Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Bourgeois (Louise)

Peintre, graveur et sculpteur américaine d'origine française (Paris 1911 - New York 2010).

Louise Bourgeois a bénéficié d'une solide formation artistique. Après avoir suivi les cours de l'École du Louvre (1936-1937) et ceux de L'École des beaux-arts de Paris (1936-38), elle fréquente l'atelier Bissière et l'académie de la Grande Chaumière, puis l'atelier Fernand Léger en 1938, date de son départ pour les États-Unis. Elle doit sa réputation à ses sculptures et à ses installations, mais ses premiers travaux sont des dessins. D'origine souvent autobiographiques, ils sont principalement liés aux thèmes de l'enfance, de la maternité, au cycle de la vie. Il faut attendre son arrivée aux États-Unis pour qu'elle réalise sa première peinture (Réparation, 1938-40). Elle représente une petite fille au bouquet de fleurs dans une ambiance bleutée propice à l'étrangeté. Suivra une importante série de dessins sur le thème des Femmes-Maisons, combinant éléments corporels et architecturaux à partir d'une interprétation poétique des thèses de Bachelard consacrées à la maison natale et à la régression fœtale. Dans une veine plus abstraite, Louise Bourgeois réalise de très nombreux dessins géométriques sur la base de la répétition de traits courbes parallèles qui envahissent la surface du papier à la manière de all over savamment contrôlés. Certains dessins des années 1960 se composent de formes géométriques simplifiées, courbes et sensuelles, qui préparent souvent des sculptures. Enfin, une série de dessins-écritures rappellent au cours des années 1970 l'origine narrative de la plupart des œuvres de l'artiste. Ceux-ci associent mots et images ou sont parfois uniquement constitués de mots écrits à l'encre, à l'instar des déclarations incantatoires de Désir, vous me ferez 100 lignes, non 200 lignes (1977). Au cours des années 1980, elle revient à la pratique de la gravure qu'elle avait adoptée dans les années 1950. Son œuvre graphique a fait l'objet d'une importante exposition au M. O. M. A. de New York et au M. N. A. M. de Paris en 1995.

Bourgogne (école de)

À partir des vingt dernières années du XIVe s. se développe en Bourgogne une école de peinture qui présentera, pendant quarante ans, un rare caractère de continuité locale. Le duc Philippe le Hardi tient sa capitale à Dijon et fonde en 1383, à Champmol, une chartreuse destinée à être le Saint-Denis de sa dynastie. Princes fastueux, Philippe et son fils Jean sans Peur mènent de front l'embellissement de leurs châteaux (Argilly, Rouvres, Germolles) et la grandiose entreprise de la chartreuse, faisant venir de nombreux artistes, surtout originaires du Nord, comme le sculpteur Claus Sluter ou leurs peintres en titre pour Dijon : Beaumetz, Malouel et Bellechose. Ces trois artistes maintiennent la permanence d'une tradition iconographique et stylistique grâce à la continuité du chantier de Champmol. Aux œuvres qui leur sont attribuables se rattachent étroitement une Pietà (musée de Troyes) et une petite Vierge à l'Enfant (Louvre). À côté, un groupe de petits tableaux peints v. 1390-1410 (Pietà, Bruxelles, M. R. B. A. ; Petite Pietà ronde, Mise au tombeau, Louvre ; Couronnement de la Vierge, musées de Berlin) sont assez voisins de motifs et de style pour être souvent jugés aussi dijonnais.

   Cette peinture bourguignonne est, par vocation, " franco-flamande " ; française par le goût des premiers ducs, princes Valois qui restent attachés au ton aristocratique, au dessin raffiné de l'art parisien : c'est à Paris, où ils sont venus travailler, que sont recrutés Beaumetz et Malouel ; flamande par l'origine des peintres, qui tiennent de leur formation une facture souple et fluide, une expression plus directe ; à Dijon, même, ils restent en contact avec la production des Pays-Bas, grâce à la présence à Champmol de tableaux comme ceux de Broederlam ou le Polyptyque de la vie du Christ (Anvers, musée Mayer Van den Bergh, et Baltimore, W. A. G.), commandés par les ducs dans leurs états du Nord. Cet art mixte se ressent de l'influence siennoise, qui, d'Avignon, atteint directement la Bourgogne par la vallée du Rhône : le Polyptyque de la Passion de Simone Martini se trouve déjà sans doute à Champmol. Ainsi se rencontrent à Dijon, de première main, les composantes du style gothique international, dont la version bourguignonne s'imposera dans toute l'Europe du Nord et même jusqu'en Italie.

   Vers 1420, un brusque changement frappe la Bourgogne : Philippe le Bon abandonne Dijon pour s'installer en Flandre, au moment même où naît la grande peinture flamande ; le centre culturel de l'État bourguignon se déplace et la Bourgogne se provincialise. La peinture autochtone survit quelque temps dans un double conformisme. Le prestige de Champmol persiste et les derniers tableaux qui se font encore au milieu du siècle pour la chartreuse (Retable de saint Georges, musée de Dijon ; Calvaire au donateur chartreux, musée de Dijon) se réfèrent expressément à la tradition des commandes des premiers ducs. Mais le poids de la peinture flamande l'emporte ; les œuvres de Van Eyck, du Maître de Flémalle, de Van der Weyden se répandent en Bourgogne et les peintres locaux se mettent à la mode des Pays-Bas : la Présentation au Temple (v. 1435, musée de Dijon) et les fresques de Notre-Dame de Dijon, attribuées à Jean de Maisoncelles, sont des imitations du Maître de Flémalle. Satellite de l'art flamand, la Bourgogne ne crée plus guère, mais elle propage vers le midi la nouvelle esthétique, grâce à des peintres comme Barthélemy d'Eyck, les Dombet ou Changenet.

   Dans la seconde moitié du XVe s., la peinture bourguignonne retrouve un accent plus personnel : les qualités françaises de stylisation et de clarté dans la construction réapparaissent, dans un style ample et majestueux qui doit sûrement à la sculpture locale. Ses manifestations les plus originales empruntent la technique de la fresque, où se déploie un sens monumental étranger à l'esprit flamand (Résurrection de Lazare, attribuée à P. Spicre, collégiale de Beaune ; Christ et apôtres, chapelle du château de Châteauneuf, v. 1475), ou dans le portrait, qui révèle une vision ferme et simplifiée des visages (Hugues de Rabutin et Jeanne de Montaigu, musée de Dijon ; Claude de Toulongeon et Guillemette de Vergy, v. 1470, musée de Worcester, Mass.). C'est une peinture provinciale, de belle tenue, dont le caractère robuste et digne se maintiendra à travers le XVIe s. : Retable de l'Eucharistie (1515, musée d'Autun), Triptyque (1527, hôtel de ville de Châtillon-sur-Chalaronne).