Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
V

Vincent (François-André)

Peintre français (Paris 1746  – id. 1816).

Son père, François-Élie (1708-1790), miniaturiste originaire de Genève établi à Paris, lui donne ses premières leçons. François-André est ensuite l'élève de Vien. Il obtient le Grand Prix en 1768 avec un Germanicus apaisant la sédition (Paris, E. N. S. B. A.) et séjourne à l'Académie de France à Rome de 1771 à 1775 ; il exécute de nombreuses caricatures qui constituent, sur le milieu de l'Académie de France, d'irremplaçables documents (Montpellier, musée Atger ; Louvre ; Rouen, bibliothèque) ; il laisse aussi de chaleureux portraits peints (Houel, 1772, musée de Rouen ; Bergeret, 1774, musée de Besançon ; Monseigneur Ruffo, 1775, Naples, chartreuse de S. Martino ; Portrait de trois hommes, 1775, Louvre, peint à Marseille au retour de Rome). Revenu à Paris, il fait figure de chef d'école : son Président Molé et les factieux (Paris, Palais-Bourbon) obtient un vif succès au Salon de 1779. Il faut citer encore le Combat des Romains et des Sabins (1781, musée d'Angers), l'Enlèvement d'Orythie (1783, préfecture de Chambéry), son morceau de réception, et Zeuxis et les filles de Crotone (1789, Louvre). Mais David a déjà rallié tous les suffrages. Vincent tentera de rester au goût du jour : Guillaume Tell et Gessler (1795, musée de Toulouse), la Leçon de labourage (1798, musée de Bordeaux) ; mais, de santé fragile, il semble peindre de moins en moins (Bataille des Pyramides, esquisse en grisaille, Louvre ; la Mélancolie, 1801, Malmaison) et se consacrer surtout à l'enseignement. Il peint pourtant des portraits (la Famille Boyer-Fonfrède, 1801, Versailles) et griffonne toujours d'étonnantes caricatures (musée de Rouen). L'apport de Vincent réside dans son rôle d'initiateur dans le mouvement néo-classique, avant même David : il traite le thème de Bélisaire dès 1776 (musée de Montpellier). Il réside surtout dans son goût pour les sujets pris à l'histoire de France, où, en même temps que Durameau, Brenet et Ménageot, il trace la voie à un des courants principaux de la peinture du XIXe s. : 2 Épisodes de la vie de La Galaizière (1778, Nancy, Musée lorrain) ; Vie de Henri IV (1783-1787, Fontainebleau et Louvre). Sa manière de peintre évolue, d'un style généreux, fougueux, proche de Fragonard ou de Gros, à un art plus mesuré et plus froid qui évoque celui de Boilly, mais reste toujours attachée au réel, comme en témoigne, à tous les moments de sa carrière, son activité de dessinateur, qui fut féconde, heureuse et variée (beaux ensembles au musée Atger de Montpellier et au musée de Besançon).

Vinckboons (David)

Peintre flamand (Malines 1576  – Amsterdam v. 1629).

Fils du peintre Philip Vinckboons (Malines v. 1545-Amsterdam 1601), il émigra aux Pays-Bas en 1586. Paysagiste (Forêt, 1618, Ermitage), il s'est surtout inspiré de G. Van Coninxloo, comme en témoigne la Chasse de Diane de Bruxelles (M. R. B. A.). Sa peinture de genre rappelle l'art de Bruegel l'Ancien. Lorsqu'il traite des sujets religieux, il choisit de préférence les thèmes bruegéliens de la Montée au Calvaire (Munich, Alte Pin.) ou de la Prédication de saint Jean-Baptiste (id.). D'après des gravures de J. Matham, on est sûr qu'il traita aussi des sujets mythologiques, mais un seul tableau de cette manière est connu : l'Enlèvement de Déjanire par le centaure Nessus (1612, Vienne, K. M.). Il semble bien que A. Brouwer se soit fortement inspiré de l'œuvre de cet artiste.

Vingt (les)

Ce Salon annuel bruxellois fut fondé en 1884 (charte officielle le 4 janv.) par Octave Maus, qui en assura entièrement le secrétariat ; le journal l'Art moderne (1881-1914), dont Maus partageait la direction avec Edmond Picard, fut l'organe de défense et de diffusion des Vingt, puis de la Libre Esthétique. Le groupe des Vingt, formé à la suite d'une scission de celui de l'Essor, réunit les peintres belges que l'Impressionnisme commençait de séduire : Ensor, Vogels, Van Rysselberghe, Khnopff, Finch, parmi les principaux, ainsi que le Grec Pantazis, ami de Vogels, et l'Espagnol Regoyos. Au nombre des premiers invités (vingt en principe) figuraient Leibl, Sargent, Whistler, Manet, les Hollandais J. Israels, Mauve et Maris, les Belges Stobbaerts, Rops et Artan, le Français Rodin, qui devint membre du groupe en 1889. Un programme complémentaire de conférences et de concerts faisait du Salon des Vingt une manifestation culturelle importante. Les artistes les plus timorés démissionnèrent en 1885 et 1886 (Lambeaux, Verhaert, Vanaise, Delvin, Verstraete, Simons), et les expositions prirent dès lors une allure plus novatrice. En 1886, quand Ensor présente sa Mangeuse d'huîtres, Monet, Renoir, Redon, Monticelli et Breitner sont invités. Les deux Salons suivants marquent une nette orientation vers le Néo-Impressionnisme, dont Finch et Van Rysselberghe, très lié avec Signac, se font les promoteurs en Belgique. La présentation en 1887 du chef-d'œuvre de Seurat, Un dimanche à la Grande-Jatte (1884-1886, Chicago, The Art Institute), suscite l'éloge autant que le scandale, et Maus intitule son introduction au Salon de 1888 la Recherche de la lumière dans la peinture. Le Symbolisme littéraire et pictural prit droit de cité peu après : Gauguin exposa 12 tableaux en 1889, et Theodor de Wyzewa disserta sur " Les origines de la littérature décadente (Verlaine, Laforgue, Mallarmé) ". Van Gogh, invité (ainsi que Cézanne) en 1890, envoya plusieurs tableaux, qui entraînèrent la démission d'Henri De Groux ; l'année suivante, 8 tableaux et 7 dessins furent exposés en hommage au peintre disparu. En 1892, la rétrospective Seurat comprenait 17 toiles, des esquisses et des dessins. Dissous en 1893, après dix ans d'activité, le Salon des Vingt avait eu le rare mérite, en dépit de l'opposition de certains de ses membres eux-mêmes, de s'ouvrir de plus en plus largement aux courants nouveaux et d'offrir aux artistes les plus audacieux de l'époque une occasion de se manifester. La présence de F. M. Brown au dernier Salon présageait d'une tendance plus affirmée vers le Symbolisme, qui s'épanouit avec les débuts de la Libre Esthétique.