Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
E

Everdingen (les Van)

Peintres néerlandais.

 
César Boetius (Alkmaar 1617  – id.  1678). Il fut l'élève de Jan Van Bronckhorst à Utrecht ; inscrit en 1632 à la gilde des peintres d'Alkmaar, en 1651 à celle de Haarlem, dont il fut commissaire en 1653-54 et doyen en 1655-56, enfin cité en 1661 à Amsterdam, il travailla en 1648 et 1650 à la Huis ten Bosch, près de La Haye, et y décora la salle d'Orange.

   César Boetius Everdingen peignit des portraits : Willem Baert (1671, Rijksmuseum), Elisabeth Van Kessel (1671, id.), Albert Capelman (1635, musée de Leyde), Anna Bloem (1635, id.), ainsi que des scènes d'histoire et de genre : Socrate, ses deux épouses et Alcibiade (musée de Strasbourg), Diogène cherchant un homme (1652, Mauritshuis), Bacchus, les nymphes et l'amour (Dresde, Gg), Pan et Syrinx (Amsterdam, Rijkmuseum) ; Amoureux, id., Joueuse de cistre (musée de Rouen), dans des tons gris-bruns et porcelainés, où la sobriété des compositions s'allie à une volonté caravagesque d'opposer les volumes, modelés par des tons clairs et raffinés et une fermeté plastique qui aboutit parfois à de très séduisants effets d'étrangeté (Buste de femme romaine, 1665, Vorden, coll. Staring ; les Cinq Muses, à la Huis ten Bosch de La Haye).

 
Allaert (Alkmaar 1621 – Amsterdam 1675). Frère de César, il eut pour maîtres, selon Houbraken, Roelandt Savery (à Utrecht) et Molyn (à Haarlem). Marié en 1645 à Haarlem et inscrit la même année à la gilde de cette ville, il devint citoyen d'Amsterdam en 1657. D'un voyage effectué v. 1640 en Scandinavie, il devait tirer l'essentiel de son inspiration : des vues de sites norvégiens ou suédois ; des côtes rocheuses battues par la mer ou de puissantes cascades dans des montagnes boisées. Allaert Everdingen s'est visiblement complu, et non sans succès, à exploiter la veine pittoresque d'un paysage si étranger à la Hollande. Et s'il prolonge par là un vieux courant d'exotisme maniériste, dont Savery reste l'exemple, par sa facture soignée, ses bruns et ses verts fermes et nuancés, qui jouent avec de délicats gris bleutés dans les nuages, sa précision d'observateur attentif et la finesse de sa lumière, il s'affirme, en bon disciple de Molyn, comme l'un des excellents représentants du paysage réaliste néerlandais dans la première moitié du siècle, aux côtés de Van Goyen et d'Aert Van der Neer ; il se relie aussi à la vision grandiose d'un Hercules Seghers ou d'un Cornelis Ursom, comme le prouve son Fjord du musée de Karlsruhe. Jacob Van Ruisdael lui doit évidemment quelques suggestions qui, dépouillées de leur exactitude pittoresque, deviennent des spectacles émouvants chez ce lyrique soucieux de transposition poétique et qui appartient du reste à une génération plus jeune. Presque tous les grands musées possèdent de tels Paysages scandinaves d'Everdingen (le Rijksmuseum, notamment en a 4). La Vue du château de Montjour, près d'Amblève (dans les Ardennes) du Mauritshuis se signale par la délicatesse de ses tonalités. En France même, où Everdingen est bien représenté, citons, en dehors de ceux du Louvre, de bons exemples à Strasbourg, Amiens, Nancy, Bordeaux, Lyon et Rouen (Paysage scandinave, 1670). Il faut encore mentionner chez l'artiste quelques belles et rares Marines, superbement tempétueuses (Chantilly, musée Condé, et musée d'Alkmaar), qui ne laissèrent pas de marquer son élève Backhuyzen. Allaert Everdingen est non moins célèbre comme graveur, la technique de l'eau-forte convenant d'ailleurs à son talent précis. En dehors de nombreux paysages scandinaves, il a gravé une suite de 57 eaux-fortes sur les ruses de Renard (dessins préparatoires au British Museum).

Evergood (Philip)

Peintre américain (New York 1901  – Bridgewater 1973).

Quoique citoyen américain, Evergood reçut toute son éducation en Angleterre et entreprit en 1921 des études de sculpture à la Slade School of Art de Londres. À New York, en 1923, il suivit les cours de peinture de George Luks à l'Art Student's League puis se rendit à Paris pour étudier à l'Académie Julian sous la direction d'André Lhote et de Jean-Paul Laurens. En 1931, il s'installa définitivement aux États-Unis et fut chargé, de 1934 à 1937, par le W. P. A. Federal Art Project de la section de peinture de chevalet. Sensible aux problèmes sociaux causés par la crise de 1929, Evergood peint alors des sujets de la vie quotidienne : The Strike (1937, New York, Whitney Museum of American Art) décrit une scène de violence où les grévistes sont malmenés par la police, Don't Cry Mother (1938-1944, New York, M. O. M. A.), la misère des nécessiteux. À ces thèmes, qu'il poursuit tout au long de sa carrière, s'ajoutent des sujets plus simples ou plus symboliques (Sunny Side of the Street, 1950, Washington, Corcoran Gal. ; Happy Entrance, 1951, Huntington Wood's, coll. Epstein). Tout comme ses sujets, son style varie d'une œuvre à une autre et, bien qu'il ne recoure pas à la fantaisie, sa caractéristique la plus importante se trouve dans l'aspect primitif de la culture américaine. Mais son style peut aussi côtoyer dans certaines œuvres celui des expressionnistes allemands et notamment de Max Beckmann. Evergood a enseigné dans de nombreuses universités américaines (New York, Iowa, Minnesota), et son œuvre est présenté dans les principaux musées des États-Unis.

Eworth (Hans)
ou Ewoutsz Eworth

Peintre flamand (actif à Anvers en 1540  – Londres apr.  1574).

Il est inscrit comme franc maître à la gilde de Saint-Luc d'Anvers en 1540, puis il se rend en Angleterre v. 1549, où il travaille à Londres, dit-on, jusqu'en 1573. Ses tableaux, identifiés grâce au monogramme HE, s'échelonnent de 1549 à 1567. Ses premiers portraits s'inspirent du style de Jan Van Scorel, de celui d'Holbein dans sa période anglaise et, plus tard, de celui de Clouet. Parmi ses premiers portraits, les plus importants sont ceux de Thomas Wyndham (1550, Longford Castle, coll. comte de Radnor) et le portrait allégorique de Sir John Luttrell en divinité marine triomphant des tempêtes grâce à la Paix (1550, Londres, Courtauld Inst.), celui-ci trahissant une influence maniériste française. Sous le règne de Marie Tudor, Eworth, ayant exécuté plusieurs miniatures et grands portraits de la reine (1554, Londres, Society of Antiquaries et National Portrait Gallery), fut le peintre officiel de la Cour, mais il ne semble pas qu'il ait obtenu les faveurs d'Élisabeth Ire dès son avènement en 1558. Il réalisa pour elle un Portrait allégorique où elle apparaît devant le château de Windsor, surpassant par sa gloire les trois déesses du Jugement de Paris : Junon, Minerve et Vénus (1569, Hampton Court). De 1570 à 1573, il dessina des costumes et des décors de fête. Ses chefs-d'œuvre sont la Duchesse de Suffolk et Adrian Stoke (1559, Voelas, pays de Galles, coll. J. C. Wynne-Finch) et Mrs Joan Wakeman (1566, anc. à Cornbury Park, coll. Oliver Watney). Eworth exerça son influence sur Nicholas Hilliard.