Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
H

Horny (Franz Theobald)

Peintre allemand (Weimar 1798  – Olevano 1824).

Tôt interrompue, son œuvre se compose essentiellement d'aquarelles et de dessins, qui se situent entre le paysage réaliste et celui des nazaréens. Ses premières études, conservées au musée de Weimar, témoignent d'une vision directe de la nature. À l'école de dessin de Weimar, ses dons furent reconnus et encouragés par Rumohr, qui l'envoya en 1816 chez Koch à Rome. Après y avoir rencontré Cornelius, Horny peignit en 1817 de lumineuses études de fleurs et de fruits (Berlin, N. G.) pour les encadrements décoratifs des fresques du Casino Massimo (salle de Dante). L'influence des nazaréens modéra son réalisme foncier, et ses efforts pour poétiser ses paysages, en y introduisant des personnages (Moisson à Olevano, musée de Lübeck ; Rome à l'époque de la Renaissance, musée de Heidelberg), trahissent son souci de leur opposer une formule personnelle. Il leur doit, toutefois, l'étonnante clarté et l'esprit monumental de ses compositions. Il s'applique, en effet, à " saisir la nature avec rigueur et sens plastique, à l'instar des peintres du XVe s. " (lettre à sa mère, oct. 1818). La pureté linéaire de son dessin rappelle Fohr, qu'il admirait entre tous, et Schnorr von Carolsfeld, avec qui il travailla en 1821, à Olevano. Les jeux d'ombres et de lumière, qui confèrent aux détails une plasticité accrue et un coloris éclatant, compensent le linéarisme de l'esthétique nazaréenne (Paysage avec trois paysannes et un berger, Dresde, Kupferstichkab.). Les vues d'Olevano, où le peintre s'installa dès qu'il tomba malade (1818), comptent parmi les œuvres majeures des artistes allemands en Italie (musée de Weimar ; Berlin, N. G. ; Dresde, Gg ; Munich, coll. Winterstein).

Hosiasson (Philippe)

Peintre français d'origine russe (Odessa 1898  – Paris 1978).

Au cours de ses études à la faculté de droit d'Odessa, il fréquente des académies libres et des artistes de l'avant-garde russe. Les troubles révolutionnaires l'amènent à émigrer et, en 1920, il se trouve à Rome, où il fait sa première exposition. En 1922-23, il séjourne à Berlin, expose chez Flechtheim et exécute des décors pour les Ballets romantiques russes. Il se fixe à Paris en 1924 et obtient la nationalité française en 1928. Il expose à divers Salons et principalement, jusqu'en 1939, à celui des surindépendants, dont il est l'un des fondateurs. Après la dernière guerre, sa santé est fortement compromise par une blessure reçue à Dunkerque en 1939. Hosiasson abandonne progressivement son style de décorateur et de peintre figuratif pour arriver à l'Abstraction v. 1948. Il manifeste alors un intérêt particulier pour la matière picturale, qu'il utilise avec violence, animant ainsi des configurations éruptives dont il accentue le relief (Red and Black, 1956, New York, M. O. M. A.). Si cette recherche rejoint les recherches des " signifiants de l'informel " définis par Michel Tapié, qui a présenté en 1956 les peintures d'Hosiasson, il faut voir surtout en celui-ci l'un des premiers " matiéristes ". À partir de 1960, il modère sa technique véhémente et éclaircit sa palette dans de nouvelles compositions de structures plus statiques, qui évoquent les maçonneries de murailles antiques érodées par le temps (Peinture, 1961, Paris, M. N. A. M.). Simultanément, il développe le même thème dans de nombreuses gouaches. Ses œuvres plus récentes se caractérisent par une plus grande souplesse et la ductilité d'une matière qui semble tout à la fois construire et détruire la forme (Monet, 1973). Il illustre aussi de nombreux livres (le Crève-Cœur, d'Aragon). Les principales expositions particulières d'Hosiasson ont eu lieu : à Paris, gal. Stadler (1956), gal. Karl Flinker (1961 et 1966), gal. Regard (1976) et au M. N. A. M. en 1973 ; à New York, Kootz Gal. (1957, 1958 et 1959) et Martha Jackson Gal. (1962) ; au musée de Verviers, Belgique (1965), et en Italie, à la gal. Lorenzelli, de Bergame (1968). L'œuvre du peintre est représenté dans les musées de Paris, Saint-Étienne, Stockholm, Skopje, Vienne, Tel-Aviv, et dans plusieurs musées des États-Unis.

Houasse (Michel-Ange)

Peintre français (Paris 1680  – Arpajon 1730).

Fils et élève de René Antoine Houasse, c'est un artiste original, dont la personnalité, attachante et longtemps méconnue, attire de plus en plus l'attention des historiens. Reçu à l'Académie en 1707 (Hercule et Lychas, musée de Tours), il se rendit à Madrid en avril 1715, à la demande du contrôleur des Finances Orry et au lendemain du second mariage de Philippe V avec Isabelle Farnèse. Il demeura au service de ce roi, comme Pintor de cámara, jusqu'aux derniers temps de sa vie. De santé fragile, il avait obtenu en 1727 un congé pour se rétablir en France ; il en revint sans résultat durable et repartit définitivement pour mourir aux portes de Paris.

   Son œuvre, presque entièrement demeurée en Espagne, frappe par sa variété. Il a peint des tableaux mythologiques agréables, compositions poussinesques exécutées dans le goût de la Régence (Bacchanale, 1719 ; Sacrifice à Bacchus, 1720, Prado). Mais le trait original de son art est une sensibilité ouverte aux influences hispaniques : non seulement son Portrait du jeune prince des Asturies (futur Louis Ier, 1717, id.) révèle un excellent portraitiste, mais la subtilité de sa gamme de gris s'apparente au style de Velázquez. De même, la série de vues des " résidences royales " (en majorité conservées aux palais de Madrid, à La Granja, au Riofrío ; seule la Vue de l'Escorial est au Prado) surprend par sa lumière castillane, diaphane et légère, par une sobriété, un sens très moderne de l'atmosphère, qui fait songer aux paysages velazquéziens plus qu'au style Louis XV et annonce certains Corot.

   D'autre part, plusieurs œuvres religieuses ou profanes de Houasse trouvent un écho imprévu chez Goya. Si la Sainte Famille de 1726 (Prado) reste académique, la Vie de saint François Régis (6 tableaux commandés pour le noviciat des Jésuites et auj. à l'Instituto de S. Isidro), vigoureuse et assez espagnole de style, a inspiré directement Goya pour la chapelle des Borgia à la cathédrale de Valence. Et parmi les scènes de genre de Houasse (Palais royal de Madrid et La Granja), aimables et adroitement composées, très variées (un épisode du Don Quichotte, la Barque enchantée, voisine avec des " documentaires précieux " : Intérieur d'école, Académie de dessin, Alcázar de Madrid vu du Manzanares, avant l'incendie de 1734), plusieurs sujets de jeux et divertissements populaires (Colin-maillard, la Balançoire, la Battaison) ont été repris par Goya dans ses cartons de tapisserie. Houasse apparaît ainsi comme le premier et le principal trait d'union entre artistes espagnols et français du XVIIIe s.