Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
C

chaconne
ou chacone (esp. chacona ; ital. ciacona)

Forme de danse ancienne, peut-être d'origine mexicaine, venue d'Espagne au début du XVIIe siècle et généralisée dans toute l'Europe aux XVIIe et XVIIIe siècles.

Très voisine de la passacaille, elle s'est souvent confondue avec elle. Il semblerait cependant que chacune ait conservé des particularités (PASSACAILLE), même si on trouve fréquemment les mêmes pièces portant, selon la copie ou l'édition, tantôt un titre et tantôt l'autre. Passée très tôt au répertoire du luth et de la guitare, puis au théâtre où Lully l'affectionne, parfois avec des parties chantées, elle y prend de grandes dimensions qui la font préconiser pour les finales d'opéra, jusqu'à Rameau et Gluck inclus. Dans ce cadre, la chaconne proprement dite sert généralement de refrain, et se prolonge par des couplets qui peuvent ne pas conserver ses caractéristiques.

Chadwick (George Whitefield)

Compositeur américain (Lowell, Massachusetts, 1854 – Boston 1931).

Après des études à Boston, Leipzig (1877) et Munich (1879), il fut successivement, à Boston, organiste et professeur au New England Conservatory, qu'il dirigea de 1897 à 1930. Membre de l'École de Boston, il eut notamment comme élèves Horatio Parker et Daniel Gregory Mason. Il écrivit à Leipzig l'ouverture Rip Van Winkle, et devait, par la suite, largement rester fidèle à l'esthétique postromantique de sa formation germanique. Attiré par la musique à programme ou de caractère descriptif, il sut allier l'émotion (ouverture Melpomène, 1887) au pittoresque (poème symphonique Aphrodite, 1912) et à la verve typiquement américaine (Symphonic Sketches). On lui doit aussi le drame Judith (1901) et l'opérette burlesque Tabasco (1894). Il utilisa parfois les chants de la communauté noire, et dans la ballade symphonique Tam o'Shanter, d'après Burns (1915), ne recula pas devant certains « modernismes ».

Chailley (Jacques)

Compositeur et musicologue français (Paris 1910 – Montpellier 1999).

Issu d'une famille de musiciens, successivement secrétaire général (1937), puis sous-directeur (1947) et enfin professeur d'ensemble vocal (1948) au Conservatoire national de Paris, professeur d'histoire de la musique à la Sorbonne et directeur de l'Institut de musicologie de l'université de Paris (1952), inspecteur général de la musique (1973), il a occupé des postes corporatifs importants (président du Comité national de la musique, 1962, de la Consociatio internationalis musicae sacrae, 1969, etc.) et sa carrière multiple a abordé presque tous les aspects de l'activité musicale. Chef de chœurs, il a été l'un des premiers animateurs des chorales de jeunesse (Alauda, 1929) ; chef d'orchestre, il a dirigé à la Comédie-Française en 1944 (débuts de Raimu) ; il est directeur de la Schola cantorum depuis 1962. Depuis son accession à la Sorbonne en 1952, son activité d'exécutant s'est progressivement effacée devant ses tâches d'enseignement et de recherche. Il a écrit d'importants traités, souvent novateurs (Traité historique d'analyse musicale, 1950 ; Traité d'harmonie au clavier, 1977), étudié la musique médiévale (Histoire musicale du Moyen Âge, 1950 ; l'École musicale de saint Martial de Limoges, thèse de doctorat d'État, 1952), l'histoire de la théorie musicale (l'Imbroglio des modes, 1960 ; la Musique grecque antique, 1979 ; la Musique et son langage, 1996), et renouvelé l'exégèse de nombreuses œuvres classiques et modernes, de Josquin Des Prés à Bartók et Messiaen (les Passions de Bach, 1963 ; la Flûte enchantée, 1968 ; Parsifal, 1979). Il a créé et développé une discipline nouvelle, la philologie musicale, à laquelle il a consacré de nombreux travaux (Éléments de philologie musicale, 1981). Transposant dans l'art visuel ses méthodes d'analyse musicale, il a également abordé l'exégèse d'œuvres plastiques et picturales (Jérôme Bosch et ses symboles, 1978).

   Compositeur, Jacques Chailley a écrit de la musique de chambre (Quatuor à cordes, 1939 ; Sonate pour alto et piano, 1942), de la musique symphonique (Symphonie, 1947), un opéra (Thyl de Flandre, 1953), un ballet avec Jean Cocteau, la Dame à la licorne (1952), des mélodies et de nombreux chœurs (le Cimetière marin, 1980). Il est considéré comme l'un des principaux représentants d'une modernité non agressive, qui se veut continuatrice et rejette aussi bien la répétition stérile du passé que sa négation destructrice.

   La carrière de Jacques Chailley et le catalogue analytique de son œuvre musicale (129 titres) et musicologique (359 numéros) sont relatés dans un livre publié en 1980 sous le titre De la musique à la musicologie. Il est membre de l'Académie royale de Belgique, de l'Académie des beaux-arts de San Fernando à Madrid, et a été plusieurs fois lauréat de l'Académie des beaux-arts de l'Institut de France.

Chailly (Luciano)

Compositeur italien (Ferrare 1920 – Milan 2002).

Il a étudié le violon dans sa ville natale avec A. Boscoli, puis la composition à Milan avec C. Righini et R. Rossi avant de se perfectionner, à Salzbourg, avec Paul Hindemith et, pour la direction d'orchestre, avec A. Votto. Très vite intéressé par l'audiovisuel, il s'est occupé des programmes musicaux à la radio et à la télévision, et a été directeur artistique à la Scala (1968-1971), conseiller artistique au théâtre Regio de Turin (1972), directeur artistique de l'Angelicum de Milan (1973-1975), puis des Arènes de Vérone (1975-76), et directeur de l'organisation artistique de la Scala (1977). Il enseigne, en outre, la composition au conservatoire de Milan. Il a écrit, à ses débuts, beaucoup d'œuvres instrumentales, mais a trouvé sa voie véritable à la scène, au théâtre. Ferrovia soprelevata (« Train surélevé »), écrit en collaboration avec Buzzati (1955), relève surtout du genre musique de scène, mais à partir de Una domanda di matrimonio (« Une demande en mariage »), d'après Tchekhov (1957), se succèdent de nombreux opéras, dont plusieurs « à succès » (Una domanda di matrimonio a connu plus de 200 représentations). Parmi eux, Il Canto del cigno (« le Chant du cygne »), d'après Tchekhov (1957), La Riva delle Sirti (« le Rivage des Syrtes »), d'après J. Gracq (1971), L'ldiota (« l'Idiot »), d'après Dostoïevski (1re représentation Rome, 1970), ou encore Sogno (ma forse no) [« Songe, mais peut-être, non »], d'après Pirandello (1975). On lui doit aussi Contrappunti a quattro dimensioni pour orchestre (1973), Kinder requiem (1977) et la Missa papae Pauli, dédiée à Paul VI (1964). Son fils Riccardo, chef d'orchestre (Milan 1953), a été nommé en 1982 chef permanent de l'Orchestre symphonique de la Radio de Berlin et, en 1986, a succédé à Bernard Haitink à la tête de l'orchestre du Concertgebouw d'Amsterdam.