Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
P

Peeters (Clara)

Peintre flamand (Anvers 1594  – id. apr. 1657).

On connaît de cette artiste étonnamment précoce une cinquantaine de natures mortes, 36 signées dont 9 sont datées et s'échelonnent de 1608 à 1654. Les œuvres de Clara Peeters, aux fonds toujours sombres, rappellent celles d'Osias Beert par leur naïveté mais trahissent le souci nouveau de lier les formes les unes aux autres. Ainsi, malgré la netteté incisive avec laquelle l'artiste sépare les divers éléments d'un tableau, l'introduction de brindilles, de pétales tombés, de coquillages ou de pièces de monnaie équilibre la composition et lui donne son unité. Enfin, lorsqu'elle peint des fleurs (Fleurs et friandises, 1611, Prado), des coupes d'orfèvrerie (Natures mortes des musées d'Oxford, de Karlsruhe, du Prado), des coquillages (Gibier et coquillages, 1611, Prado) ou des victuailles (Poissons et artichaut, 1611, id.), Clara Peeters fait preuve d'une réelle habileté dans la représentation de détails minutieusement observés et donne à ses œuvres le charme poétique de la vérité par des qualités éminentes de structure picturale. L'artiste était, ce qui est inhabituel, autodidacte.

Peeters (Henk)

Artiste néerlandais (La Haye 1925).

Après des études à l'Académie royale des beaux-arts de La Haye, Peeters réalise des œuvres liées à l'Abstraction géométrique et effectue un séjour à Paris (1947-1949). Au milieu des années 50, il réalise des œuvres dans une matière épaisse, accumulée, striée (56-25). Sa production la plus connue se situe à partir de 1958, période durant laquelle, membre du Groupe Informel néerlandais, puis du Groupe Nul, il réalise des tableaux chargés de matière, avec des interventions fortes sur le matériau, brûlures, trous (59-03, Amsterdam, Stedelijk Museum). Au début des années 60, cet intérêt pour l'expérimentation de matériaux se concrétise dans l'utilisation du coton formant sur la toile de grands aplats de couleurs blanches duveteuses (Watten-strocken, 1962, Otterlo, Rijkmuseum Kröller-Müller). Peeters a participé à toutes les expositions importantes liées au Groupe Nul (Amsterdam, Stedelijk Museum, 1960 ; Utrecht, Centraal Museum, 1989) et a fait l'objet d'expositions particulières à Amsterdam, Collection d'art (1975-76 ; 1984).

Peeters (Jozef)

Peintre belge (Anvers 1895  – id. 1960).

Jozef Peeters est l'un des premiers peintres abstraits flamands avec Victor Servranckx. Après ses études à l'Académie des beaux-arts d'Anvers, il subit l'influence de la théosophie (Autoportrait, 1914, coll. part., Anvers). Il entre en contact avec Marinetti et exécute des tableaux d'inspiration futuriste en 1919. Ses premières œuvres abstraites, où se remarque l'influence de Mondrian, de Van Doesburg et de Kandinsky, datent de 1920. Avec le Cercle d'art moderne, auquel il a adhéré en 1918, il organise deux congrès internationaux, en 1920 et 1922, à Anvers. En 1921, sa première exposition personnelle est présentée dans cette ville. Ses œuvres (Composition 21, Bruxelles, musées royaux des Beaux-Arts) sont fondées sur un jeu de formes géométriques, cercle, carré, triangle, aplats colorés, mais aussi une recherche de clair-obscur. C'est ainsi qu'il se consacre à la linogravure, dont il a été l'un des maîtres au sein du Constructivisme : ses compositions, qui jouent sur des contrastes de noir et de blanc très marqués et des formes anguleuses, sont publiées en album ou diffusées dans les revues d'avant-garde de l'époque, telles que Der Sturm, dont il exécute la couverture en 1924, ou encore Het Overzicht. Dès ce moment, il a déjà l'idée de créer un art qui soit davantage tourné vers la société : il réalise des affiches, des aménagements architecturaux, des éléments de mobilier et notamment la décoration de son appartement. En 1921, il effectue un voyage à Paris où il rencontre Gleizes, Mondrian, Vantongerloo, Archipenko et Patrick-Henry Bruce. Il commence sa collaboration à la revue flamande Het Overzicht (" le Panorama "), dont il sera de 1922 à 1925 le responsable aux côtés de Michel Seuphor, avec qui il se rendit à Berlin pour rencontrer les principaux acteurs de l'avant-garde internationale. En 1925-26, il fonde la revue De Driehoek (" le Triangle ") avec l'écrivain Edgard Du Perron. En 1927, pour des raisons familiales, il renonce à la peinture, qu'il pratiquera de nouveau à partir de 1956. Peeters est représenté dans les musées belges.

peintre-graveur

Le terme de " peintre-graveur " semble avoir été employé pour la première fois par Adam Bartsch, garde de la Bibliothèque impériale et royale de Vienne, pour le titre de son ouvrage en 21 volumes, publié en français de 1803 à 1821. Avant Bartsch, on disait (Basan, Mariette) " peintre et graveur ", et l'on parlait de " gravure de peintre ".

   Si ce terme est relativement récent, l'activité remonte au début de l'histoire de la gravure. Le peintre-graveur est un artiste gravant d'après ses propres compositions, c'est-à-dire un graveur original, différent du graveur de métier, qui ne fait que reproduire le plus fidèlement possible l'œuvre d'un autre. De là naît une différence de qualité : le peintre-graveur s'exprime avec plus de liberté, l'inspiration suppléant éventuellement aux lacunes de sa technique, tandis que le graveur de reproduction reste à la fois maître et prisonnier de cette technique.

   Jusqu'au XIXe s., les deux manières ont coexisté. Les graveurs de métier pratiquaient plutôt le burin, alors que les peintres-graveurs, dans leur grande majorité, se vouaient à l'eau-forte, plus aisée à utiliser et plus " coloriste " dans ses effets. C'est au siècle dernier que la rupture se produit. Les procédés photomécaniques vont peu à peu remplacer la gravure de reproduction. Les graveurs de métier, après avoir essayé de rivaliser avec eux par des excès de virtuosité, sont condamnés à disparaître. De plus, la lithographie offre alors aux peintres une autre technique facile, s'ajoutant à l'eau-forte, qui connaît une grande vogue dans les milieux artistique et littéraire (Baudelaire, Gautier, Burty).

   Alors s'organisent en France, en Angleterre et en Belgique des sociétés de graveurs originaux. La plus importante par l'ampleur de ses réalisations est la Société des aquafortistes, fondée par Cadart en 1862, et dont les publications d'estampes furent tirées chez Delâtre. En Angleterre, Seymour-Haden, beau-frère de Whistler, fonde et dirige la Society of Painter-Etchers, qui expose à partir de 1881. En 1889 se forme le groupe des Peintres-graveurs français, qui devient une Société des peintres-graveurs français en 1891. En 1897 est fondée la Société des peintres lithographes ; en 1904, la Société de la gravure originale en couleurs ; en 1908, la Société de la gravure originale en noir. Après la Première Guerre mondiale, deux autres groupes se constituent, la Société de la gravure sur bois originale (1920) et les Peintres-graveurs indépendants (1923). On peut dire qu'au XXe s. pratiquement tous les peintres importants se sont, à un moment de leur carrière, consacrés à l'estampe, soit d'après les techniques traditionnelles, soit d'après de nouvelles formules, telle la sérigraphie.