Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
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Kelly (Michael O')

Chanteur et compositeur irlandais (Dublin 1762 – Londres 1826).

Il étudia à Londres avec Morland, Arne, Cogan et Passerini, puis à Naples avec Aprile, avant de s'y faire entendre sous le nom d'Occhelli, avec un très grand succès. Fixé, pendant quatre ans, à Vienne comme ténor au théâtre de la Cour, il y devint l'ami de Mozart et créa les rôles de Don Basilio et de Don Curzio des Noces de Figaro. De retour en Angleterre, il y connut des triomphes comme chanteur de théâtre et de concert et fut, un temps, impresario du théâtre royal. Sa carrière de compositeur commença alors, lui donnant l'occasion d'écrire plus de 60 partitions destinées à la scène, des ballets, des cantates et des mélodies. Il fonda, en 1802, une librairie musicale, fit faillite et devint marchand de vins. Son livre de souvenirs, Reminiscences of the King's Theatre (Londres, 1826 ; rééd., 1975), contient des renseignements précieux sur les compositeurs qu'il connut, tels Mozart et Haydn, ainsi que sur la vie musicale à Vienne, à Paris et surtout en Angleterre avant et après 1800.

Kelterborn (Rudolf)

Compositeur suisse (Bâle 1931).

Il a fait ses études à Bâle, à Salzbourg, à Detmold et à Zurich, et a enseigné la théorie musicale à Bâle jusqu'en 1960. Il a été ensuite professeur de composition et d'analyse à l'Académie de musique de Detmold (1960-1968), puis à l'École supérieure de musique et au conservatoire de Zurich (1968-1975). De 1975 à 1980, il a dirigé le département de la musique de la radio suisse alémanique et rhéto-romane à Bâle. Depuis 1980, il enseigne de nouveau à Zurich ainsi qu'à l'École supérieure de musique de Karlsruhe (théorie et composition).Dans un style ne dédaignant pas les techniques sérielles, il a écrit notamment 3 symphonies (1967, 1969, 1976), dont la dernière, dite Espansioni, avec baryton et bande magnétique, 4 quatuors à cordes (1954, 1956, 1962, 1970), le ballet Relations (1975), Phantasmen (1965-66), Changements (1973) et Erinnerungen an Orpheus (1979) pour orchestre, Visions sonores pour 6 groupes de percussions et 6 instruments obligés (1980), l'oratorio Die Flut (1965), d'après la traduction de la Bible de Martin Buber, et les opéras Die Erretung Thebens (Zurich, 1963), Kaiser Jovian (Karlsruhe, 1967) et Ein Engel kommt nach Babylon (Zurich, 1977), d'après Dürrenmatt.

Kempe (Rudolf)

Chef d'orchestre allemand (Niederpoyritz, Saxe, 1910 – Zurich 1976).

Il étudia le piano, le violon et le hautbois à Dresde et fit ses débuts de chef d'orchestre en 1935 à l'Opéra de Leipzig avec un succès tel qu'il accéda aussitôt au poste de répétiteur dans cet établissement. Il poursuivit sa carrière aux Opéras de Chemnitz (1942), Weimar (1948), Dresde (1949-1952), et enfin Munich, où il succéda à Georg Solti (1952-1954). Sa renommée devint internationale lorsqu'il eut programmé la saison 1951-52 de l'Opéra de Vienne, et dirigé, dans cette ville, le Ring de Wagner. Il débuta à Covent Garden en 1953, au Metropolitan Opera de New York en 1954, à Bayreuth en 1960. Cette même année, à la demande de sir Thomas Beecham, il devint chef associé du Royal Philharmonic Orchestra, et, l'année suivante (1961), à la mort de sir Thomas, fut nommé principal chef de cette formation. Il démissionna en 1963, mais en redevint chef à vie en 1970 (il démissionna de nouveau, pour raisons personnelles, en 1975). Il fut aussi, jusqu'à sa mort, président de la Sir Thomas Beecham Society. On le vit également à la tête de l'orchestre de la Tonhalle de Zurich (1965-1972), de la Philharmonie de Munich (1976), et comme successeur de P. Boulez à celle de l'Orchestre symphonique de la BBC. Chef sobre, puissant et efficace, il a laissé de remarquables enregistrements parmi lesquels les Maîtres chanteurs de Wagner, Ariane à Naxos et l'œuvre orchestrale de Richard Strauss et plusieurs symphonies de Bruckner.

Kempff (Wilhelm)

Pianiste allemand (Jüterborg 1895 – Positano, Italie, 1991).

Issu d'une famille d'organistes luthériens, il manifeste dès l'âge de cinq ans des dons musicaux exceptionnels. Son père l'initie au chant choral et à l'orgue et I. Schmidt-Schlesicke lui donne ses premières leçons de piano. En 1905, il suit, à la Hochschule für Musik de Berlin, l'enseignement du compositeur R. Kahn et du pianiste H. Barth, dépositaire de la grande tradition lisztienne. Malgré des succès précoces ­ en 1907, un premier récital ; en 1910, une audition réussie devant Busoni et Dohnanyi ­, Wilhelm Kempff termine ses études de philosophie et de musique, celles-ci couronnées en 1916 par le prix Mendelssohn (piano et composition), avant de se lancer dans la carrière. En 1917-18, il effectue deux tournées en Allemagne et en Scandinavie, comme pianiste et organiste accompagnant le chœur de la cathédrale de Berlin. Puis il donne un récital à la Singakademie de Berlin (avec, notamment, la sonate Hammerklavier de Beethoven et les Variations sur un thème de Paganini de Brahms), et fait des débuts de concertiste avec la Philharmonie de Berlin dirigée par A. Nikisch. En 1920, après une tournée triomphale en Scandinavie, il enregistre son premier disque : des Écossaises et des Bagatelles de Beethoven. Il dirige, de 1924 à 1929, la Staatliche Hochschule für Musik de Stuttgart. Il donne des cours d'été, à partir de 1931, à Potsdam, en compagnie de E. Fischer et de W. Gieseking.

   Mais le pédagogue et le compositeur (auteur d'un Mystère sur la vie du Christ, 1925, et d'un opéra, le Roi Midas, 1930) s'effacent bientôt devant l'interprète : le chef d'orchestre occasionnel (il dirige, en 1928, l'Art de la fugue de Bach), l'organiste féru d'improvisations, le chambriste partenaire de G. Kulenkampff et de Lotte Lehmann, et surtout le pianiste. Il joue notamment en Grèce, en Amérique du Sud, au Japon et à Paris en 1938. Contraint à une semi-retraite dans l'immédiat après-guerre, Wilhelm Kempff retourne à la composition et rédige ses Mémoires (Cette note grave, Paris, 1955). En 1951, il réalise sa première intégrale des sonates de Beethoven. À partir de 1954, après une tournée-pèlerinage au Japon (il joue Bach à l'orgue de l'Église de la paix universelle d'Hiroshima), sa carrière se partage équitablement entre récitals, musique de chambre (ses partenaires ont pour noms P. Fournier, Y. Menuhin, P. Casals à Prades, etc.), cours d'été à Positano depuis 1957 (consacrés à Beethoven) et enregistrements.

   Au cours des dernières années, assombries par la maladie, Kempff revient à Bach, après avoir servi scrupuleusement Beethoven et fait redécouvrir les sonates de Schubert. Le compositeur voit son œuvre servie par les plus grands, G. Kulenkampff, Van Kempen, W. Furtwängler, etc. Quatre opéras, deux symphonies, deux quatuors à cordes, un concerto pour violon, un autre pour piano, une Passion allemande et un Mystère sur la naissance du Seigneur en sont les pages les plus marquantes. Même dans le répertoire romantique, le pianiste n'a jamais oublié les leçons de clarté et de rigueur apprises par l'organiste. Improvisateur-né, il a su plier une technique brillante aux exigences de chaque œuvre. Son art, vigoureux et passionné, s'est fait, avec le temps, plus sincère, plus subtil, prenant le ton de la confidence familière. Sa science du phrasé et le toucher nuancé à l'extrême sont au service d'un chant et d'une émotion décantés jusqu'à l'innocence.