Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
T

Thomas (Jess)

Ténor américain (Hot Springs, Dakota du Sud, 1927 – San Francisco 1993).

Il renonce à un doctorat de psychologie entrepris à l'université de Stanford pour se consacrer entièrement au chant, avec son professeur Otto Schulman. Il fait ses premiers pas dans le rôle de Fenton (Falstaff) et débute à l'Opéra de San Francisco dans celui de Malcolm de Macbeth (1957). Il vient en Europe étudier avec Emmy Seiberlich, et fait des débuts wagnériens remarqués à Karlsruhe, où il chante pendant trois ans. En 1960, il compose un Bacchus truculent dans Ariane à Naxos à Stuttgart et à Munich. L'année suivante, Wieland Wagner lui fait incarner Parsifal à Bayreuth et Radamès (de Aïda) à Berlin. Il est Walter von Stolzing (les Maîtres chanteurs) au Metropolitan Opera de New York (1962) et au Covent Garden (1969). En 1962, à l'apogée de ses moyens, il incarne avec éclat et intelligence Lohengrin et Parsifal à Bayreuth, deux interprétations fixées par le disque, et participée à la Tétralogie enregistrée par Karajan (1966-1970).

Thomson (Virgil)

Compositeur américain (Kansas City 1896 – New York 1989).

Issu de l'université Harvard, il fut l'élève de Nadia Boulanger et vécut en France de 1925 à 1940, étroitement mêlé à la vie intellectuelle et artistique parisienne. C'est toutefois dans le folklore purement américain des negro spirituals qu'il a trouvé l'inspiration de son premier opéra, Four Saints in Three Acts, sur un livret de Gertrude Stein (1934). Parmi les œuvres les plus marquantes de ce musicien presque classique, citons aussi la partition du film Louisiana Story, la Missa pro defunctis, et l'opéra Lord Byron (1972). Virgil Thomson a été également critique musical du New York Herald Tribune (1940-1954).

Tibbett (Lawrence)

Baryton américain (Bakersfield 1896 – New York 1960).

En 1924, il débute au Metropolitan de New York, puis triomphe l'année suivante dans le rôle de Ford de Falstaff. Il devient l'un des piliers du Metropolitan, durant vingt-cinq ans de carrière ininterrompue. En 1937, il remporte de grands succès à Paris dans Verdi et Puccini : il y incarne Rigoletto, Iago et Scarpia de façon mémorable. Il marque aussi le rôle d'Otello, et celui de don Carlos dans la Force du destin. Dans les années 1930, il crée plusieurs opéras américains de Taylor ou Gruenberg, au Metropolitan. Il s'est aussi produit en récital.

Tiensuu (Jukka)

Compositeur finlandais (Helsinki 1948).

Élève pour la composition de Paavo Heininen à l'Académie Sibelius et de Klaus Huber et Brian Ferneyhough à Fribourg, il a étudié également la musique électronique, la direction d'orchestre, le piano et le clavecin. Il a enseigné à l'Académie Sibelius et travaillé à l'I.R.C.A.M. (1978-1982) ainsi qu'au Massachusetts Institute of Technology (1989), dirigé la Biennale d'Helsinki en 1981 et 1983 et fondé le festival de musique contemporaine de Viitasaari, dont il a été le directeur artistique de 1981 à 1987. En se concentrant surtout sur le timbre et sur l'harmonie, et en utilisant largement les micro-intervalles, il a écrit notamment Prélude non mesuré pour piano (1976), qui fait appel à l'aléatoire, MXPZKL pour orchestre (1977), Passage pour soprano, ensemble de chambre et live electronics (1980), M pour clavecin, cordes et percussion (1980), L pour piano amplifié à 4 mains (1981), P = Pinocchio  ? pour soprano, ensemble de chambre et ordinateur (1982), Tokko pour chœur d'hommes et bande synthétisée par ordinateur (1987, premier prix de la Tribune internationale des compositeurs de l'UNESCO en 1988), Manaus pour kantele (1988), Puro pour clarinette et orchestre (1989), Arsenic et vieilles dentelles pour clavecin et quatuor à cordes (1990), Lume pour orchestre (1991), Halo pour orchestre (1994), Plus V pour accordéon et orchestre à cordes (1994).

tiento (espagnol dérivé du latin tentare)

Forme caractéristique très en faveur auprès des organistes espagnols des XVIe et XVIIe siècles, le tiento unit certaines des caractéristiques du prélude et du ricercare italien.

La première définition en a été donnée par Luis de Milán dans son traité El Maestro (1535) : « Cette musique, c'est comme essayer l'instrument, mêler les sonorités à des roulements. » L'organiste Correa de Arauxo en donne en 1626 une description beaucoup plus précise et détaillée. Selon lui, il s'agit d'une suite de courtes fugues se suivant sur des mélodies différentes. La raison d'être du tiento était de donner à l'organiste la possibilité de connaître les diverses possibilités d'un instrument.

   On distinguait au XVIIe siècle les tientos de bataille, genre très populaire qui décrivait musicalement les sons d'une armée en campagne avec imitations de trompettes, de tambours, du chant des soldats ; les tientos de lleno (de plein) où toutes les voix étaient utilisées tant en contrepoint qu'en accords pleins ; les tientos de falsa (de fausses) basés sur le jeu des dissonances ; les tientos de main droite ou de main gauche qui se jouaient le plus souvent en combinant les possibilités de l'orgue à registres coupés de façon qu'une moitié de ceux-ci servent à l'exposition de la mélodie et à ses ornements, tandis que l'autre moitié, de sonorité différente, se contentait d'accompagner en contrepoint. Cabezón, Correa, de Arauxo, Cabanilles comptent parmi les plus célèbres des auteurs de tientos. Une pièce pour orchestre intitulée Tiento a été composée en 1980 par Cristobal Halffter.

tierce

1. Intervalle produit, dans la gamme diatonique, entre deux notes distantes de trois degrés, départ et arrivée inclus. Selon les altérations employées, la tierce peut être normale ou déformée ; la tierce normale est selon les cas soit majeure divisible en deux tons, soit mineure divisible en un ton et demi, mais dans certains systèmes mélodiques, la tierce mineure peut être un intervalle incomposé, c'est-à-dire perçu directement sans se subdiviser intérieurement en ton + demi-ton, ce qui lui permet d'être employé comme intervalle conjoint (par exemple en pentatonique), ce qui n'est pas le cas de la tierce majeure.

   La tierce déformée peut être soit diminuée (ex. do dièse-mi bémol), ce qui, en tempéré, lui donne le même espace que le ton, mais compris différemment ; soit plus rarement augmentée (ex. do-mi dièse), ce qui lui donne le même espace que la quarte, mais compris différemment. La tierce déformée est toujours comprise comme un intervalle psychologiquement dissonant tendant vers sa résolution, même si, par le jeu du tempérament, sa sonorité matérielle est analogue à celle d'une consonance.

   La valeur acoustique de la tierce est différente selon le système dans lequel on l'envisage. En pythagoricien, système qui régit instinctivement la mélodie non harmonisée, la tierce est obtenue par le report de quatre quintes (ex. do-sol-ré-la-mi), ce qui donne à la tierce majeure un grand écartement (définition 81/64), tandis qu'en zarlinien, système qui régit l'entendement harmonique tonal, elle est obtenue directement par l'harmonique 5 (définition 5/4), ce qui la rend au contraire très basse ; le tempéré3 se situe entre les deux. La tierce mineure est la différence (logarithmique s'entend) entre la quinte et la tierce majeure prises l'une et l'autre dans le même système.

2. E n facture d'orgue,on donne le nom de tierce à un jeu de mutation faisant entendre soit la tierce majeure de la fondamentale, soit l'une de ses octaves, le plus souvent à deux octaves de distance, ce qui correspond à l'harmonique 5.

3. Dans la polyphonie populaire de Corse, et notamment dans la paghiella, on donne le nom de tierce (terza) à la voix la plus aiguë de la polyphonie à trois voix, les voix étant numérotées de bas en haut (bassu, segunda, terza).