Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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FANSTEN (Jacques)

cinéaste français (Paris 1946).

S'il n'a réalisé que quatre longs métrages cinématographiques depuis 1975, c'est qu'il consacre une partie importante de son temps à des téléfilms qui lui assurent une bonne réputation auprès des spécialistes du petit écran. Un de ses films les mieux diffusés en salles est d'ailleurs, à l'origine, une production TV : la Fracture du myocarde (1990), qui a su trouver un ton nouveau pour parler des enfants. Son premier film, le Petit Marcel (1975), montrait un délateur naïf pris au piège de la grande ville et des mœurs policières. Des jeunes tout aussi innocents sont les héros d'États d'âme (1986), porteurs des désillusions de leur génération. Dans Roulez jeunesse (1992), il pose un regard amusé sur les rapports entre de jeunes fugitifs et les retraités qui les aident. En 1996 il tourne C'est pour la bonne cause.

FANTASTIQUE (cinéma).

De tous les genres cinématographiques, le fantastique est l'un des plus difficiles à cerner. D'abord, à cause de la démarcation souvent vague qui le sépare à peine de genres voisins comme la science-fiction, l'horreur ou l'épouvante, voire le film noir. Ensuite, parce qu'il existe autant un ton qu'un genre fantastique. Le premier surgit volontiers et souvent au sein d'œuvres dépendant d'autres genres, par la personnalité d'un cinéaste. Ainsi la Nuit du chasseur (C. Laughton, 1955) baigne totalement dans un climat fantastique sans que jamais le film puisse être rattaché au genre. De même pour certaines œuvres de Luis Buñuel, Alfred Hitchcock ou Alain Resnais.

Pour que naisse le fantastique, il suffit qu'un éclairage, qu'un détail, qu'un cadrage, qu'un décor décalent la fiction cinématographique du réel qu'elle est censée représenter. On peut citer, bien sûr, les tentations oniriques et surréalistes de Buñuel, mais aussi le jeu avec la mémoire et l'imaginaire propre à Resnais (le loup-garou de Providence, 1977) ou le simple regard d'Hitchcock (le policier motorisé aux lunettes noires de Psychose, 1960).

Le fantastique n'est qu'un déséquilibre du réel. Ce déséquilibre peut être momentané. Mais, s'il se prolonge, naît un univers parallèle au nôtre, avec ses lois, ses figures et ses motifs. Si un film se situe dans cet univers, nous avons affaire à un film fantastique proprement dit. Il peut, indifféremment, créer ses propres légendes ou se référer à d'autres, dont la tradition populaire et la littérature nous ont rendu les mystères familiers : légendes historiques, monstres, vampires, voyages au-delà de la mort.

Bien qu'il soit le moins spécifiquement cinématographique des genres et bien qu'il ait fini par se développer avec un certain bonheur en Angleterre et en Italie, le fantastique s'est structuré et épanoui à Hollywood. Ses origines sont cependant nettement européennes, cela non seulement à cause du caractère des légendes et croyances dont il se nourrit. En fait, les possibilités du cinéma fantastique ont été nettes dès que Georges Méliès, en France, a découvert les possibilités infinies du trucage. Par la suite, le cinéma scandinave primitif, celui de Sjöström et Stiller, et plus tardivement celui de Benjamin Christensen (la Sorcellerie à travers les âges, 1921), ont fourni une iconographie précieuse : villages pétrifiés de silence, routes cahoteuses menant à de sombres châteaux, paysans aux trognes patibulaires, héros pâles et tourmentés dans des paysages nus et froids, au diapason de leurs troubles. Enfin, le cinéma expressionniste allemand, avec ses violents contrastes d'ombre et de lumière et son esthétique en arêtes vives a fourni au genre son langage : Lang (les Trois Lumières, 1921), Paul Leni (le Cabinet des figures de cire, 1924) et surtout Murnau (Nosferatu le vampire, 1922, et Faust, 1926) sont les véritables pères du film fantastique et les auteurs de ses premiers chefs-d'œuvre. Les trois cinéastes finiront par aller, à des dates différentes, à Hollywood, où le genre va réellement prendre forme.

On compte d'excellentes réussites fantastiques un peu partout : en Allemagne (les Aventures fantastiques du baron de Munchhausen, de Josef von Baky, 1943) ou en Europe centrale (le Manuscrit trouvé à Saragosse, de Wojciech Has, 1965, Pologne), entre autres. En France, la période de l'Occupation suscita une flambée de réussites fantastiques inégalées à ce jour. Les Visiteurs du soir de Marcel Carné (1942) ou l'Éternel Retour de Jean Delannoy (1943) et même le tardif la Belle et la Bête, de Jean Cocteau et René Clément (1946), sont des classiques consacrés. Mais le Baron fantôme (1943) et surtout la Fiancée des ténèbres (1945), tous deux de Serge de Poligny, ne leur sont en rien inférieurs. Quelques tentatives sont faites aux environs de 1970 qui ne rencontreront qu'un maigre public : la Rose écorchée de Claude Mulot (1969), l'Araignée d'eau de Jean-Daniel Verhaeghe (id.), Midi-Minuit de Pierre Philippe (1970), les Soleils de l'Île de Pâques de Pierre Kast (1972), le Seuil du vide de Jean-François Davy (1971-1974). De nouveaux réalisateurs s'efforcent dans les années 80 de redonner vie à un fantastique français : Bertrand Arthuys avec Tom et Lola, Alain Robak avec Baby Blood, Enki Bilal avec Bunker Palace Hôtel.

Diverses thématiques fantastiques surgissent de-ci de-là, dans des cinématographies très diverses, de la Scandinavie à l'Asie du Sud-Est ou dans l'ex-U. R. S. S. Toutefois, ce sont là des épisodes : nous concentrerons donc notre regard sur le fantastique hollywoodien, puis sur ses prolongements britanniques et italiens.

Le fantastique hollywoodien.

Très vite, le cinéma américain a senti les possibilités visuelles que recélaient des classiques de la littérature fantastique tels que Frankenstein de Mary Shelley (filmé en 1910 pour Edison) ou Dr Jekyll et Mr Hyde de Robert Louis Stevenson (filmé dès 1913). Mais, à mesure que la technique s'améliorait, le genre prenait une consistance plus grande, bien qu'il ait eu du mal à se libérer des limites théâtrales (Dr Jekyll et Mr Hyde de John S. Robertson, 1920, avec John Barrymore). En fait, avant l'arrivée de la première vague d'émigrés allemands, le cinéma fantastique hollywoodien peut se réduire à deux noms, Lon Chaney et Tod Browning.