Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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WHITELAW (Billie)

actrice britannique (Coventry 1932).

Elle débute à l'écran en 1953 dans The Fake (Godfrey Grayson), mais se consacre surtout au théâtre. Elle accepte quelques rôles modestes dans Bobbikins (Robert Day, 1959), Make Mine Mink (Robert Asher, 1960), Un homme pour le bagne (Val Guest, id.), Pas d'amour pour Johnny (R. Thomas, 1961), The Comedy Man (Alvin Rakoff, 1963). Elle accède aux grands rôles avec Charlie Bubbles (A. Finney, 1968), Commencez la révolution sans nous (B. Yorkin, 1970, dans le rôle de Marie-Antoinette), Gumshoe (Stephen Frears, 1972), Frenzy (A. Hitchcock, id.) et surtout avec la Malédiction (The Omen, Richard Donner, 1976), où elle interprète l'inquiétante gouvernante Mrs. Baylock. Après une composition remarquée dans Maurice (J. Ivory, 1987), elle confirme son talent dans The Dressmaker (Jim O'Brien, 1988), Joyriders (Aisling Walsh, 1988) et The Krays (Peter Medak, 1990).

WHITMAN (Stuart)

acteur américain (San Francisco, Ca., 1926).

Cet ancien boxeur doit ses débuts à Hollywood, en 1951, probablement plus à son physique viril et sympathique qu'à son talent, certain mais modeste. La 20th Century Fox le prépare patiemment aux emplois de jeune premier, qu'il aborde vers la fin des années 50. Derrière sa carapace solide, il sait suggérer la faiblesse ou le doute ; ses meilleurs rôles en tiendront compte : China Doll (F. Borzage, 1958) et, surtout, Duel dans la boue (R. Fleischer, id.). Chez nous, il se révèle excellent en soldat américain ballotté dans les derniers jours de la France occupée par une Simone Signoret qu'il trouble de plus en plus (le Jour et l'heure, R. Clément, 1962). Inépuisable, sans jamais devenir une vedette, il n'arrête pas de tourner, passant sans difficulté aux seconds rôles. Par ailleurs, prudent et avisé, il amasse bientôt une fortune colossale, notamment par des placements intelligents dans l'immobilier et l'élevage des chevaux. Dans les nanars fantastico-horrifiques qu'il tourne abondamment dans les années 80, il n'est plus du tout lui-même.

WHITMORE (James)

acteur américain (White Plains, N. Y., 1921).

Cofondateur de la station radiophonique de Yale, il joue à Broadway en 1947 et, l'année suivante, à Hollywood. Il y devient aussitôt l'un des meilleurs acteurs secondaires (Quand la ville dort, J. Huston, 1950 ; la Charge des Tuniques bleues, A. Mann, 1955 ; Chuka le Redoutable, G. Douglas, 1967). Oscar du second rôle dès son deuxième film (Bastogne, W. Wellman, 1949), ce quasi-spécialiste des silhouettes de trappeurs ou de militaires remporte, en 1975, l'Oscar du premier rôle pour sa composition du président Truman dans Give'Em Hell Harry ! On le retrouve en 1978 dans un film d'Ingmar Bergman : l'Œuf du serpent.

WHITNEY (James)

cinéaste expérimental américain (Altadena, Ca., 1922).

Peintre, il commence en 1939 à réaliser avec son frère John de petits films abstraits (Variations). Leurs Five Abstract Film Exercises (1943-44) témoignent d'une recherche originale sur la synchronisation de thèmes abstraits et de sons synthétiques. Yantra (1950-55) et Lapis (1963-1966), qu'il tourne seul, assisté, pour le second, d'un ordinateur analogique, sont inspirés par le yoga et les mandalas tantriques et comptent parmi les plus beaux films abstraits en couleurs de l'après-guerre.

WHITNEY (John)

cinéaste expérimental américain (Altadena, Ca., 1917).

Après des études au Pomona College (Ca.) et un an de musique et de photo en Europe, il réalise en 1939-40, avec son frère James, ses premiers films abstraits (Variations). Pour faire le son synthétique des Five Abstract Film Exercises (1943-44), ils utilisent un « pendule composé ». Le procédé s'avérant malcommode dans les expériences qu'il tente ensuite seul (Mozart Rondo et Hot House, 1947-1949 ; Celery Stalks at Midnight, 1951 et 1957), il recourt à l'informatique. Il tourne alors des génériques de films (Vertigo, avec Saul Bass), fonde la Motion Graphics Inc. (1960) et réunit, en 1961, dans Catalog des échantillons de ses réalisations. Permutations et Experiments in Motion Graphics (1967-68) ou Matrix (1970) témoignent de sa maîtrise de l'ordinateur numérique.

WICKI (Bernhard)

acteur et cinéaste suisse (Sankt Pölten, Autriche, 1919 - Munich, Allemagne, 2000).

Formé à Berlin et à Vienne, il passe de la scène à l'écran en 1950. Son rôle dans le Dernier Pont (H. Käutner, 1953) lui donne accès à une carrière internationale et il joue notamment sous la direction de Benedek, Staudte, Antonioni, etc. Il tourne une première œuvre d'inspiration documentaire, en 1958 : Warum sind sie gegen uns ?, puis le Pont (Die Brücke, 1959), un film de guerre démystificateur qui relance en Allemagne les projets des cinéastes indépendants. Après le Miracle de Malachias (Das Wunder des Malachias, 1961), il fait partie de l'équipe de réalisateurs du Jour le plus long (co A. Marton et K. Annakin, 1962), puis dirige deux productions internationales ambitieuses, la Rancune (Der Besuch, 1964), d'après une pièce de Friedrich Dürrenmatt, et Morituri (1965). Il ne peut mener à bien ses projets entre 1965 et 1970 mais signe ensuite quatre œuvres assez personnelles : Faux Poids (Das falsche Gewicht, 1971), Die Eroberung der Zitadelle (1977), la Variante Grünstein (Die Grünstein Variante, 1985) et la Toile d'araignée (Das Spinnennetz, 1989). Au cours de cette période, il est revenu au théâtre et on a pu le voir dans des films de Rainer W. Fassbinder, Ivan Passer, Peter Handke, Manfred Purzer, Hans W. Geissendörfer, Alov et Naoumov, Richard Dembo.

WIDERBERG (Bo)

écrivain et cinéaste suédois (Malmö 1930 - Aengelholm 1997).

Venu au cinéma par le biais de la critique (il tient une chronique agressive dans le journal de Stockholm Expressen), après avoir publié plusieurs romans et recueils de nouvelles, Widerberg appartient à une génération un peu écrasée par l'omniprésence d'Ingmar Bergman, qui laissait peu de place à cette « nouvelle vague » où l'on découvre Mai Zetterling ou Jan Troell. C'est d'ailleurs en s'inspirant des procédés de production légère de Godard ou de Truffaut que Widerberg essaie de libérer le film suédois, techniquement et stylistiquement : ses premiers films vont jouer, parfois avec bonheur, sur une part d'improvisation. Ayant publié un brûlot, Visionen I svensk film (1962), regards sans aménité sur la production du moment, il réalise la même année un long métrage qui fait mouche, en dépit (ou à cause) de ses maladresses. Mais un ton est donné, à l'écart d'un naturisme à la mode, qu'on prend pour de l'audace, ou des introspections infinies de Bergman. Si le titre français, le Péché suédois, est ridicule et racoleur, et le titre original ‘ la Voiture d'enfant ’ peu commercial, le film exprime très bien une solitude sans désespoir, une disponibilité sans réel idéal de la jeunesse. Les films de Widerberg, même lorsqu'ils aboutissent à l'anéantissement (Elvira Madigan, ou Joe Hill), ne reflètent pas l'angoisse, l'absurdité ou la peur, si fréquentes dans la littérature ou le cinéma suédois — l'écrivain Stig Dagerman s'est suicidé en 1954 —, mais une sorte de foi tranquille et têtue dans l'énergie individuelle. Il y a sans doute un peu de l'auteur dans les interprétations successives de Thommy Berggren, son acteur d'élection, notamment de l'adolescent qui veut devenir écrivain (le Quartier du corbeau) ou du jeune barde de la révolte ouvrière, Joe Hill. Seule la leçon de Elvira Madigan, cette fort belle élégie impressionniste sur l'amour coupé du réel, demeure une condamnation implicite de l'isolement : Pia Degermark et Thommy Berggren, la funambule et l'officier déserteur, se tuent parce qu'ils sont devenus incapables d'affronter la vie. Ceux qui gagnent, ce sont les morts d'Adalen, mitraillés par la troupe opposée aux grévistes ; c'est Joe Hill, au-delà de son exécution. Ils sont vainqueurs par leur exemple, même s'ils sont dépossédés de leur victoire. Une conclusion peut-être amère, mais Widerberg ne croit pas que le cinéma soit l'espace réservé à la propagande, ni aux mots d'ordre. Il ne croit pas à la démonstration idéologique, mais à l'émotion, à la vérité individuelle. Les adolescents qu'il met en scène, Anders dans le Quartier du corbeau, Kjell dans Adalen 31, ou Roland Jung, le jeune publiciste, et plus tard Joe Hill, l'émigrant, croient en la vie, même s'il leur faut abandonner illusions, pays et famille. Elvira Madigan demeure donc un film à part. Mais ce qui le lie à l'œuvre de Widerberg, c'est sa beauté plastique — à la limite de l'esthétisme —, une attention au cadrage, à la lumière, à cette richesse tactile de l'image qui rapproche Widerberg d'un Mauro Bolognini, dont le Metello, par exemple, ne sera pas sans faire penser à Adalen 31. La consécration internationale, après que Adalen 31 et Joe Hill (tourné aux États-Unis) eurent remporté le prix spécial du jury à Cannes, en 1969 et en 1971, n'a pas sauvé le cinéaste de l'appauvrissement et de la sclérose de la production en Suède. Ses films suivants, des « policiers » quoique d'assez bonne facture, ne lui ont pas gardé son audience, mais en 1987 l'adaptation de l'œuvre de Torgny Lindgren le Chemin du serpent, mélodrame social et parabole exacerbée sur l'hystérie du pouvoir, lui a permis de retrouver intact son talent des années 60.