Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Perréal (Jean)

Peintre français (?  – 1530).

Peintre en titre des rois Charles VIII, Louis XII et François Ier, au service de la Ville de Lyon, de la reine Anne de Bretagne et de l'archiduchesse Marguerite d'Autriche, renommé de son temps et redevenu célèbre au XIXe s. à la faveur du nombre exceptionnel de documents conservés à son sujet, Jean Perréal, dit Jean de Paris, restait sans ouvrages connus et a été longtemps crédité par hypothèse des principaux travaux anonymes de son époque, comme ceux du Maître de Moulins. En 1963, Charles Sterling lui a rendu une peinture certaine (miniature de la Complainte de nature à l'alchimiste errant, 1516, Paris, musée Marmottan), à partir de laquelle son œuvre a pu être reconstitué. Les activités de l'artiste étaient multiples : on le sait peintre, enlumineur, décorateur, dessinateur de patrons de sculpture (tombeau des ducs de Bretagne à Nantes, sculpté par Michel Colombe) et d'orfèvrerie, architecte (projets pour l'église de Brou), ingénieur, poète et humaniste ; il fut en contact avec l'Italie, où il séjourna en 1499 et en 1509, et connut Léonard de Vinci. Ses œuvres, essentiellement des portraits, révèlent un talent plus modeste que ne laissait supposer sa réputation : elles correspondent en gros au groupe de peintures (Charles VIII et Anne de Bretagne, Paris, B. N.), d'enluminures (l'Écrivain Pierre Sala, British Museum ; Jeune Homme inconnu, Paris, B. N.) et de dessins (Bourdillon et Ligny, Chantilly, musée Condé), datant des environs de 1495-1500, autrefois réunis sous le nom de " Maîtres de Charles VIII " ; deux portraits d'un homme et d'une femme en diptyque sont entrés récemment au Louvre. D'une écriture linéaire et libre, plus soucieux de la structure profonde des visages que de leur modelé extérieur, d'un réalisme direct, ces portraits, même les plus tardifs (Monsieur de Bellefourrière, 1521, Metropolitan Museum ; Dame anglaise, v. 1515-1520, Londres, N. P. G.), sont finalement plus proches de la tradition gothique que de l'esprit de la Renaissance. Si Perréal n'est pas, comme on l'a cru, l'introducteur de la Renaissance en France, mais un artiste de transition, il est possible que ses petits portraits vivants, sur fond de couleur, soient à l'origine de la lignée de portraits qu'illustrera, au milieu du XVIe s., Corneille de Lyon.

Perrier (François)

Peintre français (Salins ?1590  – Paris 1650).

Après un premier apprentissage à Lyon, il part, encore jeune, pour l'Italie et reste quatre ans à Rome. Il est employé par Lanfranco, dont l'exemple devait le marquer durablement ; il collabore probablement avec lui à la coupole de S. Andrea della Valle (1625-1627) et travaille à Tivoli pour le cardinal d'Este. De retour en France, il s'arrête à Lyon (1629-30) et y décore avec Horace Le Blanc le cloître des Chartreux de 10 fresques sur la vie de saint Bruno ; il peint une Cène pour le réfectoire et 3 tableaux pour la chapelle. Il se fixe alors à Paris et travaille avec Simon Vouet au décor de la chapelle de Chilly (1631 ; auj. disparu). Il repart ensuite pour Rome et y reste dix ans (1635-1645). De ce séjour datent 2 recueils de gravures d'après l'antique (1638 et 1645). Perrier travaille aux plafonds du palais Peretti (auj. Almagià), en même temps que Grimaldi et G. B. Ruggieri. Ses décors (l'Aurore, Junon et Éole, Naissance de Vénus, Vénus dans la forge de Vulcain) témoignent, par la vigueur du modelé et la franchise du clair-obscur, davantage de l'influence de Lanfranco que de celle de Pierre de Cortone ; le rôle de ce dernier sur son art est pourtant notable et l'oriente vers une peinture plus souriante et fleurie. De retour à Paris en 1645, Perrier donne son chef-d'œuvre avec la voûte de la galerie de l'hôtel La Vrillière, actuelle Banque de France (Apollon et les Quatre Éléments, Quatre Parties du Monde, Diane et les nymphes). Le plafond, détruit, a été repeint au XIXe s. par les frères Balze. Perrier décora également, en même temps que Le Sueur, Romanelli et Berthollet Flémalle, le cabinet de l'Amour de l'hôtel Lambert (Énée combattant les harpies, Louvre). Il travailla aussi pour les religieuses de la Visitation, pour l'hôpital des Incurables, le Palais de Justice, les châteaux du Raincy et de Fresnes. Il fut en 1648 parmi les fondateurs de l'Académie royale de peinture.

   Perrier apparaît comme un artiste typiquement baroque, qui introduit en France le grand art décoratif romain, avec un goût pour des effets plus dramatiques que ceux, toujours plus élégants et détendus, recherchés par Vouet. L'influence de cette " grande manière " devait être capitale sur des artistes comme Dorigny et surtout sur Le Brun, qui fut tout jeune (v. 1632-1634) l'élève de Perrier et en garda une empreinte profonde. Des tableaux de l'artiste se trouvent au Louvre (Orphée et Pluton, Polyphème, Acis et Galatée), à Berlin (Cicéron atteint par ses meurtriers), à Épinal (Vénus et Neptune), à Lyon (David remerciant Dieu après la mort de Goliath), à Reims (Olinde et Sophronie), à Rennes (Séparation de saint Pierre et de saint Paul), dans la coll. Chigi de Castel Fusano (Lapidation de saint Étienne) et à Dijon, au musée Magnin (Serpent d'airain) et au musée des Beaux-Arts (Sacrifice d'Iphigénie, la Peste d'Athènes).

Perrodin (François)

Peintre français (Saint-Claude, Guadeloupe, 1956).

L'œuvre de Perrodin doit sa rapide maturité à ses principes rigoureux. Dans le champ d'abord limité au seul monochrome gris, il travaille par séries numérotées, dont les caractères et les modalités d'exécution sont définis dès le départ. Par ces variations sur quelques paramètres essentiels de la peinture, il analyse l'ensemble du système perceptif enclenché par le tableau\– objet, traquant les phénomènes et les rapports du cadre, de la vitre, du fond, des reflets, de l'accrochage, etc. À cette période correspondent 11.37, en trois éléments : vinyle sur Isorel et cadre de bois, verre (1984, Paris, M. N. A. M.), et 12.41, vinyle sur bois, verre (1987, Paris, M. N. A. M.). En 1990, il recourt aux couleurs primaires pour des séries de monochromes en croix, en creux ou en triptyques mais dans la même logique d'étude de l'ombre et de la lumière, de ses jeux sur le tableau, le mur, le regard. L'élaboration théorique tâche ici de rejoindre l'évidence de la vision, et Perrodin apparaît comme un fils des minimalistes par sa mise en scène littérale de l'acte de percevoir. Il en rajeunit cependant le contenu par son dénombrement des écarts de présentation. Perrodin a exposé au M. A. M. de la Ville de Paris, 1986 ; au Nouveau Musée, Villeurbanne, 1987.