Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
B

BERGMAN (Ingrid) (suite)

Au terme de cette parenthèse de six ans, Ingrid Bergman fait son retour avec Anastasia, un véhicule fait sur mesure pour exploiter toutes les facettes de son talent. Les films qui suivent n'auront ni le lyrisme, ni la noirceur, ni la fantaisie de années 40 (dont l'Intrigante de Saratoga offre un bizarre et réjouissant cocktail). Bergman rattrape le temps perdu, l'actrice cède la place à la star internationale. Dans son jeu, elle souligne volontiers le trait, et sera désormais presque toujours trop bonne (l'Auberge du sixième bonheur), trop mondaine et malheureuse (Aimez-vous Brahms ?) ou trop piquante (Indiscret, Elena et les hommes). A Walk in the Spring Rain et Fleur de cactus s'efforceront tardivement de la faire descendre de son piédestal, où Vincente Minnelli la fera remonter avec Nina, hommage nostalgique à l'âge d'or hollywoodien qui essuiera un total échec commercial.

En 1978, Ingrid Bergman, retournant en Suède onze ans après le tournage de Stimulantia, trouve enfin avec Sonate d'automne son meilleur rôle depuis la fin de la période Selznick. S'exposant avec un rare courage au regard scrutateur d'Ingmar Bergman, elle y dessinera avec sa complicité un personnage riche de nuances et d'ambiguïtés, sans doute l'une des créations les plus contrôlées et les plus émouvantes de sa carrière. Elle a également fait quelques prestations remarquées à la télévision, dont l'interprétation du rôle de Golda Meir dans le film homonyme de Alan Gibson (1981).

Films  :

‘ le Comte de Munkbro ’ (Munkbrogreven, Edvin Adolphson et S. Vallen, 1935) ; ’les Récifs‘ (Bränningar, Ivar Johansson, id.) ; Swedenhielms (G. Molander, id.) ; ’la Nuit de la Saint-Jean‘ / Amour défendu (Valborgsmässoafton, G. Edgren, id.) ;’ Du côté du soleil ‘ (På Solsidan, Molander, 1936) ; Intermezzo (id., id.) ; Dollar (id., 1938) ; le Visage d'une femme (En Kvinnas ansikte, id., id.) ; les Quatre Compagnes (Die Vier Gesellen, C. Froehlich, id.),’ Une seule nuit ‘ (En enda natt, Molander, 1939) ; la Rançon du bonheur (Intermezzo : A Love Story, G. Ratoff, id.) ; Quand la chair est faible (Juninatten, Per Lindberg, 1940) ; la Famille Stoddard (Adam Had Four Sons, Ratoff, 1941) ; la Proie du mort (Rage in Heaven, W. S. Van Dyke, id.) ; Docteur Jekyll et Mr. Hyde (V. Fleming, id.) ; Casablanca (M. Curtiz, 1943) ; Pour qui sonne le glas (S. Wood, id.) ; Hantise (G. Cukor, 1944) ; les Cloches de Sainte-Marie (Leo McCarey, 1945) ; Swedes in America (I. Lerner, DOC, id.) ; la Maison du Dr Edwardes (A. Hitchcock, id.) ; l'Intrigante de Saratoga (S. Wood, 1945 [ 1943]) ; les Enchaînés (Hitchcock, 1946) ; Arc de triomphe (L. Milestone, 1948) ; Jeanne d'Arc (V. Fleming, id.) ; les Amants du Capricorne (Hitchcock, 1949) ; Stromboli (R. Rossellini, 1950) ; Europe 51 (id., 1952) ; Nous les femmes (id., 4e épisode, 1953) ; Voyage en Italie (id., 1954) ; Jeanne au bûcher (id., id.) ; la Peur (id., id.) ; Elena et les hommes (J. Renoir, 1956) ; Anastasia (A. Litvak, id.) ; Indiscret (S. Donen, 1958) ; l'Auberge du sixième bonheur (Inn of the Sixth Happiness, M. Robson, id.) ; Aimez-vous Brahms ? (Litvak, 1961) ; la Rancune (B. Wicki, 1964) ; la Rolls-Royce jaune (A. Asquith, id.) ; Stimulantia (épisode : ’le Collier‘, Molander, 1967) ; A Walk in the Spring Rain, G. Green, 1970) ; Fleur de cactus (Cactus Flower, G. Saks, id.) ; From the Mixed-up Files of Mrs. Basil E. Frankweiler (F. Cook, 1973) ; le Crime de l'Orient-Express (S. Lumet, 1974) ; Nina (V. Minnelli, 1976) ; Sonate d'automne (Ingmar Bergman, 1978).

BERGNER (Elisabeth Ettel, dite Elisabeth)

actrice britannique (naturalisée en 1938) d'origine autrichienne (Drohobycz, Autriche-Hongrie [auj. Drogobytch, URSS], 1897-Londres 1986).

Après des études d'art dramatique au Conservatoire de Vienne, elle fait des débuts remarqués à Zurich en 1919, puis joue les pièces du répertoire à Vienne, Munich et Berlin (Deutsches Theater de Max Reinhardt). Fuyant le régime hitlérien, elle se réfugie en 1933 en Grande-Bretagne et séjourne aux États-Unis pendant la Seconde Guerre mondiale. Célèbre au théâtre, elle n'a pas trouvé au cinéma les rôles qui auraient pu lui donner l'occasion de devenir une vedette de l'écran. Mais sa féminité brûlante et l'expressivité de son jeu convenaient parfaitement à l'inspiration Kammerspiel des premiers films de son mari le cinéaste Paul Czinner, qui ont contribué à sa juste réputation de comédienne : À qui la faute ? (Nju, 1924), Der Geiger von Florenz (1926), Liebe (1927), Fräulein Else (1929), Ariane (1932), Der Träumende Mund (id.). Ni Catherine the Great (1934), Escape Me Never (1935), As You Like it (1936), également dirigés par Czinner — ses films anglais —, ni son seul film américain Paris Calling (E. L. Marin, 1942), pas plus qu'une production tardive en Allemagne, Die glückliche Jahre der Thorwalds (W. Staudte, 1962), ne lui ont permis de confirmer ses possibilités.

BERKELEY (William Berkeley Enos, dit Busby)

cinéaste et chorégraphe américain (Los Angeles, Ca., 1895 - Palm Springs, id., 1976).

Fils de gens du spectacle, il devient acteur et metteur en scène de théâtre et se spécialise dans les danses. Il monte des grands spectacles pour J. J. Shubert et Flo Ziegfeld. Attiré à Hollywood par Samuel Goldwyn, il y transpose son goût de la magnificence. Il règle et met en scène, imaginant décors et costumes, les numéros musicaux de films le plus souvent réalisés par d'autres. Si son invention purement chorégraphique ne brille guère, son style cinématographique est extraordinaire : dans sa période Warner (1933-1939), il lie la force imaginative et l'exactitude formelle ; la continuité visuelle n'entrave ni la liberté des prises de vues (plongées verticales, immenses mouvements d'appareil) ni la verve sensuelle ; le goût Arts déco de la géométrie et des kaléidoscopes se combine avec une vision du monde unanimiste et populiste. Mais les budgets alloués à ces divagations rythmiques ne tardent pas à diminuer, et Berkeley rejoint la MGM, où il s'exprime de manière plus souple et moins exubérante, mais parfois avec un charme irrésistible (Minnie from Trinidad dans la Danseuse des Folies Ziegfeld). Capable de se plier aux exigences délicates du musical moderne (Place au rythme), il préside aux débuts de Gene Kelly (Pour moi et ma mie), mais se voit reprocher sa prodigalité par l'équipe d'Arthur Freed et supporte mal l'affectivité de Judy Garland. À la fin de sa carrière, il retrouve l'occasion de créer des spectacles grandioses (la Première Sirène). Parmi ses mises en scène, il faut surtout et très curieusement souligner un film... policier (Je suis un criminel).