Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Rowlandson (Thomas)

Peintre et caricaturiste britannique (Londres 1756  – id. 1827).

Fils d'un riche marchand de textile qui fit faillite, il fut élevé par un oncle et une tante. Il étudia à l'École de la Royal Academy, nouvellement créée, où il apprit le dessin à la manière des peintres d'histoire comme Mortimer. En France en 1774, puis de nouveau en 1782 et 1783, il dessina principalement des personnages ; certains historiens expliquent l'enroulement de son trait comme une influence possible du Rococo français.

   À ses débuts, Rowlandson semblait vouloir faire carrière de peintre d'histoire. En 1775, il présentait à la Royal Academy un dessin : Dalila rendant visite à Samson emprisonné. Après s'être essayé au portrait et plus rarement au paysage, à une époque où Sandby avait consacré le genre, il exposait en 1781 sa première caricature gravée, l'École de l'éloquence (Windsor, Royal Library), suivie en 1784 du Voyage dans une chaise de poste. Puis ce furent l'Époux enragé, l'Épouse extravagante, l'Amputation. La même année, l'artiste abordait la caricature politique, mais ses thèmes de prédilection devaient rester les études de mœurs. Associé à Henry Wigstead, avec qui il voyagea en 1789 dans le sud de l'Angleterre et en 1797 dans le pays de Galles, il collabora ensuite avec Rudolph Ackermann, qui ouvrait une boutique d'estampes sur le Strand en 1795. Son œuvre devint vite populaire grâce à la diffusion de certaines publications, comme le Poetical Magazine, The Humorist et l'English Spy, et grâce aussi à l'illustration de nombreux ouvrages de la littérature anglaise, comme, en 1817, le Vicaire de Wakefield de Goldsmith. L'abondance de sa production a souvent nui à la qualité de ses planches. Parmi ses œuvres les plus importantes figure la série Dr Syntax à la recherche du pittoresque (1812-1820). Ses dessins rehaussés d'aquarelle figurent dans les grands cabinets londoniens (British Museum et V. A. M.)

Roy (Pierre)

Peintre français (Nantes 1880  – Milan 1950).

Après des études de japonais, il se fixe à Paris et se consacre entièrement à la peinture. En 1904, influencé par le néo-impressionnisme, il entre dans l'atelier de Jean-Paul Laurens, puis travaille avec Grasset, qu'il considère comme son maître. C'est à partir de 1908 qu'il devient un familier des fauves et de leurs amis Apollinaire, Max Jacob et André Salmon. Après la guerre, Roy se joint aux surréalistes et participe à la première exposition collective du groupe en 1925, gal. Pierre. Influencé par De Chirico, il n'en garde pas les effets de lumière mais s'attache davantage, comme Magritte, à la mise en rapport d'objets hétéroclites dans un espace homogène (la Fin des mauvais jours, 1923, Paris, coll. part. ; Danger dans l'escalier, 1927, New York, M. O. M. A.). Après une première exposition personnelle à Paris, gal. Pierre-Loeb (1928), Pierre Roy introduit dans ses toiles d'immenses perspectives où, en flagrante disproportion, prennent place des objets minutieusement représentés (Musique n° 3, 1930, New York, M. O. M. A. ; Une journée de campagne, 1937, Paris, M. N. A. M.). Très apprécié aux États-Unis, où il séjourne chaque année jusqu'en 1940, Roy y participe à toutes les manifestations surréalistes. On lui doit également des décors de ballets (Coppélia, 1938 ; Jeu de cartes, 1945), et des lithographies pour l'Enfant de la haute mer de Jules Supervielle (1946). Le M. N. A. M. de Paris conserve un important ensemble de dessins de sa main. Une exposition a été consacrée à l'artiste (Nantes, M. B. A.) en 1995.

Roybet (Ferdinand)

Peintre français (Uzès, Gard, 1840  – Paris 1920).

Il connut un immense succès auprès de certains amateurs avec ses scènes de genre animées de personnages vêtus à la mode du XVIIe s., mousquetaires et buveurs. Dans son œuvre fécond, d'une inspiration peu renouvelée, émergent cependant quelques toiles où se retrouve la flamme des premiers romantiques (le Fou, 1867, musée de Grenoble). Roybet est représenté au musée d'Orsay, aux musées de Bordeaux, Dunkerque, Lyon, Montpellier, Mulhouse, Reims, et, par une série de peintures, au musée de Courbevoie.

Rozanova (Olga Vladimirovna)

Artiste russe (Mélenki 1886  – Moscou 1918).

Après des études dans les écoles d'art Bolchakov et Stroganov à Moscou (1904-1910), elle participe aux activités de l'Union de la jeunesse dès 1911. N'ayant œuvré qu'en Russie, elle y reçut l'influence des peintres français à travers les expositions et les collections. À partir de 1913, elle peint des séries d'œuvres dans la lignée du Cubisme avec des coloris restreints et des teintes sourdes (Homme dans la rue, 1913, Madrid, Fondation Thyssen-Bornemizsa). La même année, elle commence la fabrication de livres-objets, mêlant étroitement la peinture et l'écriture (Livre-zaoum, 1915 ; la Guerre, 1916, de Kroutchonykh).

   En 1915, elle écrit des poésies de tendance zaoum (transmentale) et adhère au Suprématisme ; elle fait partie du groupe Supremus (1916). Elle adhère avec enthousiasme à la Révolution, crée des décors pour les fêtes, participe à la création des ateliers libres d'État en province, applique ses recherches suprématistes à un art utilitaire, tissus ou objets quotidiens. Ses œuvres évoluent alors dans une tendance géométrique de formes minimales (Vol d'un aéroplane, 1916, Samara, musée). Juste avant sa mort, elle peint des toiles de pure couleur (Composition sans objet, 1917-18, Saint Pétersbourg, Musée russe)

Rubens (Petrus Paulus)

Peintre flamand (Siegen, Westphalie, 1577  – Anvers 1640).

Les années de formation et les premières œuvres (jusqu'en 1600)

Fils d'un juriste et échevin anversois, qui, en raison de ses sympathies pour la Réforme, avait dû s'exiler en Allemagne avec sa famille en 1570, au moment des troubles religieux et politiques qui déchiraient la Flandre, Pierre-Paul Rubens naquit à Siegen en 1577. C'est dans cette ville que son père, accusé d'adultère avec Anne de Saxe, épouse de Guillaume le Taciturne, dont il était devenu le conseiller juridique, avait été assigné à résidence, après avoir échappé à la mort grâce à l'intervention courageuse et dévouée de son épouse, Marie Pypelinckx, et avoir été incarcéré pendant deux années au château de Dillenburg. Peu après la naissance de Pierre-Paul, leur 6e enfant, la famille Rubens vint s'établir à Cologne. Après la mort du père, survenue en 1587, la mère de l'artiste rentra à Anvers, où elle s'installa avec ses enfants en février 1589.

   À l'âge de douze ans, le futur peintre fréquentait une école latine dirigée par l'humaniste Rombaut Verdonck, mais, sa mère se trouvant démunie de ressources, il dut entrer en 1590 comme page au service de la comtesse Marguerite de Ligne Arenberg, veuve de Philippe de Lalaing. Il commença cependant rapidement un apprentissage qui le mena de l'atelier du paysagiste Tobias Verhaecht, apparenté à la famille Rubens, à celui d'Adam Van Noort et enfin à celui du célèbre " romaniste " Otto Venius. La part respective de formation de ces 3 maîtres de même que la durée exacte de cet apprentissage sont encore mal connues ; toujours est-il que Rubens est inscrit comme maître sur les registres de la gilde de Saint-Luc d'Anvers en 1598 : il a vingt et un ans. Il va encore travailler pendant deux ans dans l'atelier d'Otto Venius, mais la production de cette période reste incertaine et difficilement dissociable de celle de son maître : ainsi l'Adam et Ève (Anvers, maison de Rubens), sans doute réalisé à cette date-là et inspiré d'un schéma raphaélesque transmis par une gravure de M. Raimondi, montre un curieux mélange de fidélité au Classicisme romain et de Naturalisme tout nordique.

Le séjour en Italie (1600-1608)

En mai 1600, le jeune Rubens entreprend le traditionnel voyage en Italie, qu'avaient accompli avant lui son père et son maître Otto Venius, et où son frère Philippe se trouvait déjà. Il gagne tout d'abord Venise (en passant par Paris et Fontainebleau ?), sans doute attiré par les œuvres de Titien, pour qui il gardera tout au long de sa vie une profonde admiration. C'est dans cette première ville d'Italie que, remarqué par le duc de Mantoue, Vincent de Gonzague, il entre au service de ce dernier, sans obtenir toutefois le titre officiel de peintre de cour : son rôle consistera autant à faire des copies et des portraits de dames célèbres pour la galerie du duc qu'à organiser les festivités de la cour de Mantoue. Mais cette fonction va lui permettre de voyager à travers l'Italie et de prendre contact avec tous les aspects artistiques de la culture italienne. Très rapidement, sa position s'affirme et Rubens reçoit des commandes importantes : lors d'un premier séjour à Rome en 1602, celui-ci est chargé par l'archiduc Albert, gouverneur des Pays-Bas, de décorer de 3 panneaux la chapelle Sainte-Hélène dans l'église Santa Croce in Gerusalemme (aujourd'hui à Grasse, hôpital ; l'un, disparu, remplacé par une copie) ; à Mantoue même, il laissera 3 grandes toiles dans l'église des Jésuites : la Sainte-Trinité adorée par Vincent de Gonzague et sa famille (Mantoue, palais ducal), la Transfiguration (musée de Nancy) et le Baptême du Christ (musée d'Anvers). Ces premières œuvres traduisent avec évidence combien Rubens s'imprègne avec énergie des exemples italiens, devant autant à la grande statuaire antique, qu'il ne cesse de copier, qu'aux modèles de Michel-Ange, de Raphaël ou de Caravage... À Gênes, où il séjourne en 1605-1606, Rubens s'initie au portrait, représentant avec une étonnante virtuosité les membres de l'aristocratie locale (Portrait de la marquise Brigida Spinola Doria, Washington, N. G.). Il se rend également en Espagne avec mission de porter des présents au roi de la part du duc de Mantoue : c'est pour Rubens l'occasion de se faire remarquer, en peignant notamment le Portrait du duc de Lerma (Prado), où le souvenir de Titien s'anime d'un dynamisme vigoureux. Un second séjour romain lui permet de satisfaire une commande des Oratoriens pour la Chiesa Nuova : la Vierge vénérée par les anges et les saints (musée de Grenoble). Enfin, dans la Circoncision (Gênes, Sant'Ambrogio) comme dans l'Adoration des bergers (pin. de Fermo), se manifeste l'influence de plus en plus prépondérante de Caravage, dont Rubens a pu voir les œuvres à Rome. Mais, à la fin de 1608, celui-ci apprend l'état de santé alarmant de sa mère et quitte l'Italie pour Anvers : il n'y reviendra jamais.