Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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BONDARTCHOUK (Sergueï) [Sergej Fëdorovič Bondarčuk] (suite)

En 1959, il passe simultanément à la mise en scène avec un film qui a un grand retentissement en URSS et à l'étranger, le Destin d'un homme (Sud'ba čeloveka), d'après le roman de Cholokhov, où il occupe le centre d'une fresque historique retraçant les malheurs et l'héroïsme du peuple russe pendant la Seconde Guerre mondiale. Cette œuvre dramatique, réalisée dans un style quelque peu expressionniste, reçoit le grand prix du festival de Moscou et un prix Lénine l'année suivante : Bondartchouk fait figure d'artiste officiel. C'est ainsi qu'il obtient d'importants moyens pour tourner les quatre époques de Guerre et Paix d'après Tolstoï (Vojna i mir : I. Andrei Bolkonski, 1966 ; II. Natacha Rostova, id. ; III. 1812, 1967 : IV. Pierre Bezoukov, id.), entreprise considérable par son ampleur matérielle et son lyrisme plastique où il joue le rôle de Pierre, témoin des bouleversements causés par l'invasion napoléonienne.

Ces succès lui valent des offres étrangères : il tourne ainsi en Italie un Waterloo (1970) spectaculaire ; (il était déjà apparu hors d'URSS comme acteur dans les Évadés de la nuit (R. Rossellini, 1960) et la Bataille de la Neretva (V. Bulajic, 1969). Au cours des années 70, son jeu devient plus nuancé, plus intériorisé : son interprétation d'Oncle Vania (A. Mikhalkov-Kontchalovski, 1971) est tout à fait remarquable par sa finesse et sa retenue. Il a joué encore, sous la direction d'Igor Talankine, dans le Choix du but (Vybor celi, 1975) et le Père Serge (Otec Sergij, 1978), ainsi que dans deux films qu'il a lui-même réalisés : Ils ont combattu pour la patrie (Oni sražalis'za rodinu, 1975), épopée guerrière, d'après Cholokhov, conçue dans une perspective antihéroïque, et la Steppe (Step‘, 1977), adaptation assez terne de Tchekhov. En 1982-83, il tourne les Cloches rouges (Krasnye kolokola), film en deux parties (le Mexique en flammes [Meksika v ogne] et J'ai vu la naissance d'un monde nouveau [Ja videl roždenie novogo mira]) d'après les livres de John Reed. Bondartchouk est professeur au VGIK ; il est marié à la comédienne Irina Skobtseva et père de Natalia Bondartchouk, actrice et réalisatrice, fille de sa première femme, l'actrice Inna Makarova. En 1985, il met en scène Boris Godounov, en interprétant lui-même le rôle-titre.▲

BONDI (Beulah Bondy, dite Beulah)

actrice américaine (Chicago, Ill., 1888 - Woodland Hills, Ca., 1981).

Elle a trente ans d'expérience de la scène lorsqu'elle débute au cinéma dans Scènes de la rue (K. Vidor, 1931). À côté de nombreuses commères pittoresques, elle incarne les vertus familiales dans deux films de Capra : Monsieur Smith au Sénat (1939) et La vie est belle (1947) ainsi que la bouleversante vieille dame de Place aux jeunes (L. McCarey, 1937). Elle ne se consacre plus après 1963 qu'à la scène et à la télévision.

BONFANTI (Antoine)

chef opérateur du son français (Ajaccio 1923).

Il a enregistré et mixé le son d'à peu près tout ce qui compte dans le cinéma français depuis 1945, date à laquelle il commence à apprendre son métier comme stagiaire à la perche sur la Belle et la Bête de Jean Cocteau. Considéré comme l'un des pionniers du son direct en décors naturels, soucieux de l'authenticité absolue du son, il aime surtout construire l'univers sonore d'un film du tournage au mixage. Sa filmographie comprend des centaines de titres (environ cent vingt long métrages, le double de courts) et se caractérise par des collaborations marquantes avec Chris Marker (depuis Description d'un combat, 1956), Alain Resnais (depuis Hiroshima, 1958), Jean-Luc Godard (depuis le sketch la Paresse, 1963), Paul Vecchiali, André Delvaux, Bernardo Bertolucci, Amos Gitaï... Il faudrait citer encore Robert Bresson, René Vautier, Joris Ivens, Mario Ruspoli, Jean Cayrol, Jacques Rivette, Agnès Varda, Jean-Daniel Pollet, William Klein, Philippe Garrel, Yann Le Masson, Bruno Muel, Marguerite Duras, Armand Gatti, Raoul Ruiz... Témoin engagé, militant, il participe au collectif SLON et aux groupes Medvedkine (1967-1974), on peut d'ailleurs le voir, à cette époque, filmé par Michel Desrois dans Lettre à mon ami Pol Cèbe (1970). On n'oubliera pas non plus le mixage de films mythiques tels Octobre à Paris de Jacques Panijel (1962) ou la Société du spectacle de Guy Debord (1972). Il a transmis son savoir-faire d'artiste du son partout en France et dans le monde (l'INSAS à Bruxelles, l'EICTV à Cuba) en Algérie, Tunisie, Angola, au Mexique, Chili, Mozambique, Pérou, Venezuela.

BONI (Carmela Bonicatti, dite Carmen)

actrice italienne (Rome 1903 - Paris 1963).

Entrée dans le cinéma à l'âge de seize ans, elle fait d'abord carrière sous le nom de Katty Boni avant de devenir célèbre sous le nom de Carmen Boni. Confinée dans des rôles secondaires à l'ombre des actrices célèbres du début des années 20, elle impose peu à peu – gracieux sourire et yeux profonds – une personnalité attachante de femme épanouie. Active aussi bien en Italie qu'en Allemagne ou en France (elle épousera plus tard l'acteur français Jean Rigaux), elle est l'hégérie d'Augusto Genina, qui la dirige dans de nombreux films jusqu'au début du parlant (La moglie bella, 1924 ; Il focolare spento, 1925 ; L'ultimo Lord, 1926 ; Addio giovinezza, id. ; Scampolo, 1928 ; Quartier latin, 1929 ; la Femme en homme, 1931 ; Ne sois pas jalouse, 1932). Dans certains de ces films, cheveux courts et beauté androgyne, elle n'est pas sans rappeler Louise Brooks. Au cours des années 20, elle est dirigée en Allemagne par des cinéastes comme Geza von Bolvary, Robert Land, Franz Seitz, Wladimir Strijewsky, Karl Grüne. Lors d'un séjour en Italie, elle tourne aussi dans La grazia d'Aldo De Benedetti (1929). En 1930, Mario Camerini la dirige dans La riva dei bruti, tourné dans les studios de la Paramount à Joinville. Son activité se ralentit considérablement au cours des années 30 et elle fait ses dernières apparitions dans le Comte de Monte-Cristo de Robert Vernay en 1942 et dans D'homme à homme de Christian-Jaque en 1948. Elle meurt à Paris en 1963, renversée par une automobile.

BONITZER (Pascal)

scénariste et cinéaste français (Paris 1946).

Ancien critique de cinéma, il collabore au scénario du film d'Allio sur Pierre Rivière... (1976), et travaille sur de nombreux films de Téchiné (les Sœurs Brontë, le Lieu du crime, les Innocents, les Voleurs...). Sa réputation d'auteur passablement intellectuel a été vite établie par sa collaboration aux films de Rivette, dont Hurlevent, la Bande des quatre, la Belle Noiseuse, Jeanne la Pucelle, Secret défense, avec Benoît Jacquot (les Mendiants) ou Raul Ruiz (Généalogies d'un crime). À la fin des années 90, il évolue vers une plus grande simplicité, par exemple avec le scénario de Lumumba de Raoul Peck, et surtout avec deux comédies, qui, certes, se déroulent dans des milieux intellectuels, mais qui abordent avec ironie des situations classiques : Encore (1996) et Rien sur Robert (1999). Enseignant à la FEMIS, il a exercé une influence sur de nombreux nouveaux réalisateurs des années 90.