Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
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Reese (Gustave)

Musicologue américain (New York 1899 – Berkeley 1977).

Il fit ses études à l'université de New York, et c'est là qu'il enseigna, presque sans interruption, à partir de 1927. Il s'imposa au premier rang de la musicologie américaine par deux ouvrages fondamentaux : Music in the Middle Ages (1940) et Music in the Renaissance (1954), complétés par un certain nombre d'articles publiés dans diverses revues de musicologie.

   Cofondateur, en 1935, de l'A.M.S. (American Musicalogical Society), dont il s'occupa pendant plus de vingt ans, membre durant de longues années de l'IMS (International Musicalogical Society), coéditeur (1933-1944), puis éditeur (1944-45) du Musical Quarterly, il fut aussi cofondateur et membre de plusieurs sociétés de musique ancienne (Plainsong and Mediaeval Music Society, Renaissance Society of America). Dans le domaine de l'édition musicale, il a dirigé les publications des firmes G. Schirmer (1940-1945) et C. Fischer (1945-1955). Il a enfin formé toute une nouvelle génération de musicologues.

réexposition

Dans le plan d'un morceau classique basé sur une présentation initiale des thèmes dite exposition que suit leur développement, démarche consistant à faire entendre à nouveau les thèmes qu'avait présentés l'exposition, sous une forme soit identique, soit très voisine, comme pour donner un poids supplémentaire à son discours avant de l'achever. La réexposition est l'un des éléments essentiels de la forme sonate, mais on la trouve aussi dans nombre d'autres formes, notamment dans la fugue. Dans la sonate dite dithématique, la réexposition obéit à un principe tonal consistant à ramener au ton principal tous les thèmes réexposés, pour en affirmer la signification conclusive.

refrain

Phrase musicale, instrumentale ou vocale, accompagnée ou non d'un texte, et qui, au cours d'une pièce de musique, se trouve textuellement répétée à certains intervalles, et coupée par des épisodes plus ou moins variés que l'on nomme « couplets » (dans les suites de Louis Couperin, le refrain se nomme « grand couplet », par opposition aux couplets proprement dits).

Le principe du refrain est quasi universel, et se retrouve dans un grand nombre de cultures musicales. Ce refrain peut être plus ou moins court, intervenir dans les chansons comme vers isolé à la fin des strophes, ou bien être constitué d'une strophe entière.

   Le refrain est fondé sur le principe structurel le plus simple de la musique : la répétition textuelle. Une phrase musicale, si courte soit-elle, devient refrain par le fait qu'elle est un élément répété textuellement par rapport à d'autres éléments qui, eux, varient. Mais, s'il y a uniquement une répétition textuelle qui s'enchaîne à elle-même, il n'y a pas de refrain proprement dit. Il faut que cette répétition soit brisée, coupée par des épisodes, et que le refrain soit le retour de quelque chose qu'on a momentanément quitté (dans les rondos des sonates et des concertos classiques, le retour au refrain est en même temps le retour à la tonalité principale du morceau) et qui constitue le vif du sujet. En ce sens, le refrain est un peu l'inverse de la ritournelle instrumentale de l'opéra monteverdien ­ laquelle est également une phrase instrumentale (assez courte) répétée textuellement, mais servant à couper le chant, à reposer du « vif du sujet » pour nous y replonger ensuite.

   Dans de nombreuse formes musicales, liturgiques, symphoniques, etc. qui opposent un individu soliste à une communauté dont il émane, le refrain est très souvent dévolu à la communauté, à la collectivité, et les épisodes, ou couplets, à l'individu. Même quand les rondos des concertos classiques débutent par le refrain attaqué par le soliste, ce refrain est aussitôt repris par le tutti, consacrant les retrouvailles, la fusion du soliste avec la collectivité.

   Dans la chanson à couplet, le refrain et le couplet ont souvent une musique spécifique ­ et du point de vue strictement musical, puisque la musique du couplet se répète textuellement elle aussi, un point de vue faussement naïf pourrait envisager couplet et refrain comme identiques de nature, et délimités seulement par une convention. En réalité, le refrain s'identifie comme tel, non seulement parce qu'il comporte généralement les mêmes paroles sur la même musique (alors que les couplets sont faits de paroles qui se renouvellent sur la même musique), mais aussi parce qu'il est souvent rythmiquement et mélodiquement plus marqué, plus dessiné, plus incisif et mémorisable que le couplet ­ lequel est souvent plus proche d'un récitatif, avec un dessin mélodique plus fluide, mois prégnant. C'est un peu la définition du refrain que d'être un élément conçu pour s'imprimer fortement dans la mémoire, avec un sorte d'évidence de sa forme et de son dessin.

   Transposée musicalement, la structure refrain/couplet est à la base de la forme la plus stable de la musique occidentale : la forme rondo, qui repose sur des couplets variés de virtuosité, avec un refrain vigoureux et entraînant qui commence et parfois termine le mouvement.

régale

Sorte de petit orgue portatif à un jeu unique d'anche battante, sans tuyau résonateur, en vogue à la Renaissance. Son clavier, étendu parfois jusqu'à quatre octaves, permettait de jouer en polyphonie et d'accompagner le chant. En usage en Angleterre, en Allemagne et en Italie, on en connaît bien le timbre âpre et nasillard par l'emploi qu'en fit Monteverdi pour soutenir dans l'Orfeo (acte III) le chant de Charon et les personnages du monde souterrain en général (Pluton). La régale tomba en désuétude au XVIIIe siècle.

   Le terme de régale désigne également un jeu d'orgue à anche et à tuyau raccourci, de caractère proche du jeu de voix humaine.

Regamey (Constantin)

Compositeur et philologue suisse (Kiev 1907 – Lausanne 1982).

Après des études à Varsovie et à l'École des hautes études à Paris, c'est en autodidacte qu'il vint à la musique et qu'il commença à composer en 1942. Chargé de cours à Varsovie (philologie indienne) de 1935 à 1939, puis professeur de linguistique à Fribourg (1946) et Lausanne (1949), cet humaniste à l'esprit brillant et distingué a admis les disciplines les plus diverses à condition qu'elles correspondent à une véritable nécessité créatrice. À partir de 1963, il s'est dirigé vers une synthèse des musiques tonales, atonales, dodécaphoniques et autres, cela sans exclure la musique indienne, et certaines de ses œuvres sont ainsi alternativement tonales et sérielles.