Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
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Skalkotas (Nikos)

Compositeur et violoniste grec (Khalkis 1904 – Athènes 1949).

Après des études brillantes de violon au conservatoire d'Athènes sous la direction de Tony Schulze, il obtint une bourse qui lui permit d'aller en 1921 à Berlin et d'étudier le violon à la Hochschule für Musik avec Willy Hess. À partir de 1925, il se consacra à la composition. Ses principaux maîtres furent Philipp Jarnach (1925-1927) et Arnold Schönberg (1927-1931). Il retourna en Grèce en 1933 où il vécut toute sa vie durant en tant que violoniste dans l'orchestre d'Athènes et aussi dans deux autres orchestres. Il continua à composer jusqu'à sa mort dans un isolement accru par l'indifférence, voire l'hostilité, des milieux musicaux grecs.

   Skalkotas, malgré le temps relativement court consacré à la composition, laissa un nombre considérable d'œuvres. Parmi celles composées pour orchestre, il convient de distinguer trois concertos pour piano (1931, 1938, 1939), un concerto pour violon (1938), un concerto pour violon, alto, vents et contrebasses (1940), deux suites symphoniques (1935, 1944-1949), dont la seconde de proportions gigantesques (75 minutes), trente-six danses grecques (1936-1949), dix « sketches musicaux » pour orchestre à cordes (1940) et la symphonie en un mouvement intitulée le Retour d'Ulysse (1943).

   Sa musique de chambre compte, entre autres, une sonate pour violon seul (1925), la deuxième sonate pour violon et piano (1940), quatre sonatines pour violon et piano (1929, 1935), quinze petites variations (1927), quatre suites (1936, 1940, 1941), trente-deux pièces (1940) et quatre études (1941) pour piano, quatre quatuors à cordes (1928, 1929, 1935, 1940), un trio à cordes (1935), huit variations sur un thème populaire grec pour trio avec piano (1938), un duo pour violon et alto (1938) et un octuor pour quatuor à cordes, flûte, hautbois, clarinette et basson (1931). Enfin, sa musique vocale comprend des œuvres comme les seize mélodies pour contralto et piano (1941) et Métoú Maïoú tá máya (« les Sortilèges de mai ») pour orchestre, contralto et chœur (1944-1949).

   Le style de Skalkotas est imprégné de l'esthétique de Schönberg, mais il faut souligner qu'il porte toujours le cachet de la personnalité du compositeur grec. Ainsi, la série dodécaphonique de Schönberg se transforme souvent en une multitude de séries indépendantes servant de base à la structure de l'œuvre. Tel est le cas de la symphonie en un mouvement le Retour d'Ulysse où l'on trouve dix-huit séries superposées par quatre, créant une intensité poussée aux limites, et des blocs sonores superposés mais suffisamment transparents pour qu'ils soient perceptibles. Les formes classiques prennent souvent des proportions gigantesques et sont parfois mixtes. Ainsi, le quatrième mouvement de la deuxième suite symphonique est en forme sonate-variation, remarquable par la transparence de son écriture.

   En dehors de la technique dodécaphonique et sérielle, Skalkotas composa aussi dans un style atonal libre (par exemple, le duo pour violon et alto). Souvent une grande variété de styles et de techniques se retrouvent miniaturisés dans une même œuvre, comme les trente-deux pièces pour piano. Ici, l'on retrouve des formes et des styles baroques, classiques et romantiques à côté de rythmes fortement influencés par le jazz ou la musique populaire grecque, le tout dans une écriture libre, proche de la technique dodécaphonique mais indépendante.

   Les rythmes de Skalkotas sont souvent aussi très libres ou fluctuants. Ainsi, les 3/4 du menuet de la troisième suite pour piano deviennent souvent 2/4 et même 5/4. Quant au « thème et variations » de cette même suite, le rythme est totalement libre ; cela n'empêche pas, dans un espace très restreint, une progression d'une extraordinaire intensité, à l'instar de la variation beethovenienne.

Slezak (Leo)

Ténor tchèque (Krasnattora 1873 – Tegernsee 1946).

Il chanta tout jeune dans les chœurs de l'Opéra de Brnó. Puis il débuta dans ce même théâtre en 1895 (rôle de Lohengrin). Deux ans plus tard, il chantait à Berlin, et en 1901, à l'Opéra de Vienne, où il allait paraître régulièrement pendant un quart de siècle. Entre-temps, il alla perfectionner sa technique à Paris, travaillant avec Jean de Resské (1908-09). Dans les années suivantes, il triompha à Londres et à New York. À l'apogée de sa carrière, sa grande voix héroïque apparaissait admirablement disciplinée, et son tempérament artistique, adapté aux grands rôles de ténor dramatique aussi bien qu'aux mélodies qu'il chantait en récital.

   Au théâtre, il fut un des plus grands Otello du siècle. On l'admirait également dans Radamès de Aïda, dans Lohengrin et dans Raoul des Huguenots. Après s'être retiré de la scène, il parut dans de nombreux films où il aimait à jouer les emplois comiques.

Slonimski (Sergueï)

Compositeur soviétique (Leningrad 1932).

Fils de l'écrivain Mikhaïl Slonimski, neveu du compositeur-chef d'orchestre Nikolaï Slonimski (1894-1995), qui fut l'ami de Varèse et créa certaines de ses œuvres, il sortit en 1955 de la classe de composition d'O. Evlakhov, et, en 1956, de la classe de piano de V. Nilsen, au conservatoire de Leningrad. En 1958, il termine ses études supérieures de musicologie. Il enseigne les disciplines théoriques de la musique depuis 1959, la composition depuis 1967, et est le responsable musical de l'Opéra de Kirov et de la compagnie de ballet de Leningrad. Ses premières partitions rendent hommage au dernier Prokofiev et au Stravinski de la période russe : Symphonie (1960), Sonate pour piano (1962), Chants de liberté sur des textes populaires pour mezzo, baryton et grand orchestre (1961), retrouvant le faux archaïsme de Noces.

   Dans les années 1965-66, il parcourut la campagne des anciens États baltes, notant de très anciens chants d'origine païenne qui allaient lui servir de matériaux pour nombre de ses ouvrages à venir : l'opéra Virinéia (1967), le truculent Concerto buffo. Intégrant ces éléments de folklore archaïsant dans un langage sériel, il composa le ballet Icare (1971), où se mêlent chants de troubadours, musique quasi concrète et relents de foire, puis des pièces vocales comme Chants de troubadours (1975) pour soprano, ténor, quatre flûtes à bec et luth, ou encore Pesnokhorka (1976) pour contralto, flûte, hautbois, trompette, balalaïka, batterie, guitares électriques.