Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Fraile (Alfonso)

Peintre espagnol (Marchena, Séville, 1930-Madrid 1988).

Il étudie à l'école des Beaux-Arts de San Fernando de Madrid et présente sa première exposition personnelle à Madrid (Sala Abril, 1957). Jusqu'à la fin des années 60, sa peinture se situe dans le courant de l'école de Paris, développant des aspects du Tachisme tout en portant une réflexion sur la composition du tableau.

   Préoccupé par la figure humaine après 1975, son travail connaît un changement radical. Il entreprend une déconstruction habile des figures alliant humour, ironie et fantastique : Grand Triptyque, 1977 (composé de 143 personnages). Fraile nous livre un univers peuplé de signes, de formes biomorphiques (Série 16 X 1, 1984-85, Madrid, M. E. A. C.) et anthropomorphiques dont la qualité graphique évoque certaines des caractéristiques des œuvres de Miró ou de Kandinsky.

   Le M. E. A. C. de Madrid réalise en 1985 une rétrospective de son œuvre. Celle-ci est représentée dans les collections des musées d'Art moderne de Bilbao, de Madrid (M. E. A. C.), d'Art contemporain de Séville et de Tolède.

Francés (Nicolas)

Peintre espagnol (actif à León entre 1434 et 1468).

" Maestre Nicolas Francés " est la figure principale, et la mieux connue, de la peinture castillo-léonaise dans la première moitié du XVe s., époque de transition où le " style international " du siècle précédent survit encore, avec sa grâce parfois maniérée, mais s'adapte aux ressources neuves de la technique à l'huile et au dessin plus musclé, qu'introduit dans la Péninsule le voyage de Jan Van Eyck. Les origines et la jeunesse du peintre restent obscures : sans doute pèlerin de Compostelle, il venait peut-être de Bourgogne. Mais, à partir de 1434, on le trouve à León, et d'assez nombreux documents nous renseignent sur son domicile, proche de la cathédrale, sur ses deux mariages avec des Léonaises, sur ses activités multiples au service du chapitre ou de l'aristocratie : peintre, dessinateur de vitraux, miniaturiste, doreur, décorateur de bannières. Son œuvre capitale fut le grand Retable de la cathédrale (av. 1435) : grandes scènes de la vie de la Vierge, de l'histoire de l'évêque saint Froilan, de l'invention du corps de saint Jacques en Galice, avec de nombreuses figures de saints isolées. Démonté malheureusement au XVIIIe s., dispersé entre plusieurs églises, le retable est aujourd'hui replacé, mais incomplet. Quant au cycle de peintures murales du cloître (Passion du Christ), qui appartiennent à une époque ultérieure (1451), elles sont très endommagées, mais attestent l'évolution du peintre vers un style plus grave et plus monumental. La similitude de style permet d'attribuer à Francés d'autres ouvrages, notamment le retable de la chapelle du Contador à S. Clara de Tordesillas (prov. de Valladolid) et celui de La Bañeza (prov. de León), acheté en 1930 par le Prado (Vie de la Vierge ; Scènes de la vie de saint François). À travers ces œuvres, Francés se détache, avec une personnalité très attachante, par l'élégance du dessin, la vigueur des portraits, mais plus encore par l'esprit d'observation, le sens du détail pittoresque et parfois de l'humour. C'est un chroniqueur vif et charmant de la vie espagnole à l'époque de Jean II.

Francesco da Rimini

Peintre italien (Rimini † av.  1348).

La signature " Francisci Ariminensis " figurait sur les fresques représentant des Scènes de la vie du Christ et de saint François dans le réfectoire du couvent des Franciscains de Bologne (auj. en partie à la P. N. de Bologne). En raison de la qualité moyenne de ces peintures, Francesco n'a été considéré que comme un artiste relativement secondaire dans l'école de Rimini, s'inspirant docilement des modèles laissés par Giotto à Assise et à Rimini même. Il est cependant l'auteur du remarquable diptyque provenant de Bologne, dont un volet représente la Madeleine entourée de saints (Pérouse, G. N.) et l'autre la Crucifixion (Zurich, Kunsthaus), dont la finesse et la subtilité sont dans la meilleure tradition de l'école de Rimini. On a également proposé de lui attribuer deux séries de panneaux, l'une groupée sous le nom de Maître de Verucchio (Crucifix, Urbino, G.N. ; Adoration des mages, Coral Gables, Lowe Art Gallery ; Vision de la Beata Chiara, Londres, N. G.), l'autre sous celui de Maître de la Madone Cini (Madone, anc. coll. Cini, centre d'un retable, dont les autres panneaux, des Scènes de la vie de la Vierge, sont au musée de Lausanne et au M. A. C. de Barcelone).

Francesco di Giorgio Martini

Peintre italien (Sienne 1439  – id. 1501).

Il fut le condisciple de Neroccio di Landi chez Vecchietta, qui lui enseigna les fondements des trois arts renouvelés à la lumière des découvertes florentines. Toutefois, dans son œuvre picturale, il demeura davantage attaché à des formules archaïsantes, alliant les élégances graphiques de Filippo Lippi et de Verrocchio à un goût du rythme qui offre un accent de maniérisme néo-gothique. En revanche, il ordonne ses architectures avec une exquise mesure ; son admiration pour Alberti ne lui fait pas oublier les principes rationalistes de Piero della Francesca ou de Brunelleschi. Enfin, dans ses rares et admirables sculptures, il unit en une remarquable synthèse un impressionnisme plastique et la tradition florentine de Donatello et de Pollaiolo.

   Ses œuvres peintes et ses dessins se situent à la limite de la stylisation la plus raffinée de caractère nettement abstrait. Son grand Couronnement de la Vierge, peint pour Monteoliveto Maggiore en 1472-74 (Sienne, P. N.), présente une construction complexe, édifiée dans un espace exigu, mais où transparaît l'application des idées de miniaturiste de Liberale da Verona ou de Girolamo da Cremona, qui travaillaient alors à Sienne. Son Adoration de l'Enfant par la Sainte Famille, saint Bernard et saint Thomas d'Aquin, de 1475-76 (id.), est influencée en revanche par les idées développées dans l'entourage de Verrocchio à Florence et dénote même une connaissance des premiers exemples de Vinci et de Botticelli. La même année, sa collaboration d'atelier avec Neroccio prend fin. Sa petite Annonciation (id.), élégante et calligraphique, est probablement un peu antérieure.

   Dans les années qui suivent, il voyage de ville en ville (Lucques, Naples, Capoue, Rome, Milan, Pavie), mais réside en particulier à Urbino, où, dès 1477, il est au service de Federico da Montefeltro. Son activité picturale diminue alors (en 1484, il est nommé singularis architector et, à partir de 1489, il n'est plus mentionné que comme sculpteur, architecte et ingénieur), au point qu'il manifeste sans ambiguïté un vrai changement de manière lorsqu'il revient à la peinture.

   Dans Scipion l'Africain (Florence, Bargello) et dans la Nativité (Sienne, S. Domenico), peinte certainement à la fin du siècle, on discerne en effet l'influence directe d'artiste florentins, et plus particulièrement celle de Filippino Lippi et de Piero di Cosimo. On lui attribue un cycle de fresques, mis au jour récemment dans la chapelle Bichi de S. Agostino à Sienne, que l'on peut dater entre 1489 et 1493.

   Si Francesco di Giorgio eut peu d'effet sur ses contemporains par son art pictural, son rôle de représentant de la culture universaliste de la Renaissance toscane ne doit pas être mésestimé, car il transmit à des artistes comme Peruzzi les secrets spirituels d'un classicisme intimement senti plutôt qu'appris par une étude rigoureuse de l'antique. Outre les œuvres citées, on peut signaler que Francesco di Giorgio a peint également des Madones à l'Enfant à mi-corps (Avignon, Petit Palais), souvent entourées de Saints (Sienne, P. N. ; Boston, M. F. A. ; Cambridge, Mass., Fogg Art Museum ; Madrid, fondation Thyssen-Bornemisza ; musée de Coral Gables, fonds Kress), une Adoration de l'Enfant (Metropolitan Museum), dont la partie supérieure (Dieu le Père et des anges) est à Washington (N. G.), et une Allégorie de la Fidélité (Pasadena Norton Simon Museum). On lui doit aussi des enluminures dans des Codex (musée de l'Osservanza, près de Sienne ; cathédrale de Chiusi ; Florence, Biblioteca Nazionale centrale) et la peinture d'une tablette de la Biccherna (1467, Sienne, Archives). Il peignit quelques " cassoni " mythologiques, mais les plus célèbres de ceux qui lui étaient attribués naguère (Enlèvement d'Europe, Louvre ; Joueurs d'échecs, Metropolitan Museum) sont aujourd'hui donnés à Liberale da Verona ou à Girolamo da Cremona. La grande exposition organisée à Sienne en son honneur en 1993 a démontré la diversité de ses dons. Toutefois, L. Bellosi a émis alors l'hypothèse que la plupart des peintures conçues par l'artiste ont été exécutées en bonne partie par un collaborateur qu'il nomme le " Fiduciario di Francesco ".