Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
G

Gerle (Hans)

Luthiste et facteur de luths allemand ( ? fin XVe s. ou début XVIe – Nuremberg 1570).

On sait peu de chose de ce bourgeois, issu d'une famille de facteurs d'instruments installée à Nuremberg. Son intérêt ne réside pas dans ses compositions originales pour le luth (quelques Préludes), mais dans les indications précieuses qu'il fournit sur les montages, les modes de jeu et ornementations des luths (et aussi des violes de gambe et des violes sans frette), comme en témoignent ses ouvrages Musica Teusch (1532) et Tablatur auf die Laudten (1533). Ses transcriptions de pièces vocales indiquent son désir d'élargir le répertoire du luth (lieder allemands, chansons françaises). Il a développé la technique du luth (doubles cordes à l'unisson, notes répétées et jeu brisé). Ses œuvres ont donné lieu à un travail important : la transcription automatique de ses tablatures pour luth par le groupe E.R.A.T.T.O. du C.N.R.S. publiée par la S.F.M. (Paris, 1974).

Gerlin (Ruggero)

Claveciniste italien (Venise 1899 – Paris 1983).

Diplômé comme pianiste du conservatoire de Milan, Ruggero Gerlin s'est fixé définitivement à Paris après avoir découvert le clavecin grâce à Wanda Landowska, dont il fut pendant vingt ans le disciple et le partenaire. Enseignant à son tour au conservatoire San Pietro a Majella de Naples et à l'académie Chigiana de Sienne, il a formé de très nombreux élèves tout en menant une longue carrière de concertiste international, seul ou avec orchestre, faisant apprécier une éblouissante virtuosité qui n'exclut nullement le sens poétique. On lui doit, outre ses enregistrements sanctionnés en 1949 et 1965 par le grand prix du Disque, une édition intégrale, publiée en 1943, des toccatas d'Alessandro Scarlatti et des sonates de Benedetto Marcello et Gianbattista Grazioli.

Gerold (Théodore)

Musicologue français (Strasbourg 1866 – Allenwiller, Bas-Rhin, 1956).

Après avoir étudié la théologie à l'université de Strasbourg et le chant à Francfort-sur le-Main et à Paris, il soutint, en 1910, une thèse de doctorat sur le chant français au XVIIe siècle. Il a enseigné l'histoire de la musique aux universités de Bâle et Strasbourg, et s'est fait connaître par ses ouvrages sur le chant en France au XVIIe siècle et la musique du Moyen Âge.

Principaux écrits : Clément Marot, les Psaumes avec leurs mélodies (Strasbourg, 1919) ; l'Art du chant en France au XVIIe siècle (Strasbourg, 1921) ; les Pères de l'Église et la Musique (Paris, 1931) ; la Musique au Moyen Âge (Paris, 1932) ; Histoire de la musique des origines à la fin du XIVe siècle (Paris, 1936).

Gershwin (George)

Compositeur américain d'origine russe (New York 1898 – Hollywood 1937).

Pianiste éblouissant, il dut sa première gloire à un exceptionnel don de mélodiste qui l'amena (notamment en collaboration avec son frère Ira Gershwin) à composer quelque 500 « songs » qui tiennent de la mélodie européenne, de l'air d'opérette, de la rengaine anglo-saxonne et du jazz tout en manifestant une personnalité entre toutes reconnaissable malgré un confondant pouvoir de renouvellement. La qualité « classique » de cette production est attestée par le fait que les chansons des frères Gershwin sont toujours au répertoire des chanteurs actuels et que leurs thèmes ont été très largement adoptés par le jazz (I got rhythm, Lady be good, Do it again, Fascinating Rhythm, The man I love, Embraceable you, Someone to watch over me, etc.).

   Conscient de cette noblesse conférée à la chanson, Gershwin, tout en continuant de produire des shows pour Broadway (manières d'opérettes liées à l'actualité et où ces songs peuvent être repris de succès antérieurs s'ils sont en situation), évolua vers une forme de musique plus ambitieuse, rejoignant la tradition « classique » : Rhapsody in blue (1924), Concerto en « fa » (1925), Un Américain à Paris (poème symphonique, 1928), Seconde Rhapsodie (1931), Ouverture cubaine (1932), Variations sur « I got rhythm » (1934). Cet effort de synthèse devait trouver son expression définitive dans son chef-d'œuvre, l'un des plus grands opéras du répertoire : Porgy and Bess (1935). Lors de l'avènement du cinéma parlant, Gershwin fut évidemment sollicité par Hollywood, mais ne participa de son vivant qu'à trois réalisations : Delicious (1931), Shall we dance (1936-37) et Damsel in distress (1937), avant d'inspirer, à son tour, un très grand nombre de films reprenant ses shows de Broadway, incluant une ou plusieurs de ses chansons, voire de ses partitions symphoniques (Un Américain à Paris, 1951), et contant sa vie (The man I love, 1946), ou restituant son opéra (Porgy and Bess, réalisation Otto Preminger, 1959). Gershwin est demeuré si actuel et reste si profondément symbolique de l'Amérique de l'entre-deux-guerres qu'un Woody Allen fait encore appel à sa musique pour évoquer un certain rêve américain (Manhattan, 1978).

Gertler (André)

Violoniste hongrois naturalisé belge (Budapest 1907 – ? 1998).

De 1914 à 1925, il est à l'Académie de Budapest élève d'Hubay en violon et de Kodaly en composition. Ami de Bartók, il devient son partenaire dans de nombreux récitals pour piano et violon, dès 1925 et jusqu'en 1938. En 1928, cependant, il s'installe en Belgique, et fonde en 1931 le Quatuor Gertler, en activité pendant vingt ans. Grand interprète de la musique de son temps, il joue le Concerto de Berg cent cinquante fois en public et, en 1945, donne la première audition européenne de la Sonate pour violon seul de Bartók. Avec son quatuor, il joue également les œuvres d'Honegger. Professeur au Conservatoire de Bruxelles dès 1940, il enseigne entre 1945 et 1959 à la Hochschule für Musik de Cologne, puis à Hanovre de 1964 à 1978.

Gervais (Charles-Hubert)

Compositeur français (Paris 1671 – id. 1744).

Il semble qu'il ait accompli toute sa carrière à Paris et à Versailles. En 1697, il fait représenter, à l'Académie royale de musique, une tragédie lyrique, Méduse, sur un livret de l'abbé Boyer. En 1700, il devient le surintendant et maître de musique du duc d'Orléans. Sa carrière bénéficie alors de la protection de ce prince, grand amateur de musique et compositeur lui-même. Gervais publie un recueil de six Cantates françoises (Ballard, 1712) et, en 1716 (peut-être en collaboration avec le régent), écrit une nouvelle tragédie, Hypermnestre, qui va être reprise jusqu'en 1765. Il compose ensuite un ballet intitulé Amours de Protée (1720). En 1723, Delalande décide de céder trois des quatre quartiers de la Chapelle royale et nomme Ch.-H. Gervais (sans doute appuyé par le régent) au dernier (oct.-déc.). De cette activité nouvelle naissent un grand nombre de motets versaillais, pour la plupart à 6 voix avec 4 instruments concertants, et conservés en manuscrit. Ami de Campra et de Desmarets, Ch.-H. Gervais possède un style élégant, mélodieux et original, influencé, certes, par le maître aixois, mais capable d'émouvoir et non dépourvu de saveur harmonique. Son talent est très caractéristique de la détente dans les mœurs qui se produit en France après la mort de Louis XIV.