Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Brusselmans (Jean)

Peintre belge (Bruxelles 1884  – Dilbeek 1953).

D'abord apprenti lithographe, il commença à peindre v. 1904 après avoir suivi des cours dans l'atelier d'I. Verkeyden, en compagnie de R. Wouters et E. Tytgat. Dessinateur aux effets très variés, il fut marqué dans sa peinture par les recherches sur la couleur et la touche des années 1910-1914 en Belgique et participa au Fauvisme brabançon. Il recueillit en particulier le goût de la construction de la forme par la " touche-surface " (R. Delevoy). Assez rebelle à toute influence, et notamment à celle de l'Expressionnisme flamand des années 20, son art, d'une vigueur volontairement fruste et sèche, ne se départit de son austérité que durant une courte période (le Plâtrier, 1924). Amateur d'imagerie populaire, sa rude naïveté contraste avec le lyrisme plus éloquent de ses contemporains. Installé à Dilbeek, près de Bruxelles, en 1924, Brusselmans soumit peu après paysages, marines, natures mortes, compositions à personnage à une discipline identique (la Lavandière, 1930, Bruges, musée Groeninge). Dans cette œuvre, dont les partis pris assurent la régularité, les paysages brabançons, exécutés entre 1930 et 1940 surtout, synthèses abruptes d'où la nuance et l'atmosphère sont presque entièrement bannies, sont de fort originales réussites (Paysage aux vaches, 1929 ; Paysage d'hiver, 1938, musée d'Anvers). En 1931, il crée, avec notamment Permeke, De Smet et Van den Berghe, le groupe " les Compagnons de l'art ", avec lequel il expose à Bruxelles en 1938. En 1936-37, il réalise des décors pour Erwartung d'A. Schoenberg et pour Lucifer de Vondel. Après la guerre, il réalise des peintures où l'espace se remplit de figures proches de l'imagerie populaire ou de la caricature (les Compagnons de l'art, 1949). Son esthétique devait amener l'artiste aux confins de la Non-Figuration, dans certaines pages dont les motifs se réduisent à des agencements de formes très simples, vivement colorées (le Printemps, 1950, Amsterdam, Stedelijk Museum). Brusselmans est bien représenté dans les musées belges. Le Stedelijk Museum d'Amsterdam lui a consacré une rétrospective en 1979.

brut (Compagnie de l'art)

C'est une association sans but lucratif fondée à Paris en juin 1948 par Jean Dubuffet, vouée à la garde, à l'étude et à l'accroissement des collections réunies antérieurement par ce peintre.

   Selon l'expression même de Dubuffet, l'Art brut est celui des " productions de toute espèce — dessins, peintures, broderies, figures modelées ou sculptées, etc. — présentant un caractère spontané et fortement inventif, aussi peu que possible débitrices de l'art coutumier ou des poncifs culturels, et ayant pour auteurs des personnes obscures, étrangères aux milieux artistiques professionnels ". Il s'agit ainsi de " formes de création qui ne soient pas de simples avatars d'œuvres d'art homologuées comme le sont l'art dit naïf [...] ou l'art dit surréaliste [...] ". À ces distinctions, il convient d'ajouter qu'il ne s'agit pas non plus, au moins dans son principe, de l'art dit " des malades mentaux ", dans la mesure où Dubuffet lui-même refuse de prendre en considération le caractère éventuellement pathologique d'une œuvre, estimant qu'il n'a rien à voir avec la valeur intrinsèque de cette œuvre.

   La Compagnie, à laquelle appartinrent notamment André Breton et Jean Paulhan, fut fondée à la suite de la création du foyer de l'Art brut dans les sous-sols de la galerie René Drouin, place Vendôme (nov. 1947), où eurent lieu diverses expositions temporaires et intimes. Transférées en septembre 1948 dans un pavillon prêté par les éditions Gallimard, rue de l'Université, où se poursuivirent des expositions (notamment celles consacrées à Joseph Crépin, à Adolf Wölfli et Aloïse en 1948, à Heinrich Anton M. et à Jeanne T. le médium en 1949), les collections furent confiées à la garde de Dubuffet en octobre 1951, date de la dissolution de la Compagnie. Après être demeurées dix ans aux États-Unis, elles furent rapportées à Paris, où la Compagnie, recréée en juillet 1962, les installa dans un local spécialement aménagé, 137, rue de Sèvres.

   Outre l'organisation d'expositions (gal. Drouin, oct.-nov. 1949 ; musée des Arts décoratifs, avr.-juin 1967), la Compagnie a publié, depuis 1964, des Cahiers de l'Art brut groupant des monographies illustrées sur la cinquantaine de cas jugés les plus significatifs. Le catalogue comporte 3 973 œuvres dues à 130 auteurs considérés comme pleinement démonstratifs. S'y ajoutent plusieurs milliers d'œuvres, dues à plusieurs centaines d'auteurs, formant les " collections annexes ", dont le catalogue est en cours d'élaboration. Donnée à la ville de Lausanne en 1971, la collection est présentée depuis 1976 au château de Beaulieu.

Bruyn (Bartholomäus ou Barthel)

Peintre allemand (Wesel [?]  1493  – Cologne  1555).

Dernier artiste notable de Cologne à l'époque qui fait la transition entre le Moyen Âge et la Renaissance, Bartholomäus Bruyn a travaillé toute sa vie dans cette ville ou dans les environs.

   Auteur de tableaux religieux et de portraits, il se forma sous l'influence de peintres néerlandais comme Jan Joost Van Kalcar, Joos Van Cleve et fut par la suite marqué par l'italianisme d'un Scorel ou d'un Heemskerck. Ses grandes compositions religieuses (Retable de la cathédrale d'Essen, 1522-1525 ; Retable de la Crucifixion, 1548, cathédrale de Cologne), à l'imitation des maniéristes nordiques, cèdent le plus souvent à la surcharge et à l'ostentation, mais valent par la précision des physionomies (Retable de la cathédrale Saint-Victor de Xanten, 1528-1535). Bruyn, en effet, se révèle un portraitiste sincère et vigoureux : ses effigies des patriciens colonais, au réalisme intransigeant, restituant l'individualisme du modèle (Johann von Rheidt, 1525, musées de Berlin ; Arnold von Brauweiler, 1535, Cologne, W. R. M.), témoignent d'une probité et d'une finesse d'interprétation dans la meilleure tradition du portrait flamand du XVe s. (Philipp von Gail et Katharina von Gail, diptyque peint vers 1536-1537, Louvre). Leur exceptionnelle valeur documentaire fait de Bruyn le meilleur historiographe de la bourgeoisie de Cologne, au même titre que Cranach pour les princes de Saxe ou Holbein pour la cour d'Angleterre.

   Son fils, Bartholomäus Le Jeune (1530-1610) , dirigea un atelier à Cologne.