Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Pereyra (Vasco)

Peintre portugais (Évora v.  1535 Séville 1609).

Portugais du Sud, originaire d'Évora, Pereyra apparaît à Séville à partir de 1561. Il semble y avoir conquis une place estimable, puisqu'il collabore en 1598 — avec les peintres les plus réputés, dont Pacheco et Alonso Vazquez — à la décoration du catafalque pour les cérémonies de la cathédrale en mémoire de Philippe II. Il demeure à Séville jusqu'à sa mort.

   Artiste de transition, encore imprégné du maniérisme de Campaña et de Vargas, il signe en 1562 un Saint Sébastien (Sanlúcar de Barrameda, égl. de la O). Il apparaît cependant comme influencé par les Vénitiens, qu'il dut connaître au moins par des gravures (Annonciation de S. Juan, à Marchena, 1576, dont on a signalé que la composition reflète celle du tableau de Titien à S. Salvatore de Venise). Il introduit aussi une note plus rude et plus vigoureuse, un réalisme plus rustique que celui de Vargas, dans la meilleure de ses œuvres connues, le grand Saint Onuphre (Dresde, Gg), imposante figure de solitaire à genoux dans la campagne.

Pérez (les)
ou les Peris

Famille de peintres espagnols.

 
Antonio (documenté à Valence de 1404 à 1422). Il appartient à une dynastie de peintres valenciens qui remonte à la reconquête de la cité ; il est le premier dont l'œuvre soit identifiée. Sa personnalité a été définie grâce à un panneau du retable de la chapelle Saint-Grégoire et saint Bernard d'Alcira commandé en 1419 pour la cathédrale de Valence. Son style, caractéristique du mouvement international, conjugue l'idéalisme italien avec certains éléments expressionnistes nordiques. On lui attribue les peintures réunies autrefois sous le nom du Maître de Olleria, à savoir : le Retable de la Vierge de l'Espérance (Pego, église S. Maria), le Retable de la Vierge au lait (Valence, musée des Beaux-Arts) et le Retable d'Ollería (Prado, cath. de Valence).

 
Gonzalo (documenté à Valence entre 1404 et 1451, l'année de sa mort). Fils d'Antonio, il est le représentant le plus doué de la seconde phase de la peinture internationale à Valence. Les archives font état de 26 retables le concernant, entre 1404 et 1443. Il continue et amplifie la manière de Pedro Nicolau (†1408), dans l'atelier duquel il a dû se former et ses premières œuvres sont nourries des mêmes éléments italiens et flamands. Sa plus ancienne œuvre conservée, Saint Clément et sainte Marthe (1412, cath. de Valence), révèle un artiste élégant par le graphisme ondulant des draperies et le choix des tissus aux motifs orientaux, tout en gardant pour le personnage masculin un faciès expressionniste hérité de Marzal de Sax. En 1427, il exécute des Têtes de rois avec J. Mateu (4 à Barcelone, M.A.C.) pour la Casa de la Ciudad de Valence. Le Retable de sainte Barbe (id.) et les panneaux de Saint Michel (Édimbourg, N.G. of Scotland) et Saint Barthélemy (Worcester Art Museum) témoignent d'un style arrivé à maturité avec des formes plus amples, un modelé accusé et une gamme colorée brillante et variée. Ces qualités s'affirment dans le Retable de saint Martin, sainte Ursule et saint Antoine abbé (Valence, musée des Beaux-Arts) chef-d'œuvre du gothique valencien où s'équilibrent la vigueur formelle et l'élégance aristocratique proche de celle d'un Pisanello.

Pérez Villaamil (Jenaro)

(Genaro au XIXe s.)

, peintre espagnol (Le Ferrol 1807 – Madrid 1854). Pérez Villaamil est le créateur incontesté et le principal représentant du paysage romantique en Espagne. Mais la biographie de cet homme, assez fantasque et secret, encore confuse sur bien des points, reste à écrire. Originaire de Galice, fils d'un professeur de dessin topographique au collège militaire de Saint-Jacques-de-Compostelle, Jenaro fut d'abord élève de son père, qui s'installa par la suite à Madrid. Jeune officier de l'armée libérale, blessé et prisonnier des troupes françaises lors de leur expédition de 1823, c'est pendant son séjour à Cadix (1823-1830), qu'il prit goût à la peinture et à la décoration théâtrale. On le trouve en 1830 à Puerto Rico où il peint des vues de San Juan et décore le théâtre (décor détruit), puis à la Jamaïque. Revenu en Espagne, il subit une double et décisive empreinte : celle des littérateurs romantiques, épris du passé de l'Espagne, qu'il fréquente à Madrid (Zorrilla, son ami, lui dédiera en 1837 la Noche de invierno), et celle de l'aquarelliste anglais David Roberts, qu'il rencontre, en 1833, à la Feria de Séville. Il apprendra de lui la vision romantique de l'Andalousie, nouvelle pour les Espagnols, avec l'exagération dans la proportion des édifices et les contrastes de lumière, la multiplication des figurants minuscules et des détails pittoresques : Pérez Villaamil peint ou dessine, avec un vif succès, des paysages et des monuments, réels ou imaginaires. Mais en 1842 il s'expatrie de nouveau, pour des raisons mal connues, liées sans doute à l'éphémère dictature d'Espartero et à l'exil du ministre et poète Martínez de la Rosa, ami du peintre. Villaamil passe plusieurs mois en Belgique, visite probablement Londres et se fixe à Paris, où il est apprécié : Louis-Philippe lui achète plusieurs paysages (qui figureront à sa vente de 1853), Baudelaire parle de lui avec éloges dans son Salon de 1846. L'artiste, qui collabore aussi au Seminario Pintoresco, entreprend une grande publication — financée par un mécène espagnol, le marquis de Remisa, destinée à faire connaître les monuments gothiques espagnols (en fait surtout Burgos et Tolède) : España artística y monumental (1842-1844 ; une édition espagnole paraîtra après la mort de Villaamil, en 1865) — avec le concours de nombreux lithographes français qui interprètent ses dessins.

   Rentré à Madrid en 1844, Villaamil reste un grand voyageur : on le trouve en 1849 tour à tour à Valence et en Galice ; il semble avoir visité la Grèce, la Turquie et une partie du Moyen-Orient (Caravane à Tyr, Madrid, coll. Santamarco). Académicien, premier professeur de paysage à l'École des beaux-arts, il meurt prématurément, célèbre et pauvre. Il laisse une œuvre énorme : plusieurs milliers de peintures, aquarelles et dessins exécutés avec une virtuosité étonnante. Son trait, agile et précis, est parfaitement capable d'exactitude : les dessins conservés pour la España artística sont beaucoup moins fantaisistes que les planches, trop " embellies " par les lithographes français. L'artiste possède un sens extrême de la mise en scène, de l'effet grandiose ou pittoresque. Mais il y a chez lui des aspects moins connus, et qui semblent refléter l'influence de Turner : de grandes flaques de lumière, des dessins tachistes — partant d'une tache d'encre — singulièrement captivants et modernes (Gorges de Las Alpujarras, Madrid, coll. Santamarca). Les œuvres de Villaamil sont très dispersées entre des musées provinciaux (par exemple l'admirable Château de Gaucin à Grenade) et des coll. part. Le Prado (annexe du Casón), le Museo Romántico de Madrid, le musée de La Corogne (qui réunit un groupe précieux de vues de Galice) permettent une approche suffisante de cet artiste singulier. Son frère Juan (Le Ferrol ?-1863), peintre également, collabora avec lui à plusieurs entreprises (théâtre de Puerto Rico, Seminario Pintoresco, España artistíca).