Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
M

Merklin

Société de facture d'orgues française.

Fondée par l'Allemand Joseph Merklin (Oberhausen 1819 – Nancy 1905), qui s'établit à Bruxelles en 1843 et à Paris en 1855, elle devint en 1894 la Manufacture lyonnaise Michel Merklin et Kuhn, et subit de nombreuses transformations jusqu'à nos jours. La maison Merklin a construit de très nombreux instruments, principalement dans le centre de la France, de style romantique et symphonique.

Merlet (Dominique)

Pianiste et organiste français (Bordeaux 1938).

Il étudie le piano et l'orgue dès l'âge de neuf ans et fait ses débuts en public trois ans plus tard. Au Conservatoire de Paris, il étudie ensuite le piano avec Jean Doyen, l'accompagnement avec Nadia Boulanger et la musique de chambre avec René Le Roy, et obtient trois premiers prix en 1956 et 1957. Titulaire d'un premier prix au Concours international de Genève en 1957, il s'oriente d'abord vers une double carrière de pianiste et d'organiste. En 1974, il est nommé professeur de piano au Conservatoire de Paris, après avoir enseigné à ceux de Strasbourg et de Rouen. En 1992, il est nommé professeur de virtuosité au Conservatoire de Genève. Ouvert à toutes les musiques, il a, parallèlement aux œuvres du répertoire, créé des œuvres pour orgue et pour piano de musiciens d'aujourd'hui (B. Gillet, J.-P. Leguay, etc.).

Merrill (Morris Miller, dit Robert)

Baryton américain (Brooklyn, New York, 1919 – New Rochelle, New York, 2004).

Il étudia le chant, d'abord avec sa mère Lillian Miller Merrill, elle-même chanteuse, puis avec Samuel Margolis à New York. Il débuta à Trenton dans le rôle d'Amonasro de Aïda (1944) et, l'année suivante, remporta le concours radiophonique organisé par le Metropolitan Opera, où il fit sa première apparition dans Germont de la Traviata. Il tourna à Hollywood plusieurs films (dont des comédies musicales) et chanta dans le monde entier avec les meilleures formations, mais poursuivit l'essentiel de sa carrière au Metropolitan Opera de New York, dont il fut sociétaire.

   Une voix ample, sonore et très assurée lui fit assumer tous les rôles de baryton du répertoire italien (et la plupart de ceux du répertoire français). Il fut choisi par Toscanini pour interpréter les rôles de Germont et de Renato lorsque celui-ci enregistra la Traviata et Un Ballo in maschera.

Mersenne (abbé Marin)

Philosophe et théoricien français (La Soultière, Maine, 1588 – Paris 1648).

Il commence ses études à partir de 1604 au collège des jésuites à La Flèche et les poursuit à Paris, où il s'installe en 1609. En 1611, il devient membre de l'ordre des Minimes et entre au monastère de la place Royale à Paris. Mis à part ses voyages à travers la France, puis aux Pays-Bas et en Italie, Mersenne passe la majeure partie de sa vie dans la capitale. En dehors de son œuvre de philosophe, de sa correspondance avec Descartes et bien d'autres penseurs, sa contribution la plus importante à la musique reste le vaste ouvrage Harmonie universelle, publié à Paris en 1636-37 (rééd. en fac-similé par le C.N.R.S., 1963, nouv. rééd., 1972). Organisée en 19 Livres de musique, l'Harmonie universelle, traite de la nature des sons, de l'acoustique, de la voix, des ornements du chant, des consonances et dissonances, des modes et de la composition. Enfin, une grande partie de l'ouvrage est consacrée aux instruments. Les exemples musicaux sont nombreux et sagement tirés de l'œuvre d'éminents auteurs : ceux du passé (Le Jeune, Mauduit), ceux du présent (Moulinié, A. Boesset). Cela reflète le respect de Mersenne pour les anciens et pour la tradition zarlinienne, en même temps que son acceptation des idées nouvelles. Comme il a servi de lien entre les différents philosophes, Mersenne se situe en musique au carrefour de la Renaissance et de l'époque baroque.

Merula (Tarquinio)

Organiste et compositeur italien (Crémone v. 1590 – id. 1665).

En 1624, il fut organiste à la cour de Varsovie. En 1626, de retour à Crémone, il fut organiste à l'église Sancta Agatha, puis fut, en 1631, maître de chapelle à Sancta Maria Maggiore de Bergame. En 1643, il collabora, à Venise, au mélodrame La Finta Savia de Strozzi. Il revint définitivement à Crémone en 1652. Il fut l'un des premiers à pratiquer la sonate à trois, avec basse continue. Dans ses madrigaux, il se montre un précurseur de la cantate par l'alternance des arias et des récitatifs. Outre des sonates et madrigaux, il a laissé une messe concertante, des motets et des œuvres pour orgue.

Merulo (Claudio)

Organiste et compositeur italien (Correggio 1533 – Parme 1604).

Ses activités dans le domaine musical furent très diverses. Organiste, il exerça à la cathédrale de Brescia (1556), à Saint-Marc de Venise (1557), puis à Mantoue (1584) et à Parme (1586), où il fut organiste de la cathédrale et de la chapelle ducale. Expert en facture d'orgues, on lui doit un positif construit par lui-même. Il fut également éditeur de musique à Venise, en collaboration avec Betanio (1566-1571). En tant que compositeur, on lui doit 4 Livres de madrigaux (à 5 voix en 1566 et 1604, à 4 voix en 1579, à 3 voix en 1580), 7 volumes de Motets et de Sacrae cantiones, de 4 à 12 voix, plusieurs Messes, des Litanies de la Vierge avec orgue (1609). Pour l'orgue, il a écrit des Ricercari (1567), 1 Messe (1568), 3 livres de Canzoni fatte alla francese et 2 livres de Toccate (1598 et 1604), où s'opposent des passages de style improvisé, propres à la toccata, et des segments fugués à la manière du ricercare. Il a également écrit 3 livres de Ricercari da cantare a 4 voci, pour groupes instrumentaux. Il composa encore des intermèdes et des musiques de scène, mais ses partitions sont pour la plupart perdues. Merulo édita lui-même une partie de ses œuvres. D'autres pièces figurent dans des recueils collectifs ou ont été éditées par son arrière-petit-neveu Giacinto (Parme 1595 – id. v. 1650), lui-même organiste et compositeur.

Mésopotamie

La région comprenant les vallées du Tigre et de l'Euphrate, ainsi que tout le pays intermédiaire, et constituant ainsi la majeure partie de l'Iraq actuel fut le berceau d'une des plus vieilles civilisations, y compris sur le plan musical. Notre connaissance pratique de cette musique se limite aux représentations d'instruments et de scènes de musique sur des bas-reliefs de pierre, sur des tablettes de terre cuite et sur des sceaux-cylindres et, par ailleurs, à quelques écrits qui éclairent parfois sur la théorie et même sur la notation de cette musique.

   Le degré de perfection des plus anciens instruments de musique permet d'évaluer à la fois la qualité et l'importance de cette musique, faute d'autres témoignages. Ainsi, de très anciennes représentations d'instruments de musique sumériens figurent sur une empreinte de sceau de la seconde moitié du IVe millénaire avant Jésus-Christ, montrant des musiciens jouant de la harpe, du tambour à membrane et des cornes courbées.

   La famille des idiophones comprend des bâtons entrechoqués, soit bien droits, soit taillés en faucille, parfois tenus d'une seule main comme les crotales grecs et représentés depuis le IIIe millénaire av. J.-C. Les cymbales sont, elles, représentées depuis l'époque babylonienne (IIe millénaire av. J.-C.) et peuvent être plates, ou, pendant l'époque assyrienne (Ier millénaire av. J.-C.), coniques. On rencontre aussi des cloches en argile ou en métal, de la même époque, ayant une signification magique. Enfin des hochets reproduisant de petits animaux ou sous forme de disques creux, montés sur un manche et des sistres en étrier ou sous forme de cadre rectangulaire complètent cette famille d'instruments qui servaient de support rythmique à la musique et à la danse.

   La famille des membranophones comprend plusieurs variétés de tambours, dont le rôle et la fonction sont intéressants. Ainsi, pendant l'époque néosumérienne (v. 2150-1850 av. J.-C.) apparaissent le tambourin utilisé par les danseurs dans leurs danses rituelles ainsi que le gigantesque tambour sur cadre percuté par deux joueurs à mains nues. Pendant l'époque babylonienne, le tambour portatif était très usité ; on le tenait contre l'épaule gauche de la main gauche et on le frappait de la droite. On pouvait également le tenir devant soi ou bien sous l'aisselle. Il accompagnait la danse et, plus tard, il fera partie des ensembles instrumentaux. Le tambour en forme de gobelet (lilissu) ayant une peau de taureau était un instrument important du culte jusqu'à la fin des époques babylonienne et assyrienne. Pendant le Ier millénaire av. J.-C. existaient deux types de tambours très usités ; l'un était cylindrique à deux peaux et soutenu par une courroie, l'autre avait la forme d'un carquois et comportait une peau.

   Les cordophones sont les instruments les plus perfectionnés et ceux qui mettent le plus en évidence le degré d'évolution et l'importance de cette musique. La harpe fut représentée dès le IVe millénaire av. J.-C. ; elle est en forme d'arc ouvert vers l'avant et la caisse de résonance est soit creusée dans tout le bois, soit dans la partie inférieure. Elle est tenue verticalement et a jusqu'à 6 cordes pincées par les mains de l'exécutant qui tient l'instrument devant lui, le bois de l'arc dirigé contre l'épaule. Les harpes de la première période d'Ur (v. 2600-2350 av. J.-C.) étaient similaires mais avaient de 11 à 15 cordes et étaient d'une grande taille. À l'époque babylonienne apparaît la harpe angulaire jouée soit verticalement, soit horizontalement ; dans ce cas, l'instrumentiste tenait la caisse de résonance sous le bras gauche et pinçait les cordes avec un plectre tenu de la main droite, tandis que les doigts de la gauche pouvaient toucher également les cordes. Un type de harpe ronde d'origine incertaine, jouée horizontalement comme la harpe angulaire, se rencontre dès la première moitié du IIIe millénaire av. J.-C. Enfin, l'époque assyrienne offre de nombreux témoignages de harpes angulaires verticales ou horizontales jouées les unes à mains nues, les autres avec un plectre. Mais le nombre de cordes, considérablement augmenté, varie de 8 à 22.

   La cithare était l'autre instrument important des Sumériens, qui l'associaient au taureau, symbole de fertilité et de puissance divine. Elle est représentée dès l'époque de Djemdet-Nasr (v. 3100-2800 av. J.-C.). La caisse de résonance avait d'abord la forme d'un taureau ; ultérieurement la tête seule de l'animal fera saillie à l'avant. L'instrument était soit portatif, car de taille réduite, soit posé par terre, car de grande taille ; les cordes, jusqu'à 11 pendant la première période d'Ur, étaient pincées par les doigts de l'instrumentiste. De la caisse de résonance, de forme variable, partent deux montants égaux ou asymétriques réunis par une barre transversale sur leur extrémité supérieure. Les cordes s'y attachent et passent parallèlement à la caisse de résonance pour être fixées dans leur extrémité inférieure à une pièce en saillie à la base de la caisse. Des tiges en bois fixées entre les nœuds des points d'attache des cordes sur le joug permettaient la tension variable de celles-ci et des accords différents. À l'époque babylonienne, l'instrument n'est plus orné de la tête d'un taureau et devient petit à petit de taille plus réduite encore ; un vase hittite du XIVe siècle av. J.-C., conservé au musée d'Ankara, montre une énorme cithare dépassant la taille de l'homme et jouée par deux musiciens simultanément ; les cordes sont pincées avec un plectre tenu d'une main, tandis que l'autre, comme pour les harpes horizontales de même époque, pouvait toucher aussi les cordes. À l'époque assyrienne, on tenait l'instrument plus ou moins incliné et on en jouait avec ou sans plectre ; il avait de 5 à 7 cordes.

   Le luth à manche long et caisse de résonance petite et ovale ou ronde parut en Mésopotamie dès la seconde moitié du IIIe millénaire av. J.-C., mais devint un instrument usuel à partir de l'époque babylonienne. Une peau était tendue sur la caisse, et les 2 ou 3 cordes étaient pincées avec un plectre. Un autre type d'instrument avait le manche moins long et la caisse plus grande et plus rectangulaire. Enfin, un troisième type avait une caisse cintrée et un manche à frettes ; il était en faveur chez les Hittites.

   Des aérophones étaient sûrement en usage dès le IVe millénaire av. J.-C., mais c'est seulement l'époque babylonienne qui en fournit pour la première fois des représentations sans équivoque. Le type aulos double (à anche double) existant depuis l'époque d'Akkad (v. 2350-2150 av. J.-C.) en devint l'instrument principal. La corne courbe déjà mentionnée, la trompette et la flûte de Pan étaient également en usage.

   Tous les instruments mentionnés servaient essentiellement à l'accompagnement du chant et de la danse ; dès l'époque sumérienne existaient aussi des ensembles instrumentaux, particulièrement variés à l'époque assyrienne, qui ne pratiquaient sûrement pas la polyphonie, mais le principe de l'hétérophonie.

   La pratique musicale avait une signification essentiellement religieuse et servait pour louer les dieux et accompagner les prières. Elle suivait l'homme du berceau à la tombe et même au-delà. Les musiciens faisaient partie du personnel des temples, étaient très hiérarchisés et intervenaient pendant la liturgie quotidienne du temple, lors de festivals annuels ou pendant des occasions précises, comme la construction d'un temple ou des rites funéraires. La musique vocale chorale ou en solo était très répandue et les instruments de musique qui l'accompagnaient étaient choisis selon l'usage rituel de l'occasion. L'apprentissage suivait les règles de la tradition orale même s'il existait des écoles dans les temples et les palais royaux qui formaient des élèves selon des critères rigoureux appliqués sur trois ans. Dans toutes ces pratiques, le sumérien demeura largement employé longtemps après son extinction comme langue courante.

   La théorie musicale était en rapport avec les mathématiques et remonte probablement à l'époque sumérienne. L'heptatonisme diatonique, un système de sept modes désignés par les mêmes termes qui servaient aussi pour les noms de différents aspects de quarte (4) et de quinte (3). Enfin, la découverte récente de tablettes hourrites du XIVe siècle av. J.-C. permet de conclure à l'existence d'une notation musicale ; toutes ces données témoignent du degré d'évolution de la musique en Mésopotamie, notamment à partir du IIe millénaire av. J.-C.