Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
M

Music (Zoran Antonio)

Peintre italien (Gorizia, Udine, 1909-Venise 2005).

Après des études secondaires à Maribor, il entre à l'Académie des beaux-arts de cette ville et se familiarise avec l'art français contemporain ainsi qu'avec les œuvres de Kandinsky et de Mondrian. En 1935, il se rend à Madrid et se consacre à l'étude de Greco et de Goya. Installé l'année suivante à Cuzola, il reste en Dalmatie jusqu'en 1940 : l'art des icônes et les fresques des églises dalmates le marquent profondément. Après avoir visité l'Autriche et la Pologne, Music se fixe à Venise en 1942. Le quattrocento italien l'enchante autant que l'art byzantin de Ravenne. Déporté à Dachau en 1943, il vient à Paris en 1948 ; il s'y installe en 1953, partageant son temps entre cette ville et Venise. À Paris, il expose à la gal. de France en 1952, en 1954, en 1956, et participe au Salon des Réalités nouvelles en 1958, en 1959 et en 1961. Vers 1950, il s'intéressa à la tapisserie et s'exprima également par la gravure (il reçut le premier prix de gravure à la Biennale de Venise en 1956). Marqué par les paysages arides de son pays d'origine, son art, après avoir connu une phase " figurative " à ses débuts, où il accordait une large part au souvenir, s'est affirmé depuis dans un style non figuratif (Motifs dalmates, chevaux qui passent, 1948-1950 ; Nus, 1947-1950), très personnel à partir de 1956. Ses toiles évoquent, à travers quelques variations tonales de rouges, de bruns, de gris ou de bleus délavés, la végétation ou le sol d'un pays rêvé et perdu le long des côtes dalmates (Colline dalmate I, 1966). Le retour à la figuration, autant sans doute que l'évolution politique, lui a fait exploiter de nouveau ses souvenirs, et son expérience de déporté est à l'origine de la suite de toiles et de gravures exposées en 1970-1971, à la gal. de France, sous le titre dénué d'ambiguïté Nous ne sommes pas les derniers. Les moyens, aussi discrets que naguère, dans la tradition graphique d'Ensor et de Goya, rendent la mort plus insidieusement présente quand elle unit dans un anonymat pétrifié des corps exsangues. Les œuvres de 1972 évoquent des motifs végétaux, racines, branches discernées à travers une atmosphère voilée. En 1974, Music peint une série de paysages qui interrompt momentanément la suite toujours reprise des cadavres évoquant les exterminations de la dernière guerre. Il est représenté au M. N. A. M. de Paris (qui lui consacra en 1988 une exposition) et dans de nombreux musées : Amsterdam, Bâle, Essen, Le Havre, Belgrade, Venise, New York, Rome, Ljubljana. Une rétrospective a été consacrée à l'artiste (Paris, Grand Palais) en 1995.

Muziano (Girolamo)

Peintre italien (Brescia 1532  –Rome 1592)

Lors de sa formation à Padoue entre 1544 et 1546, Muziano entre en contact avec Domenico Campagnola et Lambert Sustris. Il poursuit sa formation à Venise et à Rome (présence attestée à partir de 1549 par des documents). Sa première activité est tournée vers le paysage pur (œuvres aujourd'hui perdues). Toutefois, on connaît une suite de paysages de Muziano gravée par Cornelis Cort en 1573-74, importante pour l'évolution du paysage à Rome. La fresque qu'il exécute pour l'église S. Caterina della Rota à Rome, Apparition de l'ange à saint Joseph, est caractéristique de cette première période : il y révèle son intérêt pour la peinture vénitienne à son arrivée à Rome. Il exécute les fresques de la chapelle Gabrielli à Santa Maria sopra Minerva (v. 1550) et le retable, commandé par Marcantonio Colonna, représentant la Résurrection de Lazare (1555, Rome, Pin. du Vatican). Le succès de cette œuvre entraîne une commande sur le même thème destinée au dôme d'Orvieto (1555-56), pour lequel il réalise, par ailleurs, le Christ et Véronique (1556-57), la Flagellation et l'Arrestation du Christ, commandés en 1574-75, mais exécutés dix ans plus tard. Entre 1560 et 1566, il est au service du cardinal Ippolito d'Este, comme responsable des chantiers des décors à fresque des palais de Montecavallo, Montegiordano et de la Villa de Tivoli. Dans le même temps, il obtient d'importantes commandes : la Résurrection de la fille de Giairo pour Philippe II d'Espagne et le décor de la chapelle Contarelli à Saint Louis des Français à Rome (1565, non exécutée). Du début des années 1570 datent les fresques des Histoires de la vie du Christ et le retable représentant les Lamentations sur le corps du Christ dans la chapelle Ruiz (Rome, S. Caterina dei Funari) ainsi que les toiles destinées à la chapelle Altoviti (basilique de Lorette). En 1576, Muziano achève la suite importante des 130 gravures d'après les reliefs de la colonne Trajane. Grégoire XIII le nomme surintendant des travaux du Vatican la même année : la Pentecôte (salle du Consistoire, 1576-78), les cartons des mosaïques et la Messe de S. Basile pour la chapelle grégorienne à S.-Pierre ainsi qu'une Prédication de saint Jérôme (aujourd'hui Santa Maria degli Angeli). Muziano dirige enfin le décor de la Galerie des cartes géographiques (1580). La dernière décennie est marquée par des compositions particulièrement inspirées par la culture contemporaine, tendance qui s'affirme dans les Scènes de la vie de saint Mathieu de la chapelle Mattei (Santa Maria in Aracoeli, 1586-89). La solennité et la retenue dans l'expression des sentiments, caractéristiques de l'art de Muziano, illustrent bien l'esprit de la Contre-Réforme.

Mytens

Famille de peintres néerlandais.

 
Daniel le Vieux (Delft v. 1590  – La Haye 1647). Il fit carrière en Angleterre, s'inscrivit à la gilde de Saint-Luc de La Haye en 1610 et fut probablement l'élève de Mierevelt. Ses premières peintures datent de 1610. Il se trouvait en Angleterre vers 1618, année où il exécuta un portrait du comte d'Arundel. Il fut introduit auprès de Jacques Ier en 1619 et devint peintre de la Cour à la mort de Van Somer. C'est ainsi qu'il exécuta de nombreux portraits du roi et de la noblesse anglaise, conservés à Hampton Court et à Buckingham Palace. En 1624, le roi lui accorda une pension à vie, et, en 1625, son successeur, Charles Ier, le nomma " dessinateur auprès du roi " et l'envoya aux Pays-Bas pour étudier les récentes innovations dans l'art du portrait. La première manière de l'artiste est illustrée par le portrait du Duc de Nottingham (1620, Londres, Greenwich Maritime Museum), où le manque d'élégance est compensé par la solidité du personnage. Mytens semble avoir été influencé par la collection de peinture vénitienne de Charles Ier, et son Charles Ier en tenue de l'ordre de la Jarretière (1633, Wentworth Woodhouse) dénote une plus grande maîtrise de la couleur et un style plus raffiné. Mais, lors de l'arrivée de Van Dyck en Angleterre, Mytens fut supplanté par ce dernier dans sa charge de peintre à la Cour. En 1635, il revint à La Haye, où il fut le maître d'A. Hannemann.

 
Isaac ( ? 1602 – La Haye 1666). Frère du précèdent, il fut, comme lui, portraitiste. Il est cité en 1622 à La Haye, où il est inscrit à la gilde de Saint-Luc, en 1632 à Amsterdam et v. 1662 au Portugal comme peintre officiel de la Cour.

 
Jan ou Johannes (La Haye v. 1614 – id. 1670). Neveu et élève de Daniel le Vieux, il fut inscrit en 1639 à la gilde de Saint-Luc de La Haye et participa en 1656 à la fondation de la Confreria Pictura de La Haye, dont il fut commissaire en 1669 et en 1670 ; il peignit, dans un goût vandyckien influencé par J. de Been et Lely, d'élégants portraits de la noblesse néerlandaise et de la famille régnante : Portrait d'une famille (1638, Versailles), Jacob Cats et Cornelia Baars (1650, Rotterdam, B. V. B.), Jacob de Witte (1660, Rijksmuseum), Maria de Witte (1661, id.), Marie Henriette d'Angleterre (Mauritshuis), une Princesse d'Orange (id.), Hendrick Van Brederode (id.), Portrait d'homme (1667, musée de Reims). Le musée de Rennes conserve de lui un important tableau, le Mariage du Grand Électeur de Brandebourg (1646).

 
Daniel le Jeune (La Haye 1644 – id. 1688). Fils et élève de Jan, il fut portraitiste et décorateur. En 1666, il partit pour Rome, où il se lia d'amitié avec Maratta, et, en 1688, fut doyen de la Confreria Pictura de La Haye ; tout comme son père, il peignit des portraits : Vieil Homme (1681, Stockholm, Nm).

 
Martinus le Vieux (La Haye 1648 – Stockholm 1736). Fils et élève d'Isaac, il fut inscrit à la Confreria Pictura en 1667. De 1677 à 1736, il fut peintre officiel à la cour de Stockholm, mais il est cité de 1697 à 1701 aux Pays-Bas. Comme son père, il peignit des portraits, dont celui de Pieter Van Breda du Nm de Stockholm.

 
Martinus le Jeune (Stockholm 1695 – Vienne 1770). Portraitiste, miniaturiste et peintre sur émail, il est le fils et l'élève de Martinus le Vieux ; il quitta la Suède en 1714 et voyagea aux Pays-Bas, en Angleterre et en France ; il était à Dresde en 1720 et à Vienne en 1721 ; puis il alla en Italie (Venise en 1723, Rome de 1724 à 1727) et enfin retourna à Vienne, où il fut nommé peintre officiel de la Cour, puis, en 1759, directeur de l'Académie. Spécialiste de la peinture sur émail, il exécuta aussi des portraits sur toile, proches de ceux de Largillière : l'Empereur François Ier (Mauritshuis), l'Impératrice Marie-Thérèse (id.).