Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
F

flûte

À l'orgue, famille de jeux de fond de section plus forte que les principaux, ce qui leur confère une sonorité plus douce et plus chaleureuse.

Construits en métal ou en bois, les tuyaux du jeu de flûte peuvent être cylindriques, mais aussi coniques, ou bouchés et percés d'une cheminée. Au XIXe siècle, on a fait donner à certains jeux de flûte, soumis à une pression plus élevée, l'octave supérieure (flûte « harmonique » et flûte « octaviante »), et l'harmonique 3 (QUINTATON). La famille des jeux de flûte s'étend du grave à l'aigu de l'instrument, et se trouve représentée dans toutes les compositions d'orgues.

Foccroulle (Bernard)

Organiste belge (Liège 1953).

Il étudie avec Herbert Schoonbroodt au Conservatoire de Liège, puis avec Xavier Darasse, Bernard Legacé et Gustav Leonhardt. Son intérêt pour la musique contemporaine le porte d'emblée à interpréter ce répertoire, parallèlement à son travail sur les œuvres baroques : de 1974 à 1976, il se produit au Festival de Royan. Il joue la musique d'orgue du XVe au XXe siècle, avec une prédilection pour l'œuvre de Bach, dont il a enregistré l'intégrale sur des orgues historiques. Il appartient à plusieurs ensembles de musique ancienne, dont le Ricercar Consort, et consacre aussi une part importante de son activité à l'enseignement ­ professeur d'analyse musicale au Conservatoire de Liège, il est régulièrement invité à donner des masterclasses dans les académies d'été. En 1992, il est nommé directeur du Théâtre de la Monnaie à Bruxelles.

Foerster (Josef Bohuslav)

Compositeur, pédagogue et critique musical tchèque (Prague 1859 – Vestec, près de Stará Boleslav, 1951).

Fils de Josef Foerster, organiste, compositeur et théoricien slovène (Osenice 1833 – Prague 1907), et neveu d'Antonin Foerster, organiste, théoricien et chef de chœur (Osenice 1837 – Novomesto 1926), il reçut de son père une éducation musicale poussée, se révéla aussi habile peintre que musicien et écrivain, et fut témoin de la création de nombreuses œuvres de Smetana et Dvořák en même temps que de la querelle opposant les partisans du nationalisme tchèque le plus étroit à ceux qui voulaient s'ouvrir sur l'étranger, quitte à devoir parler allemand. Foerster vécut à Hambourg, où il fut professeur au conservatoire et critique, occupa les mêmes fonctions à Vienne à partir de 1903, fréquenta Mahler et Richard Strauss. Nommé professeur au conservatoire de Prague en 1919, il en fut directeur de 1922 à 1931. Son œuvre considérable comprend essentiellement de la musique symphonique et concertante, un peu de musique de chambre et de nombreuses compositions vocales, essentiellement des chœurs. Elle émane d'un tempérament riche, à la fois lyrique, méditatif, frôlant le mysticisme, humaniste, et capable de puissance héroïque. On lui doit le rajeunissement de la musique chorale tchèque. Dans le domaine de la recherche mélodique, harmonique et rythmique, il a permis la transition entre le romantisme patriotique et la pureté modale de l'école tchèque moderne.

folía (esp. ; « folie »)

1. Forme musicale très utilisée dans la musique instrumentale des XVIIe et XVIIIe siècles. Le nom original folía désigne une danse portugaise du XVIe siècle, qui s'est par la suite répandue en Espagne (d'où sa dénomination française courante de folies d'Espagne) ; elle entra dans ce dernier pays au répertoire des vihuelistes, puis conquit l'Europe à partir du XVIIe siècle. Cette danse portugaise était vive et animée, et, étymologiquement, le mot folía provenait sans doute de termes tels que foliar (« se réjouir », « se divertir »). En Espagne, elle prit parfois les noms de foliada, folijones, folion, et elle apparut sous une forme instrumentale, plus rarement vocale. Comme danse théâtrale, elle fut utilisée, notamment, par Lope de Vega. Elle eut tendance à ralentir, et, lorsqu'elle se répandit à travers l'Europe au XVIIe siècle, la folía instrumentale (pour violon, viole de gambe, clavecin) fut fréquemment employée, avec une mélodie ayant fini par se figer et à laquelle devait en définitive s'attacher plus particulièrement le nom de folía ou de folies d'Espagne, comme base de variations instrumentales sur un thème de seize mesures à 3/4 ou à 3/2 ; l'exemple le plus célèbre est celui de la douzième sonate de l'opus 5 de Corelli, pour violon et continuo (1700), qui est une série de 23 variations sur une simple basse contrainte de folía (celle-ci s'était ainsi rapprochée de la chaconne et de la passacaille). Avant Corelli, elle avait été popularisée par d'Anglebert (cycle de 22 variations pour clavecin, 1689). Toujours en France, elle fut adoptée par Lully et Marin Marais.

   De nombreux compositeurs devaient réutiliser le thème de la folía dans les circonstances les plus diverses : Vivaldi, Pasquini, Pergolèse, D. Scarlatti, Bach (Cantate des paysans), Keiser (Der lächerliche Prinz Jodelier), Carl Philipp Emanuel Bach (variations pour clavier), Grétry (l'Amant jaloux), Cherubini (ouverture de l'Hôtellerie portugaise), Liszt (Rhapsodie espagnole), Nielsen (Maskarade), Rachmaninov (Variations sur un thème de Corelli, ce titre étant donc musicologiquement inexact).

2. Chanson populaire lyrique, synonyme de copla.

3. Danse populaire originaire des îles Canaries.

folklore

Ce mot a pris un sens tellement vague et parfois même dérisoire qu'on est très loin du sens primitif. En fait, il désigne tout ce qui a trait aux traditions orales dans les populations rurales d'Europe, traditions qui remontent au Moyen Âge, à une époque où paysans et artisans possédaient une langue, des légendes, des danses et des chants spécifiques. Le rouleau compresseur d'un mode d'enseignement unique pour tout un pays n'était pas encore venu gommer le caractère propre à chaque région, aussi bien au point de vue du mode de vie que du tempérament de ses habitants, pour niveler les différences. Les pays d'Europe où ces traditions sont restées le plus longtemps vivaces sont les plus isolés géographiquement et les moins industrialisés. Ainsi dans l'Île-de-France, région de passage, les coutumes se sont perdues beaucoup plus tôt qu'en Bretagne ou en Corse. Il ne faudrait pas croire qu'il n'y ait aucune communication entre la musique « savante » écrite, et réservée à une classe de la société, et la musique populaire (dans le meilleur sens du terme). Le cloisonnement culturel entre catégories sociales était moins rigide qu'en cette fin de XXe siècle, et les paysans avaient des échos de ce qui se chantait au château, ne serait-ce que par les instrumentistes. C'est au XIXe siècle que les écrivains se penchent sur les us et coutumes des populations villageoises (George Sand écrit ses romans, où elle décrit fêtes et cérémonies berrichonnes). De leur côté, les compositeurs russes découvrent les chants de tradition orale qui servent de fondement à leur musique. Ainsi s'amorce un mouvement qui gagne toute l'Europe : Pedrell découvre ce type en Espagne, Kodály, puis Bartók en Hongrie ; ils recueillent des centaines de chants et les notent. En France, des musiciens aux noms moins prestigieux opèrent de même, en explorant chacun une province : il était temps, puisque le XXe siècle voit l'abandon de toutes ces traditions. Ce n'est que dans les années 60/70 qu'on voit apparaître un regain d'intérêt, pour les langues d'abord, puis pour les objets ; on crée alors des musées « d'arts et traditions populaires », mais la musique, elle, ne s'enferme pas sous des vitrines si elle n'est pas écrite ou enregistrée.

   Dans chaque pays, la musique folklorique plonge ses racines dans un type de civilisation orale, qu'on ne trouve plus qu'en Afrique et dans les pays orientaux. Elle est intimement liée à la vie quotidienne d'une communauté humaine ; en schématisant, on pourrait la diviser en plusieurs catégories :

   1. chants narratifs ;

   2. chants de travail ou de corporations (chant de labour, fileuses) ;

   3. chants de saisons ;

   4. chants de fêtes (Saint-Jean, Toussaint, Noël ; il arrive que la même mélodie serve de support à trois textes différents) ;

   5. chants de circonstance (mariages, cérémonies funèbres) ;

   6. chants de danses, extrêmement diversifiés.Il semblerait que les hommes de notre époque désirent lutter contre l'uniformisation et cherchent à retrouver une identité culturelle (en réaction contre ce qui est imposé par les médias) par un retour, peut-être utopique, à des pratiques musicales liées au sens de la fête.