Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Hemessen (Jan Sanders Van)

Peintre flamand (Hemiksen v.  1500  – Haarlem v.  1565).

Élève de Hendrik Van Cleve à Anvers en 1519, il devint franc maître en 1524. ll se fixa probablement à Haarlem v. 1551. Il n'est pas exclu qu'il ait séjourné en Italie v. 1530. Certains historiens d'art l'identifient avec le Monogrammiste de Brunswick. Les œuvres signées et datées de Van Hemessen s'échelonnent entre 1531 et 1557. Avec Aertsen, Beuckelaer et Van Reymerswaele, il appartient à ce groupe de peintres anversois qui s'inspirent de la réalité quotidienne. Esprit positif et peintre de genre réaliste, il actualise toujours ses sujets, tandis que, par un sens populaire, il sécularise complètement les thèmes religieux. Ses œuvres présentent un caractère monumental, des volumes accusés, des raccourcis audacieux, un modelé vigoureux, des mouvements véhéments et désordonnés, des détails grotesques, des couleurs intenses et contrastées, et suscitent à tout point de vue une impression d'énergie libérée. Par sa manière directe et par la plasticité de son langage, il est considéré comme l'un des principaux précurseurs de Pieter Bruegel. Son tableau le plus ancien, un Saint Jérôme (Lisbonne, M. A. A.), date de 1531. Déjà le peintre s'y fait remarquer par l'audace de la figuration, par la recherche du raccourci et par son style dramatique et monumental. Ce caractère révolutionnaire se révèle moins dans l'Adoration des mages des collections royales de Grande-Bretagne (1534), tableau assez semblable à ceux de ses contemporains anversois. La personnalité du peintre s'affirme beaucoup mieux dans l'étonnante Vanité du musée de Lille, où l'on voit un ange pourvu d'ailes de papillon montrer un crâne reflété dans un miroir, et dans l'Enfant prodigue (1536) du M. R. B. A. de Bruxelles, où la parabole évangélique est transposée en une scène populaire et anecdotique. Dans un bordel, le fils prodigue gaspille son héritage au milieu de filles de joie et de mauvais garçons. Le peintre introduit le spectateur d'une façon directe et vivante. Il représente les personnages à mi-corps, très grands au premier plan du tableau. Il renie l'ordonnance classique pour une composition naturelle, voire désordonnée, où tout est fonction de la réalité : la vivacité du récit, la vérité des détails et la matérialité des objets et des personnages. L'exécution minutieuse et traditionnelle y met assez paradoxalement en valeur la conception monumentale de l'ensemble. Si l'Allégorie de la musique et de la jeunesse (Mauritshuis, La Haye) semble plus inféodée par son atmosphère aux exemples italiens, les mêmes tendances réalistes nouvelles se retrouvent dans la Vocation de saint Matthieu (1536, Munich, Alte Pin.), où Hemessen représente l'officine d'un percepteur d'impôts. Aucun élément nouveau ne s'introduit dans la Suzanne et les vieillards (1540, passée en vente à Paris en 1925), dans la Sainte Famille de Munich (1541, Alte Pin.), dans le Saint Jérôme du musée de Prague (1541), dans la Suzanne et les vieillards d'une coll. part. de Barcelone ni dans le Saint Jérôme de l'Ermitage (1543). Mais un changement se présente dans les œuvres de 1544, surtout dans l'Ecce homo du K. M. de Düsseldorf et dans la Vierge et l'Enfant de Stockholm (Nm). L'artiste y parvient à un rendu plus convainquant de l'espace, tant dans la disposition des personnages que dans l'élaboration des plans du paysage. Dans Isaac bénissant Jacob (1551, Suède, Oesterby), Hemessen, à la façon des maniéristes italiens, agrandit les personnages, qui, par des effets de lumière et par des raccourcis, donnent l'impression de bondir hors du tableau. La même volonté d'insister outre mesure sur les raccourcis qui projettent les personnages trop agités au tout premier plan du tableau se retrouve dans le Jeune Tobie rendant la vue à son père (1555, Louvre). La composition chaotique et l'exécution lourde du grand tableau qu'est le Christ chassant les marchands du Temple (1556, musée de Nancy) marquent le point culminant du style de Hemessen. Son dernier tableau (1557, Londres, coll. part.) représente de nouveau Saint Jérôme. À ces œuvres signées et datées s'ajoutent quelques tableaux portant une signature, mais pas de date ; un des plus importants attribués à Hemessen est la Joyeuse Compagnie du musée de Karlsruhe. Il se rapproche de l'Enfant prodigue de Bruxelles (M. R. B. A.) aussi bien par la représentation moralisante d'un homme aux trois âges de la vie devant la tentation du plaisir que par l'esprit narratif et l'exécution soignée.

 
Sa fille Catharina (Anvers 1528 – id. apr. 1587) fut son élève. Après s'être attachée à la cour de Marie de Hongrie, elle épousa, en 1554, un musicien de la reine, Chrétien de Morien.

   Il aurait été difficile, sinon impossible, de retrouver les œuvres, peu nombreuses, de Catharina, si elle ne les avait pas soigneusement signées et datées. À la signature du Portrait d'homme (1552, Londres, N. G.), elle a ajouté " fille de Jan Van Hemessen ". En comparant la Jeune Fille au clavicorde du W. R. M. de Cologne et son Autoportrait du musée de Bâle, tous les deux de 1548, on est frappé de la ressemblance qui existe entre ces deux effigies, traitées d'une manière stéréotypée et conventionnelle. Les mêmes naïveté et archaïsme se retrouvent dans les rares compositions religieuses de cette artiste charmante, mais d'un talent limité.

Hennequin (Philippe-Auguste)

Peintre français (Lyon 1763  – Leuze, près de Tournai, 1833).

Il fut élève de Nonnotte, Taraval, Gois, Brenet, avant d'entrer chez David. La protection d'un Anglais lui permit d'aller à Rome (1786 ?), mais, compromis par les troubles révolutionnaires de 1793, il regagna Paris, puis Lyon. L'académisme de sa peinture mythologique laisse place à une inspiration spontanée, traduite en un style nerveux et volontairement desséché, dans ses œuvres historiques à intention parfois politique : le Triomphe du peuple français le 10 août 1792 (Salon de 1799 ; fragments aux musées de Rouen, d'Angers et du Mans). Son œuvre majeure reste, au Louvre, les Remords d'Oreste (Salon de 1800), toile d'esprit visionnaire non sans rapport avec l'art d'un Füssli. Les commandes qu'il exécuta sous l'Empire le rendirent célèbre (Salon de 1806) ; ce sont de vastes perspectives d'histoire napoléonienne : Distribution de la Légion d'honneur au camp de Boulogne, Bataille des Pyramides (Versailles). Il réalisa aussi quelques portraits : Portrait d'homme (Bruxelles, M. R. B. A.), et fit également œuvre d'aquafortiste et de lithographe. L'action politique, qui le tourmenta toujours, l'amena, au retour de la monarchie, à s'exiler en Belgique. Il y fut directeur de l'Académie de dessin de Tournai, jusqu'à sa mort.