Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
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troubadour

Nom donné, entre le XIIe et le XIVe siècle, aux poètes-compositeurs écrivant et chantant en langue d'oc, par opposition aux trouvères, lesquels s'exprimaient en langue d'oïl. Leur répertoire était formé de chansons monodiques accompagnées sur des instruments. La plupart du temps, seule la ligne mélodique nous reste de leurs œuvres, avec le texte, sur des manuscrits nommés « chansonniers » dont la plupart furent établis après leur mort, pour garder une trace de cette musique orale. On y trouve tous les types de chansons, satiriques et politiques y compris, mais surtout des chansons d'amour. Elles sont écrites dans des formes populaires à refrain, obéissant à certains modèles comme le rondeau, qui commandent aussi bien la construction métrique (nombre de vers et de pieds, distribution des rimes) que la forme musicale. Les plus célèbres des troubadours furent Bernard de Ventadour, Jaufré Rudel, Bertrand de Born, Peire Vidal, Marcabru.

trouvère

Nom donné, aux XIIe et XIIIe siècles, aux chanteurs-musiciens-poètes, s'inspirant des troubadours mais s'exprimant en langue d'oïl, avec des variantes selon les dialectes, et issus de régions du nord de la France, de la Belgique, de la Bretagne, etc. Leurs œuvres, comme celles des troubadours, nous sont parvenus par les « chansonniers », manuscrits de compilation rédigés après coup, et adoptent des formes basées sur la répétition et le refrain. On cite le plus fréquemment, parmi les grands trouvères, Adam de la Halle (Jeu de Robin et Marion), Marie de France, Rutebeuf (Miracle de Théophile) et Chrétien de Troyes.

Troyanos (Tatiana)

Mezzo-soprano américaine (New York 1938 – id. 1993).

Elle étudie à la Juilliard School avec Hans Heinz et débute, de 1963 à 1965, dans la troupe du New York City Opera. De 1965 à 1975, elle chante à Hambourg, et débute en 1966 à Aix-en-Provence dans le rôle du Compositeur d'Ariane à Naxos. En 1969, elle crée les Diables de Loudun de Penderecki, et chante le Chevalier à la rose à Salzbourg. Comédienne hors pair, elle a triomphé dans Monteverdi autant que dans Strauss, dans Werther de Massenet et Albert Herring de Britten. Son incarnation de Carmen, enregistrée en 1976 avec Solti, est inoubliable, de même que celle de Didon, gravée en 1977 avec Raymond Leppard. De 1976 à 1990, elle chante plus de deux cents fois au Metropolitan. En 1992, elle crée The Voyage de Phil Glass avant de disparaître en pleine gloire.

tuba

Instrument à vent de la famille des cuivres, à pistons et de tessiture grave.

Le terme désigne aujourd'hui au moins trois représentants du groupe des saxhorns, inventés par le facteur belge Adolphe Sax au milieu du siècle dernier : le tuba à six pistons, en ut, dont l'étendue atteint quatre octaves, le bass-tuba ou contrebasse en ut ou si bémol, à quatre pistons, et le tuba ténor qui n'est autre que le saxhorn baryton. Tous ont une sonorité puissante, mais un peu sourde, et permettent toutes les nuances du pianissimo au fortissimo.

   Le « Wagner-tuba », spécialement construit pour les besoins de la Tétralogie en deux formats ­ ténor et basse ­, s'apparente plutôt au cor dont il a emprunté l'embouchure étroite.

Tubin (Eduard)

Compositeur et chef d'orchestre suédois d'origine estonienne (Kallaste, près de Tartu, 1905 – Stockholm 1982).

Il étudia à Tartu et fut de 1931 à 1944 chef d'orchestre du théâtre de cette ville. En 1938, il rencontra à Budapest Bartók et Kodály et prit des leçons auprès de ce dernier. Il se réfugia en Suède en 1944 et obtint en 1961 la nationalité du pays, mais pendant près de trente ans il dut gagner sa vie en préparant des partitions pour le Théâtre de Drottningholm, et il ne fut vraiment reconnu qu'après sa mort. Son opéra Barbara von Tisenhusen a été créé à Tallinn en 1969. On lui doit notamment de la musique de chambre, Requiem pour des soldats tombés pour alto, chœur d'homme, trompette, percussion et orgue, et onze symphonies, dont la dernière inachevée (les dix premières de 1934 à 1973).

Tucker (Reuben Ticker, dit Richard)

Ténor américain (Brooklyn 1913 – Kalamazoo 1975).

Initié à la musique par le cantor d'une synagogue new-yorkaise, il est encouragé à commencer sa carrière par son beau-frère, le ténor Jan Peerce. En 1945, il débute au Metropolitan de New York dans La Gioconda de Ponchielli. Dès 1947, il chante ce même opéra à Vérone aux côtés de la Callas. À partir de 1958, sa carrière est aussi importante en Europe qu'au Metropolitan. Parmi ses rôles fétiches, citons don Alvaro dans la Force du destin, Alfredo dans la Traviata, le Duc dans Rigoletto et Cavaradossi dans Tosca. Ténor verdien par excellence, il laisse plusieurs enregistrements, dont Aïda dirigé par Toscanini.

Tudor (David)

Compositeur américain (Philadelphie 1926 – Tomkins Cove, New York, 1996).

Il fait ses études à Philadelphie et New York. Organiste à Saint-Marc de Philadelphie et Swarthmore College, professeur à l'École de musique contemporaine de New York, il est l'une des personnalités les plus saillantes de l'entourage de John Cage, dont il est l'associé dès 1948. Membre du « Cage's project for magnetic tape » (1951), premier groupe américain organisé pour produire de la musique électronique, il a poursuivi depuis lors une brillante carrière de pianiste au service de ses contemporains Cage, Bussotti, Stockhausen et Boulez (dont il a créé la Deuxième Sonate aux États-Unis). Également habile dans l'électronique, il en a fait bénéficier son œuvre personnelle, généralement associée à un programme visuel (Bandonéon ! comporte un tel programme axé sur les sonorités du bandonéon argentin). Ses innovations ont inspiré beaucoup de compositeurs, parmi lesquels David Behrman, Toshi Ichiyanagi ou Gordon Mumma.

tuilage

Procédé primitif de polyphonie, volontaire ou non, consistant pour une voix ou un demi-chœur à entrer avant que le précédent n'ait terminé, de sorte que la fin de l'une des parties forme pendant quelque temps avec le début de l'autre une polyphonie rudimentaire à deux voix.

Tůma (František Ignác Antonín)

Organiste, violoniste et compositeur tchèque (Kostelec, près d'Orlicí, 1704 – Vienne 1774).

Son père, Václav, organiste à l'église locale, lui apprend la musique dès son plus jeune âge. Il rentre comme petit chanteur à l'école des jésuites de Prague. On pense qu'il fut l'élève de B. M. Černohorsk'y, car l'influence de ce dernier est manifeste dans son œuvre religieuse. Remarqué par le prince František Ferdinand Kinsk'y, il part avec lui à Vienne, où il peut travailler avec J. J. Fux. À partir de 1722, il occupe différentes places d'organiste, puis de Kapellmeister, dans diverses églises viennoises. En 1731, il est le maître de chapelle de son protecteur, suivant ce dernier entre Vienne et Prague. Il fait ainsi la connaissance de G. Tartini, soliste invité au palais du prince Kinsk'y à Prague. À la mort du prince en 1741, il devient Kapellmeister de l'impératrice Élisabeth-Christine jusqu'en 1750.

   Son œuvre profane s'inspire encore de l'école baroque vénitienne. L'influence de Vejvanovsk'y et de l'école de Biber et Schmelzer est sensible dans son écriture pour les cuivres. Ses symphonies regardent vers l'école de Mannheim. Son œuvre religieuse, beaucoup plus importante, dénote l'abandon progressif des règles polyphoniques strictes au profit d'une belle invention mélodique.