un long métrage autobiographique achevé seulement trois ans plus tard, Who's That Knocking at My Door ? /I Call First (1968). Évoquant les jeux dangereux des jeunes Italo-Américains, il s'attache aux tourments d'un garçon catholique, son alter ego, tiraillé entre les exigences contradictoires de son environnement. Fidèle à son patrimoine ethnique et spirituel, il ne cessera dès lors de pratiquer un cinéma d'expression personnelle, confiant à la pellicule ses hantises intimes, retournant régulièrement à sa tribu et à son territoire, menant de front une double carrière dans et hors le système, sacrifiant tour à tour aux deux postulations de son tempérament créateur — révéler la réalité ou l'instituer en spectacle.

Après avoir collaboré à Woodstock (1970) comme assistant réalisateur et chef monteur, puis supervisé un reportage militant sur les manifestations contre l'invasion du Cambodge par l'armée américaine (Street Scenes, id.), il gagne Hollywood. Le producteur Roger Corman lui confie Bertha Boxcar (Boxcar Bertha, 1972), « un film pour les gars de la 42e Rue ». Cette saga des enfants perdus du syndicalisme au temps de la Dépression surprend par sa véhémence, ses citations bibliques, ses allusions au Magicien d'Oz, ses emprunts à la Nouvelle Vague. David Carradine y meurt crucifié contre un wagon à bestiaux. « En politique comme partout ailleurs, dit-il, il faut vomir les tièdes. »

En 1973, il est révélé par Mean Streets (id.) dont il est également coscénariste. Transfigurant l'expérience quotidienne du sordide en un opéra fabuleux, il y chorégraphie la saison en enfer d'une génération écartelée entre la mafia et l'Église. La circularité du récit, la ronde obsessionnelle des quatre protagonistes, les éclats paroxystiques concourent à la construction d'une liturgie qu'invoque d'entrée de jeu le cinéaste : « On ne s'acquitte pas de ses péchés à l'église, mais dans la rue ou chez soi. » Se réservant le rôle du tueur à gages, il précipite ses créatures dans la mort comme s'il voulait exorciser les démons de son adolescence. À Hollywood, il apprend à moduler les émotions en traitant de rapports amoureux dans Alice n'est plus ici (Alice Doesn't Live Here Anymore, 1975), odyssée sentimentale d'une jeune veuve, qui doit autant aux mélodrames sirkiens qu'aux comédies de Capra.

Grâce à une commande de la télévision, il retourne à ses racines : filmant Italianamerican (1974) au cours d'un week-end, il pose les jalons d'une future « histoire orale de l'Amérique », celle des immigrants et des minorités. Taxi Driver (1976) témoigne, à l'inverse, de sa propension, quasi expressionniste, à dramatiser les formes. Sur le pavé de Manhattan, celui que Michael Powell a surnommé le « Goya de la 10e Rue » retrouve, en même temps que son ami et complice Robert De Niro, ces âmes en peine dont il sait mieux que tout autre fixer les tragiques illuminations.

Biographie musicale mâtinée de film « noir », New York New York (1977) ressuscite l'ère des grands orchestres « swing ». Avec des moyens importants, Scorsese reconstitue en studio le New York des années 40, une ville onirique recomposée d'après les films de l'époque, hommage à la pyrotechnie visuelle d'antan (déjà célébrée dans le prologue d'Alice), mais aussi exercice pirandellien sur les vertiges du show-business. Dans la foulée, il filme le concert d'adieu du groupe rock The Band. D'abord conçu comme un reportage « live », The Last Waltz (1978) n'en déploie pas moins toutes les ressources d'une mise en scène flamboyante : il faut y voir un cérémonial, un parcours dans l'histoire du rock, en même temps qu'un requiem dédié à tous ceux qui ont brûlé trop vite leur énergie créatrice. Scorsese poursuit cette réflexion sur les pulsions autodestructrices des artistes et leur fascination pour les expériences limites en tournant un « home movie » en 16 mm sur son ami Steven Prince, American Boy (1978), qui complète Taxi Driver, comme Italianamerican corrigeait Mean Streets et The Last Waltz prolongeait New York New York.