Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Moskowitz (Robert)

Peintre américain (New York 1935).

Autodidacte, il se consacre définitivement à la peinture au début des années 60 et connaît sa première exposition en 1962 à la gal. Leo Castelli. Toutefois, Moskowitz préféra la quitter, se sentant mal à l'aise pour se mesurer à des artistes comme Johns, Rauschenberg ou Stella. Réfugié dans la solitude de son atelier, il entreprit de 1966 à 1970 une première série, dite " des Intérieurs vides ", dans laquelle l'artiste n'utilise que la couleur bleue pour la construction de ses compositions. Au début des années 70, il créa des œuvres abstraites fondées sur l'ambiguïté géométrique d'un angle de rue. Insatisfait, il retourna très vite à la figuration, prenant pour thèmes le train, les façades d'immeubles, les natures mortes, l'automobile (Cadillac/Chopsticks, 1976, coll. part.). La plus connue de ses œuvres : The Swimmer (1977, New York, Whitney Museum), est un tableau quasi monochrome d'un bleu profond au centre duquel surgissent la tête et le bras d'un nageur. Malgré la simplicité de la composition, l'image qui est donnée génère une sensation de malaise et de lutte perpétuelle. Depuis lors, son œuvre figuratif est entièrement consacré à la recherche de cette économie de moyens et ses natures mortes, ses intérieurs aux tonalités pastel offrent une image évanescente mais dispensant une grande intensité psychologique.

Moss (Marlow)

Peintre et sculpteur britannique (Richmond, Surrey, 1890  – Penzance, Cornouailles, 1958).

Marlow Moss a été l'une des premières disciples de Piet Mondrian. Après ses études à la Saint Johns Wood School of Art de Londres, elle se rend à Paris en 1927, où elle fréquente l'Académie moderne. Elle a sa première exposition en 1928 à Paris puis rencontre l'année suivante Piet Mondrian ; c'est à ce moment qu'elle se tourne vers le Néo-Plasticisme. Son style devient très vite original, notamment grâce à l'invention d'une figure appelée " ligne double ", qui est constituée de deux lignes noires parallèles qui coupent le reste de la composition à angle droit et qui a notamment été reprise par Mondrian lui-même dans certaines de ses compositions. En 1930, Marlow Moss commence sa participation au Salon des surindépendants puis fait partie du mouvement Abstraction-Création et de l'association Salon 1940. Dès 1935, attirée comme beaucoup d'artistes de sa génération par le relief, elle commence à réaliser des compositions dont les lignes sont constituées de ficelle collée sur le support, puis de véritable cordage. C'est à ce moment-là qu'elle réintroduit la courbe dans son travail et qu'elle crée quelques compositions en relief qui témoignent de l'influence de Jean Gorin. Elle restera dans le cercle de Mondrian jusqu'à son départ pour la Grande-Bretagne, en 1938. Elle-même quittera la France en 1940 pour rentrer dans son pays en laissant en Normandie son atelier, qui sera détruit pendant la guerre. En 1947, elle participera au Salon des réalités nouvelles puis collaborera au groupe Espace de Londres. Elle réalisera également quelques sculptures, notamment sur le thème de l'anneau de Möbius, qui témoigne de l'influence de Max Bill, quelques œuvres marquées par l'art de Jean Arp ainsi que des reliefs assez proches de la manière de Jean Gorin. Ses œuvres sont conservées dans de nombreuses collections particulières, à la Tate Gal. de Londres, dans des musées néerlandais, ainsi qu'au musée de Grenoble.

Mosset (Olivier)

Peintre suisse (Berne 1944).

Assistant de Daniel Spoerri et de Jean Tinguely au début des années 60, Olivier Mosset se joint en 1966 à Buren, Toroni, Parmentier, lorsque ceux-ci procédèrent à une rupture avec toute démarche artistique personnelle se référant à un style. Ces artistes exposent dès 1967 sous le sigle B.M.P.T. Il s'agit pour eux de gommer tout apport de la subjectivité pour s'en tenir au fait pictural, à la trace du geste. Dans cette recherche d'autonomie du tableau, Mosset réalise, jusqu'en 1971, une série de toiles identiques, des carrés blancs d'un mètre de côté, marqués au centre d'un cercle noir (Sans titre, 1970, Saint-Étienne, musée d'Art moderne). Il en expose ainsi soixante à Jouy-en-Josas (H. E. C.), en 1970. Leur succèdent à partir de 1974 des œuvres faites de bandes de tons alternées, dont l'écart se réduit de plus en plus jusqu'à l'uniformité (Sans titre, 1976).

   En 1978, il s'installe à New York, où, pendant dix ans, il explore les possibilités du monochrome (Sans titre, 1982, Lucerne, Kunstmuseum). Au gré des séries souvent liées à des facteurs aléatoires, il varie les formats, les couleurs et leurs qualités pour confronter le regard à la seule matérialité de la peinture, Bandwagon, 1988).

   Depuis la fin des années 80, il réintroduit dans ses toiles la bichromie à travers une figure géométrique élémentaire, Double Reverse, 1987, Spinner, 1992), une lettre, des bandes (Ed. Formica 1875 C, 1988), ou des cercles comme dans GI's Mission (1986, musée de Grenoble). Olivier Mosset est bien représenté dans les musées français et suisses et dans les collections particulières. Une exposition lui a été consacrée (Bruxelles, gal. Ledune ; Sion, musée cantonal des B. A.) en 1994.

Mostaert (Jan)

Peintre néerlandais (Haarlem v. 1475  – id.  1555/56).

Il fut longtemps connu sous le nom du Maître d'Oultremont (nom donné au triptyque de la Descente de croix conservé à Bruxelles, M. R. B. A.). Les premiers documents le citent à Haarlem en 1498 et, selon Van Mander, il aurait été l'élève de Jacob Jansz Van Haarlem, peintre dont on sait très peu de chose et qui serait peut-être le Maître du Diptyque de Brunswick. En 1507, il apparaît pour la première fois comme doyen de la gilde de Haarlem, fonction qu'il exerce encore en 1543 pour la dernière fois. De 1519 à 1529, il est peintre en titre de la régente Marguerite d'Autriche, dont la cour est à Malines, ce qui pose en réalité d'énormes problèmes : les archives harlémoises prouvent, en effet, qu'il ne résida jamais très longtemps hors de sa ville. Son œuvre — assez équilibré, comme son style même à la fois modéré et raffiné — se répartit entre les sujets religieux, quelques rares paysages et d'assez nombreux portraits ; parmi les meilleurs, on citera Joost Van Brockhorst (Paris, Petit Palais), les portraits d'homme de Berlin, de Copenhague et de Bruxelles ainsi que celui d'un Jeune Homme (1520-1525, Liverpool, Walker Art Gal.). Toutes ces effigies sont remarquables par leur sage distinction, la réserve d'un coloris toujours très subtil. On notera le gris soyeux des gants, qui est bien dans le goût de Gérard de Saint-Jean et de l'école harlémoise du paysage " à la Patinir ", avec de petites figures agitées et caractéristiques du peintre. Tout à fait original reste l'étrange Paysage des Indes occidentales (1542, Haarlem, musée Frans Hals), sans doute la première peinture évoquant le Nouveau Monde, d'une singulière fraîcheur poétique dans sa traduction naïve et inexacte ; l'influence de Patinir se retrouve encore dans le Paysage avec saint Christophe (Anvers, musée Mayer Van den Bergh), qui se situe tout à la fin de la carrière de Mostaert. Dans les tableaux religieux, la leçon, un peu adoucie, de Gérard de Saint-Jean se manifeste avec évidence : Tête de saint Jean-Baptiste (Rijksmuseum), œuvre surchargée de détails ; l'Adoration des mages (id.) ; une belle série de Christ de pitié (Londres, N. G. ; Vérone, Castel Vecchio ; musée de Burgos) ; l'Arbre de Jessé (Rijksmuseum), si naïf et charmant qu'il fut longtemps jugé digne de Gérard de Saint-Jean. L'œuvre clé à partir de laquelle s'est fait le regroupement des tableaux attribués à Mostaert est le triptyque dit " d'Oultremont ", avec une Descente de croix sur le panneau central, peint pour Albrecht Van Adrichem de Haarlem (Bruxelles, M. R. B. A.). Sont encore typiques du charme archaïsant de Mostaert la Sainte Famille de Rome (Palazzo di Venezia) et le triptyque du Jugement dernier (v. 1515) du musée de Bonn.

   L'œuvre de Jan Mostaert laisse ainsi une séduisante impression de luxe élégant et de poésie rêveuse malgré et jusque dans son apparente uniformité et son conservatisme latent, qui vient conférer à Gérard de Saint-Jean et aux artistes de l'école de Haarlem un heureux et efficace prolongement en plein XVIe s.