Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
E

EISNER (Lotte H.)

historienne de cinéma, française d'origine allemande (Berlin 1896 - Paris 1983).

Critique de cinéma à Berlin en 1927, elle devait quitter son pays natal en 1933 à la montée du nazisme et s'installer à Paris, où elle fut, durant de longues années, la proche collaboratrice d'Henri Langlois à la Cinémathèque française (elle occupa de 1945 à 1975 le poste de conservateur en chef). Son expérience de l'époque expressionniste lui fit écrire trois livres essentiels : l'Écran démoniaque (1952, édition définitive en 1965), F. W. Murnau (1965), Fritz Lang (paru à Londres en 1976, édition remaniée par Bernard Eisenschitz, Paris, 1984).

EISSYMONT (Viktor) [Viktor Vladislavovič Ejsymont]

cinéaste soviétique (Grodno 1904 - ? 1964).

Assistant de Youtkevitch et Arnchtam de 1931 à 1939, il coréalise avec ce dernier ’ l'Amitié ’ (Druz'ja, 1938), débute avec ’ le Quatrième Périscope ’ (Četvertyj periskop, 1939) puis signe des œuvres de facture relativement académique, parmi lesquelles ’ Il était une fois une petite fille ’ (Zila-byla devočka, 1944), ’ le Croiseur Variag ’ (Krejser Varjag, 1947), ’ Aleksandr Popov ’ (1949), ’ Lumière sur le fleuve ’ (Ogni na reke, 1954), ’ Deux Amis ’ (Dva druga, 1955), ‘ Destin d'un tambour major ’ (Sud'ba barabanščika, 1956), ’ À la bonne heure ! ’ (V dobryj čas !, id.), ’ Petit Ami ’ (Družok, 1958), ’ la Fin de la vieille Berezovka ’ (Konec staroj Berezovki, 1961), ‘ la Ville extraordinaire ’ (Neobyknovennyj gorod, 1963).

EJOV (Valentin)

scénariste soviétique (Samar, auj. Kouibychev, 1921).

Diplômé de la faculté du VGIK en 1950, il débute en 1953 (le plus souvent en collaboration avec un autre scénariste ou/et le réalisateur) avec Nos champions (M. Donskoï) et Liana (B. Barnet). C'est en 1959 qu'il acquiert une réputation incontestée avec le scénario de la Ballade du soldat, écrit avec le réalisateur Grigori Tchoukhraï et qui lui vaut un prix Lénine : ce film apparaît comme l'un des premiers jalons de la Nouvelle Vague soviétique en proposant une vision résolument antihéroïque de la Seconde Guerre mondiale. Il collabore ensuite avec Gueorguï Danélia (Trente-Trois), Larissa Chepitko (les Ailes, 1966), deux films qui valent par leur engagement social ; il a également contribué au Nid des gentilshommes de Mikhalkov-Kontchalovski, à l'adaptation des ouvrages de John Reed pour la superproduction les Cloches rouges (S. Bondartchouk, 1982-83) et a signé le scénario du Tsar Ivan le Terrible (Car'Ivan Groznyj, 1991) de Guennadi Vassiliev.

EKBERG (Anita)

actrice suédoise (Malmö 1931).

À dix-huit ans, elle est élue Miss Suède et est invitée aux États-Unis, où elle est lancée par la Warner dans l'Allée sanglante (W. Wellman, 1955) aux côtés de John Wayne. Elle fait deux apparitions éblouissantes dans Artistes et Modèles (F. Tashlin, 1955) et dans Un vrai cinglé de cinéma (id., 1956) aux côtés de Dean Martin et Jerry Lewis. Fellini lui donne un rôle de vamp prototype dans La dolce vita (1960), repris en dimensions géantes dans son épisode Le tentazioni del dottor Antonio de Boccace 70 (1962). Malgré ce succès fondé sur une plastique plus qu'avantageuse, la suite de sa carrière européenne marque un déclin rapide. Elle fait pourtant un remarquable retour dans Intervista (F. Fellini, 1987).

EKK (Nikolaï Ivakin, dit Nikolaï) [Nikolaj Vladimirovič Ekk]

cinéaste et acteur soviétique (Riga 1902 - Moscou 1976).

Élève, acteur et régisseur de scène de Meyerhold, il s'intéresse de bonne heure à la technique cinématographique et notamment aux problèmes du son. Il réalise en 1930 le premier film parlant soviétique, le Chemin de la vie (Putevka v žizn), qui restera son œuvre la plus intéressante. C'est une illustration pleine de fougue des principes pédagogiques d'Anton Makarenko (cf. le Poème pédagogique), fondés sur les notions (alors révolutionnaires) de responsabilité et d'autodiscipline. Ekk en tire une sorte de poème lyrique à la gloire du marxisme, dépeignant une bande de gavroches ukrainiens (les besprizornyié, enfants que la guerre civile et le chômage ont livrés à eux-mêmes) qui vont se transformer, par l'effet d'une éducation au coude à coude, en héros de la collectivité. Par souci de réalisme, Ekk et son équipe vécurent plusieurs mois dans des centres de rééducation lors de la préparation du film. Le succès du film fut considérable, en URSS et à l'étranger, où il triompha de toutes les censures. Son influence est sensible sur de nombreux films traitant de la délinquance juvénile, par exemple Nous les gosses (L. Daquin, 1941), Quelque part en Europe (G. Radvanyi, 1947) ou Los olvidados (L. Buñuel, 1950). La suite de la carrière de Nikolaï Ekk est décevante. Il tourne en 1935 les premiers films en couleurs soviétiques, ’ Carnaval de couleurs ’ (Karnaval cvetov, 1935) et ‘ Rossignol, petit rossignol ’ (Solovej-solovuško [Grunja kornakova, 1936]) sur une grève ouvrière dans une fabrique de porcelaine au début du siècle, puis une adaptation de Gogol, ’ la Foire de Sorotchinski ’ (Soročinskaja jarmarka, 1939). Éloigné des studios pendant l'ère stalinienne, il y est revenu sur le tard pour tourner... des essais de films en stéréoscopie !

EKMAN (Gösta)

acteur suédois (Stockholm 1890 - id. 1938).

Surtout connu à l'étranger pour son interprétation du violoniste qui tombe amoureux d'Ingrid Bergman dans le film de Gustav Molander Intermezzo (1936), il fut certainement l'un des plus grands noms de la scène et de l'écran suédois de 1915 à sa mort. « Le théâtre, c'est comme le ping-pong, disait Jouvet : il faut qu'il y ait quelqu'un de l'autre côté du filet. » Dans ses interprétations, Ekman n'a jamais manqué de s'adresser au public bien plus encore qu'à ses partenaires. Il savait être passionné et expansif, tendre et mélancolique, héroïque et plein de vigueur. Pas plus qu'Orson Welles il n'aurait pu jouer un personnage effacé.

À l'écran il s'impose dans plusieurs films de John W. Brunius (‘ le Chat botté ’, 1918 ; ‘ Charles XII ’, 1924-25, ’ Gustav Wasa ’, 1928), Rune Carlsten (‘ la Bombe ’, 1919 ; ‘ les Traditions de la famille ’, 1920 ; ‘ Un jeune comte ’, 1924), Victor Sjöström (l'Épreuve du feu, 1921), Gustav Molander (la Famille Swedenhielms, 1935) et Gustav Edgren (Johan Ulfstjerna, 1936). Au Danemark, il interprète’ le Clown ’ d'Anders W. Sandberg en 1926 et la même année obtient le rôle-titre du Faust de Murnau.