Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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métaphysique (peinture)

Ce mouvement pictural italien prit forme en 1916, lors de la rencontre fortuite, dans un hôpital militaire de Ferrare, des peintres De Chirico, Savinio, Carrà et De Pisis. À partir de 1920, Morandi y adhéra aussi quelque temps. Mais le mouvement naquit d'une série de recherches antérieures. Ainsi, les tableaux de la période parisienne de De Chirico peuvent se ranger, à partir de 1910, parmi les premiers témoins de la peinture " métaphysique ". La suite des " Places d'Italie " exprime une dimension onirique et fantastique qui introduit un élément troublant dans le vide de leurs vastes scénographies architectoniques. Avec la Peinture métaphysique, la métaphore et le rêve deviennent les bases de cette transposition de la réalité au-delà d'une logique habituelle. En même temps, le contraste entre la précision réaliste des objets et de l'espace et l'atmosphère lyrique et évocatrice en renforce la tension hallucinée. En dehors de l'affinité des thèmes, le Mouvement métaphysique naquit de cette atmosphère commune qui, entre 1916 et 1922, réunit peintres et écrivains dans le cercle de la revue Valori Plastici, où fut publiée une série d'études théoriques de De Chirico et de Savinio sur la Peinture métaphysique. C'est dans Anadioménon (1919) que Savinio énonça les deux principes essentiels de la poétique métaphysique : " spectralité " et " ironie ". Le thème du " mannequin ", qui devint le motif clef des tableaux de De Chirico et de Carrà, se trouve aussi pour la première fois dans les écrits de Savinio. Diverses composantes culturelles s'intégrèrent au mouvement : pour Savinio et De Chirico, par exemple, les influences néo-classiques exercées par l'ambiance munichoise de leur formation (la peinture de Böcklin en particulier) furent très importantes. En outre, le retour à la tradition classique et à la peinture des Trecento et du Quattrocento italiens (dont le théoricien fut Carrà dans ses articles sur Valori Plastici) devint un autre antécédent formel important de la Peinture métaphysique. À propos des perspectives " quattrocentesques " des paysages métaphysiques (Roberto Longhi écrivait : " Le quattrocento devenait une scène d'opéra pour les marionnettes métaphysiques, pour les convives de pierre "). Deux tendances sont décelables dans le Mouvement métaphysique : l'une, riche surtout de significations symboliques et littéraires (De Chirico et Savinio), l'autre, moins doctrinale, mais conditionnée plus profondément par une sensibilité formelle et picturale (Carrà et Morandi). Le mouvement ne forma jamais ni une école ni un groupement bien défini, mais fut plutôt l'expression, le plus nettement formulée en Italie, de la crise du Futurisme. C'est en ce sens que les influences exercées ont été très larges, soit en Italie, soit en Europe. En Italie, la Peinture métaphysique fut même sensible sur des artistes qui évoluèrent tout différemment (Sironi, Soffici, Campigli, Soldati). La diffusion du mouvement, opérée d'abord par Valori Plastici (1918-1921), fut pleinement réalisée par deux grandes expositions organisées en Allemagne, en 1921 et en 1924. L'expérience métaphysique prit fin vers 1920 avec les derniers tableaux métaphysiques de De Chirico (1918), de Morandi (1920) et de Carrà (1921). En 1980, à la Galerie d'Art moderne de Bologne, une vaste exposition a été consacrée aux années 20 en Italie, et notamment au mouvement de Metafisica (La Metafisicagli anni Venti).

Metrass (Francisco)

Peintre portugais (Lisbonne  1825  – Madère  1861).

Disciple de Cornelius et d'Overbeck à Rome, il fut le premier peintre portugais à réaliser l'importance artistique de Paris, où il a séjourné deux fois : v. 1848, puis en 1850. Professeur de peinture d'histoire à l'Académie de Lisbonne, il fut le peintre d'histoire romantique de sa génération (Só Deus !, Lisbonne, M. A. C. ; Camoens dans la grotte de Macau).

Metsu (Gabriel)

Peintre hollandais (Leyde  1629  –Amsterdam  1667).

Il fut peut-être l'élève de Dou à Leyde et compte parmi les membres fondateurs de la gilde des peintres de cette ville en 1648 ; mais, dès 1644, son nom figurait sur un acte d'association de plusieurs peintres leydois. On le suit à Leyde jusqu'en 1654, on le retrouve établi à Amsterdam en 1657. Metsu fut un peintre aussi précoce et doué (sa première œuvre datée est de 1645) que fécond, et son œuvre présente une grande diversité de sujets et de styles, qui n'a peut-être que l'inconvénient d'être trop éclectique, ce qui rend difficile l'établissement d'une chronologie précise.

   Caractéristiques de l'influence de Dou sont toutes ces figures de fumeurs, de savants, de chasseurs ou de servantes, isolées dans l'encadrement d'une niche et que Metsu reprendra avec bonheur tout au long de sa carrière (le Chimiste, Louvre ; le Chasseur, 1661, Mauritshuis). Mais à l'intérieur de ce cadre leydois et atténuant la froideur et la netteté de cette peinture fine se greffe, surtout dans les années 1650, l'influence du chaud coloris de Steen, de Knupfer et de Jan-Baptist Weenix : à ces deux derniers est redevable l'importante toile du Louvre, la Femme adultère (1653), qui constitue un bel et large essai de grande peinture à l'italienne. La série des Forges, aux heureux effets d'éclairage (Londres, N. G.), se situe dans la dépendance de Steen. C'est au cours de ces années que Metsu donne ses meilleurs tableaux : des scènes de genre précieuses et délicates, où tapis, tables, étoffes, objets sont prétexte à de merveilleux exercices de virtuosité picturale ; parfois, Metsu retrouve la facture grumeleuse d'un Vermeer. Les visages et les poses de ses personnages dénotent une fine psychologie. Un clair-obscur léger anime ces traditionnelles Collations, Parties de musique, Lectures de lettres, qui abondent dans la peinture de genre des contemporains de Vermeer. Parmi les meilleures réussites du peintre, citons le Repas (Rijksmuseum), l'Homme écrivant (musée de Montpellier), qui présente un remarquable effet de lumière dû à une chandelle, la Leçon de dessin (Londres, N. G.), fortement marquée par Ter Borch, la Riboteuse et la Peleuse de pommes (2 pendants du Louvre à dater v. 1655), admirables par le rendu du tapis rouge, l'Aumône (musée de Kassel), dont le paysage a la même douceur évocatrice que le fameux Marché aux herbes d'Amsterdam (Louvre). Metsu tend ensuite à perdre de cette simplicité et de cette délicatesse au profit d'une facture plus précise et plus dure, d'une plus grande complication décorative, dont la Visite (1661, Metropolitan Museum) est un témoin essentiel. C'est pourtant à cette époque qu'il faut situer, à titre de transition, les quelques remarquables tableaux si vermériens dans leur harmonie claire et la fermeté de leur construction, comme le célèbre Enfant malade d'Amsterdam, la Leçon de musique (Londres, N. G.) ou les fameuses toiles de la collection Beit à Blessington : la Lettre écrite et la Lettre reçue. Les mêmes qualités se rencontrent encore dans un groupe de tableaux fortement influencés par Ter Borch, comme les deux Dames, l'une écrivant, l'autre à son virginal (Paris, Petit Palais), l'étonnant Noli me tangere (1662, Vienne, K. M.) et la Joueuse de virginal (Rotterdam, musée Van der Vorm), comparable aux meilleures scènes d'intérieur de Pieter De Hooch, de Vrel et de Janssens. Mais la tendance à la surcharge et à la minutie l'emporte dans ces années 1660, notamment dans la Vendeuse et le Vendeur de volaille (1662, Dresde, Gg), tableaux de nouveau très leydois de style. Il est alors certes permis de parler d'une relative décadence de Metsu, que l'on peut mesurer dans le Couple en train de prendre une collation (1667, musée de Karlsruhe). Le talent de Metsu, dans ses natures mortes, explique assez bien la parfaite habileté d'un métier qui supplée au défaut d'invention ; on n'en connaît malheureusement que deux : le Coq mort (Prado) et la Nature morte au hareng (Louvre), dans laquelle l'artiste réalise parfaitement un idéal de calme poétique, toujours recherché par les Néerlandais. Cette nature morte, signée, est incontestable ; en revanche, l'attribution à Metsu des natures mortes des musées d'Oxford et de Leyde doit être déniée.