Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
G

Greene (Maurice)

Organiste et compositeur anglais (Londres 1696 – id. 1755).

Choriste de la cathédrale Saint Paul, il se consacra, à partir de 1710, à l'orgue et à la composition. En 1718, il fut organiste à Saint Paul et, en 1727, succéda à Croft comme organiste et compositeur de la chapelle royale. Il fut très lié à Haendel et ce fut l'amitié de ce dernier pour son rival Bononcini qui l'en sépara. En 1750, à la suite d'un héritage, Greene décida de consacrer sa fortune à rassembler et éditer les meilleures œuvres d'église anglaises. Il ne put mener complètement son projet à terme, et ce fut son ami Boyce qui publia Cathedral Music. Greene fut également un des fondateurs de la Royal Society of Musicians. Son œuvre comporte des oratorios, des cantates, des catches, des anthems. Citons, parmi les plus notoires, Fourty Select Anthems (Londres, 1743), Spenser's Amoretti (1739) et A collection of Lessons for the harpsichord (1750).

Grégoire Ier (saint) le Grand

(Rome vers 540 – id. 604).

Pape de 590 à 604 après avoir été à Constantinople légat de son prédécesseur Pélage II, et à Rome secrétaire du Saint-Siège et abbé du monastère fondé par lui dans sa propre maison du mont Cœlius. Il était donc, lorsqu'il accéda au pontificat, familiarisé avec tous les aspects de la musique liturgique, y compris ses variantes orientales. On ne trouve pourtant trace de questions musicales dans aucun de ses actes pontificaux, qui sont presque tous conservés. La tradition n'en a pas moins fait de lui le créateur du « chant grégorien ». Les érudits n'ont cessé de discuter sur ce qu'a pu être, en réalité, le rôle en l'occurrence de saint Grégoire : on ne peut trancher le débat, mais il apparaît très vraisemblable que, si son influence a pu être déterminante dans la fixation du répertoire, il n'a jamais joué un rôle ni de technicien ni a fortiori de compositeur. Ce que l'on peut dire, c'est que l'unification des usages ecclésiastiques était l'une des préoccupations essentielles de son règne, et que l'unification du chant liturgique devait assez normalement y prendre place. Elle devait être incluse notamment dans la réforme disciplinaire générale qu'il chargea son délégué Augustin d'introduire en Grande-Bretagne, et c'est le chant « unifié » sur la base des usages romains qui, sous le couvert de son autorité, fut désigné plus tard comme « chant grégorien ». La tradition qui plaça le nom de saint Grégoire à l'origine du chant « grégorien » n'apparut que trois cents ans après sa mort chez le chroniqueur Jean Diacre (v. 873), puis au début du XIe siècle chez un sermonnaire aquitain sujet à caution, étant connu ailleurs comme mythomane, Adémar de Chabannes : l'expression « chant grégorien » appliquée à l'ensemble du répertoire est plus récente encore. Jean Diacre attribuait cependant à saint Grégoire la mise en ordre du graduel (centonibus compilavit) et la création à Rome d'une école de chant religieux, la Schola cantorum, prototype de toutes les maîtrises ultérieures ; Adémar plaça dans la bouche de Charlemagne la phrase restée célèbre : Revertimini vos ad fontem sancti Gregorii, quia manifeste corrupistis cantum (« retournez à la source de saint Grégoire, car il est évident que vous avez corrompu le chant »). Il mentionnait aussi un Livre de chant selon saint Grégoire qui aurait servi de base aux missions musicales des envoyés de l'Empereur, notamment à Metz et à Soissons. Il est probable cependant que le nom de saint Grégoire a été utilisé en l'affaire davantage comme caution de prestige que comme témoignage historique de paternité.

grégorien (chant)

Expression aujourd'hui courante pour désigner l'ensemble du répertoire monodique de l'Église latine médiévale.

On a vu à l'article Grégoire (saint) que cette appellation, qui ne date guère que du début du XXe siècle (Motu proprio de Pie X, 1903 ; on disait auparavant « plain-chant » ou « chant ecclésiastique »), est historiquement sujette à caution. Les « grégorianistes » ou spécialistes du « chant grégorien » se gardent bien, du reste, d'employer ce terme dans cette acception généralisée, et le restreignent à l'ordonnance de rite romain pouvant effectivement être datée avec vraisemblance de l'époque de ce pape, soit du VIIe siècle environ. Ils en excluent donc, d'une part, l'ensemble des répertoires de rite non romain (ambrosien à Milan, gallican en France, mozarabe en Espagne, etc.), d'autre part, celui des rites romains antérieurs ou parallèles, dont le principal est le chant dit « vieux-romain », qui se serait maintenu jusqu'au XIIIe siècle environ et aurait été ensuite éliminé sous l'influence des franciscains ; toutefois aucun des manuscrits considérés comme « vieux-romains » n'est antérieur au milieu du XIe siècle, ce qui étend considérablement la part de l'hypothèse. Il faut également distraire du domaine « grégorien » les différents remaniements du répertoire effectués au cours des siècles, par exemple le chant cistercien, abondant en amputations mélodiques, et le répertoire tardif des tropes, séquences ou offices mesurés qui, bien que partiellement officialisés, introduisent un style quelque peu différent. La composition des mélodies dites grégoriennes se ralentit notablement à partir du XIe siècle et cesse à peu près à la fin du XVe (le Kyrie et le Gloria de la Messe des Angles ou Anglais, dite par corruption Messe des Anges, sont parmi les pièces les plus tardives). Des essais de composition en plain-chant, influencés par les déformations de style survenues entre-temps, se rencontrent encore au XVIIe siècle, surtout en France (Henri Dumont, Lully le fils), puis s'éteignent pour renaître aux premiers jours de la résurrection solesmienne (Dom Pothier, Lambillotte). Elles demeurent marginales : lorsque apparaissent de nouveaux offices (Sacré-Cœur, Sainte-Jeanne-d'Arc, etc.), les liturgistes adaptent le plus souvent d'anciennes pièces sans en créer de nouvelles. C'est encore ce qu'ils font actuellement pour ménager tant bien que mal une possibilité de service du chant grégorien dans les nouveaux rituels postconciliaires, trop souvent conçus hâtivement sans que l'on ait prêté une attention suffisante à leurs incidences musicales.