Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Boch (Anna)

Peintre belge (La Louvière, Saint-Vaast, 1848  – Bruxelles 1933).

Elle est la sœur d'Eugène Boch et la cousine d'Octave Maus. Élève d'Isidore Verheyden, c'est à son contact qu'Anna est sensibilisée à la peinture en plein air. Sa rencontre avec Van Rysselberghe, grâce à qui elle découvre les jeunes avant-gardistes belges, détermine son adhésion à l'Impressionnisme autochtone. Elle abandonne les couleurs sombres de ses débuts pour d'autres plus lumineuses. En 1885, l'artiste adhère au groupe des Vingt (c'est lors de l'une de ses expositions qu'elle achète le seul tableau que Van Gogh ait vendu de son vivant : la Vigne rouge). Comme son cousin, elle s'intéresse à tous les arts et organise des " lundis musicaux " où se rencontrent les membres des Vingt, des musiciens et des compositeurs. C'est pendant cette période qu'elle fait de nombreux voyages dans le sud de la France, en Italie et dans d'autres pays méditerranéens. Au moment de l'engouement pour le Néo-Impressionnisme de Seurat (1889-90), Anna fragmente sa touche pour accroître le luminisme de ses œuvres, mais n'adopte pas pour autant la précision scientifique du Divisionnisme. Ses œuvres témoignent d'un Impressionnisme original (Dunes au soleil, v. 1903, musée d'Ixelles ; Côtes de Bretagne, 1901, Bruxelles, M. R. B. A.). Son art s'inscrit cependant dans le sillage de Monet. En 1904, elle adhère au nouveau cercle de " Vie et lumière " ; ses sujets sont souvent des intérieurs ornés de fleurs où dominent le rose et le violet, ses touches se divisent en virgules. Anna Boch est également connue pour son activité de céramiste.

Bochner (Mel)

Peintre américain (Pittsburgh 1940).

Il poursuit ses études à Pittsburgh au Carnegie Institute of Technology puis s'installe à New York en 1964 au moment où les jeunes artistes américains de sa génération ressentent une crise de la peinture. Il abandonne son activité de peintre — à la suite de la découverte de l'œuvre de Jasper Johns — pour se consacrer à un travail plus conceptuel. Pour cet artiste, l'art est d'abord un instrument de connaissance supposant une information cumulative. Aussi ne s'exprime-t-il que dans le cadre d'expositions où il lui est possible de définir un travail dans sa totalité. Dans cette perspective, en 1966, il explore les possibilités d'occupation de l'espace à l'aide de systèmes numériques, par progression ou permutation (Art in Series, installation au Finch College Museum of Art de New York), et utilise pour y parvenir des repères, sur le mur et le sol, matérialisés de façon différente, en particulier avec des cailloux. À partir de 1969, son œuvre tente d'établir une corrélation entre le fait linguistique et les modalités de sa visualisation : Axiom of Indifference, 1973, Seven Properties of Between, 1972 (installations, New York, gal. Sonnabend). En 1973, Bochner adopte un art qui n'est plus simplement visuel mais devient pictural. Il semble que ses séjours en Italie aient eu une influence déterminante sur son travail. Ses œuvres sont soit des peintures sur toile, soit des peintures murales aux couleurs vives et utilisant le triangle, le carré et le pentagone. Elles matérialisent en termes de surface la progression numérique 3,4,5, qui apparaissait dans ses travaux plus anciens (First Fulcrum, 1975, Baltimore, The Baltimore Museum of Art ; Syncline, 1979, installation, New York, gal. Sonnabend). Son œuvre a fait l'objet d'une rétrospective (New Haven et New York) en 1995-96.

Böcklin (Arnold)

Peintre suisse (Bâle  1827  –San Domenico, près de Fiesole, 1901).

De 1845 à 1847, Böcklin fut, à Düsseldorf, l'élève de Johann Wilhelm Schirmer, dont l'influence marqua les paysages idéalisés qu'il peignit dans sa jeunesse. Après avoir effectué de courts séjours en 1847 à Bruxelles, à Anvers, à Zurich et à Genève (avec Calame), en 1848 à Paris et passé deux années à Bâle, Böcklin part en 1850 pour Rome ; là, sous l'influence de Dreber, l'ordonnance de ses compositions devient plus rigoureuse et sa palette s'éclaircit. À son retour de Rome (1857), il décore de paysages la maison de l'auteur dramatique Wedekind à Hanovre. Centaures, faunes et nymphes apparaissent alors dans ses paysages (Pan dans les roseaux, 1859, Munich, Neue Pin.), où se révèle, pour la première fois, sa vision originale de la nature, que prolonge une idée mythique. Après avoir enseigné le paysage pendant deux ans à la nouvelle École des beaux-arts à Weimar, il travaille de nouveau à Rome de 1862 à 1866, visite Naples et Pompéi, et peint en 1864 et 1865 les deux versions de la Villa au bord de la mer (toutes deux à la Schackgal. de Munich). Sous l'influence des fresques antiques, il expérimente des accords colorés plus acides. Les fresques de l'escalier du musée de Bâle (1868-1870) constituent l'œuvre capitale de son séjour dans cette ville (1866-1871), qu'il quitte pour Munich (1871-1874) ; il travaille alors pour le comte Schack : Triton et Néréide (1873-74, Munich, Schackgal). Un cercle d'artistes se forme autour de lui.

   À Florence, de 1875 à 1885, le sculpteur Hildebrand et von Marées font partie de son entourage. Ce séjour est une période heureuse et féconde (Ulysse et Calypso, 1883, Bâle, Kunstmuseum) où ses compositions atteignent une plénitude sereine (Clio, 1875, id. ; Chant du printemps, 1876, Moscou, musée Pouchkine). Sa situation financière s'améliore et son audience en Allemagne se confirme grâce au marchand Gurlitt. En 1880, Böcklin réalise la première des 5 versions de l'Île des morts (musées de Leipzig et de Bâle). Tout d'abord très critiqué, il connaît alors un succès croissant qui explique les versions fréquentes d'œuvres anciennes qui lui seront commandées à la fin de sa carrière. De 1885 à 1892, il réside à Hottingen, près de Zurich, puis, jusqu'à sa mort, à Fiesole. Une de ses dernières œuvres est la Chasse de Diane du musée d'Orsay (1896). À la fin du siècle, il est considéré comme le peintre le plus éminent d'Allemagne, mais l'engouement pour l'Impressionnisme porte très vite préjudice à sa renommée. Comme les romantiques allemands, il restitue dès ses débuts au paysage (Sapin dans le Jura, 1849, Bâle, Kunstmuseum) une dimension profonde et méditative de recueillement mystique. Ses meilleures œuvres frappent par le rendu méticuleux et suggestif de la nature, la création de figures fantastiques (Combat des centaures, 1873, Bâle, id. ; la Peste, 1898, id.) le plus souvent monumentales, une composition simple, un coloris puissant. De son univers silencieux où surgissent des figures pétrifiées (l'Île des morts, 1880, id.) émane une atmosphère mystérieuse et suffocante.

   Si, pendant ses dernières années, Böcklin s'est souvent inspiré de pensées philosophiques, l'idée littéraire demeure toujours soumise à la composition formelle. Longtemps oublié ou mésestimé, il retrouve aujourd'hui, un peu comme Gustave Moreau, de nombreux admirateurs, séduits par les bizarreries de son imagination et les qualités poétiques de son symbolisme. Il est très bien représenté au musée de Bâle.