Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
A

archet

Baguette, généralement en bois de Pernambouc, sur laquelle est tendue une mèche en crins de cheval, que l'on enduit de colophane.

Il permet de mettre en vibration les cordes des instruments à cordes frottées, comme le violon, le violoncelle, la viole. L'extrémité inférieure de l'archet, le « talon », comporte une hausse mobile qui permet de régler la tension de la mèche, grâce à une vis à écrou actionnée par un bouton. Pendant des siècles, la baguette eut un profil convexe, en arc, d'où le mot « archet ». La facture de l'archet a évolué progressivement, mais, depuis toujours, les meilleurs « archetiers » sont français.

Archilei (Vittoria) , dite la Romanina

Cantatrice italienne (Rome 1550-Florence apr. 1618).

Un des premiers grands noms de l'histoire du chant soliste, elle épousa Antonio Archilei, lui-même compositeur et luthiste. Appelée à Florence par les Médicis pour les noces d'Éléonore avec Vincenzo di Gonzaga, elle commenca une carrière glorieuse.

   Appartenant à la Camerata de Bardi, elle créa notamment la plupart des opéras de Peri et de Caccini. On peut constater, en lisant la préface de l'Euridice de Peri, que celui-ci l'avait en très haute estime.

archiluth

Terme désignant un groupe d'instruments à cordes pincées issus du luth : le théorbe, le luth théorbé et le chitarrone.

Inventés en Italie vers la fin du XVIe siècle, les archiluths répondaient au désir des luthistes chanteurs de posséder des cordes graves supplémentaires, afin de mieux soutenir la voix. L'instrument traditionnel à 6 cordes était conservé, mais il venait s'y ajouter des cordes graves (6 à 8), dites « sympathiques », montées hors manche. Ces cordes sonnaient à vide et étaient accordées dans la tonalité du morceau à interpréter. Parmi ces archiluths, seul le théorbe paraît avoir connu une vogue en France ; on y avait recours notamment pour jouer les basses continues. « Il ne faut pas s'étonner si plusieurs le préferrent au clavessin… » (S. de Brossard, Dictionnaire de la musique, 1703.)

arco

Dans une partition, après un passage joué par les instruments à cordes sans l'aide de l'archet, c'est-à-dire pizzicato, le terme arco indique que l'instrumentiste doit reprendre son archet.

Arcueil (école d')

En réaction contre la tendance agressive du groupe des Six, l'école d'Arcueil fut imaginée en 1924 par Maxime Jacob qui, associé à trois musiciens de ses amis, Henry Cliquet-Pleyel, Roger Désormière et Henri Sauguet, la plaça sous le patronage d'Erik Satie, lequel habitait précisément Arcueil. Ce groupe déclarait vouloir revenir à la simplicité, à la mélodie, à la pureté harmonique de Bach, tout en admettant les rythmes et les sonorités du jazz, voire l'esthétique du café-concert. Mais cette école d'Arcueil ne fut rien d'autre qu'une idée. Elle n'eut jamais de réalité juridique, de professeurs ou d'élèves, et se contenta d'attirer l'attention du public sur quatre musiciens, qui, groupés autour de Satie, conservèrent chacun leur personnalité. La vie sépara vite ses membres : Satie mourut en 1925 ; Jacob, particulièrement doué, rentra dans les ordres ; Cliquet-Pleyel s'orienta vers la musique légère et la musique de film ; Désormière abandonna très vite la création pour se consacrer uniquement à la direction d'orchestre. Seul, Sauguet poursuivit une heureuse et longue carrière de compositeur, fidèle au conseil de Satie : « Marchez seuls. Faites le contraire de moi. N'écoutez personne ! ».

Arenski (Antoni Stepanovitch)

Compositeur russe (Novgorod 1861 – Terioki, Finlande, 1906).

Élève de Rimski-Korsakov au conservatoire de Saint-Pétersbourg, Arenski fut nommé professeur d'harmonie et de contrepoint au conservatoire de Moscou (1882). On lui doit, à ce titre, un Traité d'harmonie (1891) et un ouvrage sur les Formes musicales (1893-94). Par la suite, il succéda à Balakirev à la tête de la chapelle impériale (1895-1901). Fortement influencé par Tchaïkovski, Arenski semble n'avoir pas « donné toute la mesure de son très grand talent » (M.-R. Hofmann), et, malgré une nature généreuse et sensible qui se complaît dans les tonalités du mineur, ses œuvres sont souvent d'inégale valeur.

Œuvres principales :

Musique instrumentale : 2 symphonies ; 1 quatuor à cordes (dédié à Tchaïkovski) ; une centaine de pièces pour piano, dont 3 suites pour 2 pianos ; Nuit d'Égypte, ballet (1900).

Œuvres lyriques et vocales : 3 opéras : Un songe sur la Volga (1892), Raphael (1894) ; Nal et Damayanti (1904) ; 1 cantate : la Fontaine de Bakhtchissarai (d'après Pouchkine).

Argenta (Ataulfo)

Pianiste et chef d'orchestre espagnol (Castro Urdiales, Santander, 1913 – Los Molinos, Madrid, 1958).

Après des études au conservatoire de Madrid, puis à Liège et à Berlin, il enseigna le piano au conservatoire de Kassel. Appuyé par Carl Schuricht, il s'orienta ensuite vers la direction d'orchestre et fonda l'Orchestre de chambre de Madrid. En 1947, il fut chargé de la direction de l'Orchestre national d'Espagne.Spécialiste des grands romantiques de la musique allemande, mais aussi des compositeurs espagnols, Ataulfo Argenta sut imposer un art à la fois sensible, dépouillé et empreint d'une fierté tout espagnole.

argentine (République)

La musique européenne, connue et pratiquée très tôt en Argentine, se mêla, au début, aux musiques autochtones, cependant qu'instruments indigènes et instruments importés coexistaient. Le mélange des deux cultures peut être symbolisé par le charango, petite guitare construite avec la carapace d'un tatou. Les missionnaires musiciens ­ parmi lesquels on compte au moins un grand compositeur, Domenico Zipoli, qui mourut à Córdoba en 1726 ­ répandirent la musique d'orgue et l'ensemble de la musique sacrée. L'opéra fut introduit plus tard, mais connut dans la deuxième moitié du XIXe siècle un essor exceptionnel. Un peu avant 1900 et au début du XXe siècle, le Teatro Colón de Buenos Aires eut peut-être les plus brillantes distributions du monde entier. Mais entre-temps avait commencé à se constituer, très lentement, l'école argentine. Celle-ci a recherché son orientation dans l'utilisation d'un folklore exceptionnellement riche et varié. J.-P. Esnaola (1808-1878), qui fonda l'Académie de musique de Buenos Aires, pourrait en être le premier représentant. Mais c'est à l'époque d'Alberto Williams (1862-1952) et d'Arturo Berutti (1862-1938) que cette école doit son essor décisif. Le premier, élève de Durand, Godard, Guiraud et Franck à Paris, directeur du conservatoire de Buenos Aires et animateur de la vie musicale, a laissé une œuvre considérable, souvent inspirée de motifs populaires (notamment 9 symphonies), et de nombreux ouvrages didactiques. Le second, formé à Leipzig, fut un éminent professeur et un compositeur fécond (7 opéras, dont plusieurs d'inspiration nationale). L'intérêt qu'ils ont, l'un et l'autre, suscité auprès des jeunes musiciens pour une exploitation de la veine folklorique a conditionné toute la production argentine de plusieurs générations, chacun renouvelant sa technique d'écriture à la faveur des plus récentes découvertes : néoromantisme pour la plupart des compositeurs nés avant le siècle (Gaito, Ugarte, Aguirra, Sicardi, Drangosch, Gilardi, Gómez-Carrillo), esprit franckiste pour d'anciens élèves de la Schola ou de d'lndy (Celestino Piaggio, Juan José Castro), néo-impressionnisme pour Carlo Lopez Buchardo, disciple de Albert Roussel, pour Arnaldo d'Esposito, Carlos Guastavino ou Elsa Calcagno.

   C'est grâce à Juan Carlos Paz (1897-1972) que l'atonalisme et le dodécaphonisme ont été connus en Argentine. Fondateur des groupes Renovación (1929) et Nueva Música (1944), professeur, pianiste et animateur, il a profondément influencé l'activité musicale à Buenos Aires en révélant les grandes œuvres contemporaines ; ses propres compositions restent, pour la plupart, fidèles à l'orthodoxie schönbergienne. Secondé, après la dernière guerre, par l'Autrichien Michael Gielen, chef d'orchestre au Theatro Colón, il a été l'un des maîtres à penser de Mauricio Kagel, alors élève de Ginastera. Né en 1931, fixé en Europe depuis 1957, Kagel, l'un des aventuriers les plus intrépides de l'avant-garde internationale, représente beaucoup moins l'Argentine contemporaine que son maître, dont l'éclectisme va du nationalisme objectif, fondé sur le folklore, à l'utilisation des techniques les plus aptes à traduire le monde fantastique qu'il rêve d'évoquer par des sons. C'est que l'école de Buenos Aires poursuit, aujourd'hui encore, les traditions d'Alberto Williams et de ses disciples. Rodolfo Arizaga (élève de Nadia Boulanger et de Messiaen), Valdo Sciammarella, Roberto Caamano ou Silvia Einsenstein n'ont pas trahi l'esprit d'un art national.