Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
K

Knussen (Olivier)

Compositeur anglais (Glasgow 1952).

Fils d'un contrebassiste, il commença à composer dès l'âge de six ans et fit entendre sa première symphonie (1966-67) à quinze ans. La deuxième, pour soprano et orchestre de chambre, date de 1970-71, la troisième de 1973-1979 (création, Londres, 1979). Aux sonorités massives de cette dernière œuvre s'oppose le côté linéaire et souple de certaines partitions de musique de chambre comme Masks pour flûte (1969), ou Océan de terre pour petit ensemble, d'après Apollinaire (1972-73 ; rév., 1976). À l'Opéra de Bruxelles ont été créés en novembre 1980 Where the Wild Things Are, fantaisie en 2 actes sur un livret de M. Sendak (1979-80), et à Glyndebourne en 1985 Higglety Pigglety Pop !.

Koch (Erlandvon)

Compositeur et organiste suédois (Stockholm 1910).

Ses études le mènent en Allemagne et en France. Il est influencé par la vague néoclassique des années 30 et par la musique folklorique suédoise. En 1943, son style évolue (Capriccio nordique) et devient plus contrapuntique. Il a écrit 4 symphonies, 6 quatuors à cordes, 3 concertos pour piano et, entre 1964 et 1966, sa trilogie pour orchestre : Impulsi, Echi et Ritmi.

Koch (Heinrich Christoph)

Théoricien et violoniste allemand (Rudolstadt 1749 – id. 1816).

Il étudia le violon et la composition à Rudolstadt, Berlin, Dresde et Hambourg, puis occupa un poste de premier violon à Rudolstad. À partir de 1772, il se consacra essentiellement à ses écrits théoriques. Parmi ceux-ci, deux ouvrages apparaissent, en leurs genres respectifs, comme les plus importants de l'ère classique viennoise à son apogée : Versuch einer Anleitung zur Composition (Essai de méthode de composition, Rudolstadt et Leipzig, 1782-83 ; rééd., 1969), et Musikalisches Lexikon (Lexique musical, Francfort, 1802 ; version abrégée, Leipzig, 1807). Le Versuch, en trois volumes, traite aussi bien des principes harmoniques de base que de la périodicité mélodique et de la composition d'un mouvement entier de symphonie. Le Lexikon est un dictionnaire de termes musicaux. On trouve également dans les deux ouvrages des considérations esthétiques.

Kochan (Günter)

Compositeur allemand (Luckau 1930).

Élève de Boris Blacher et de Hans Eisler, il occupe une place très officielle dans la vie musicale de la République démocratique allemande et enseigne depuis 1950 la théorie à l'École supérieure de musique de Berlin-Est. Il a écrit de nombreux ouvrages pour la jeunesse et pour le grand public, comme la cantate Die Welt ist jung (1951), et s'est forgé un langage classique dans la lignée de Eisler, Chostakovitch et Bartók avec, par exemple, son Concerto pour violon (1952), son Concerto pour alto (1974) et ses quatre symphonies, dont la première et la troisième avec soprano et chœurs (1964, 1968, 1972, 1983-1984).

Köchel (Ludwig Aloïs Friedrich, chevalier von)

Savant et musicographe autrichien (Stein an der Donau, Basse-Autriche, 1800 – Vienne 1877).

Docteur en droit, il s'était acquis également une réputation européenne en botanique et en minéralogie. Il fut le précepteur des quatre fils de l'archiduc Karl de 1827 à 1842, année où il fut anobli. Après avoir été Schulrat à Salzbourg (1850-1852), il se consacra à la musicologie et en particulier à Mozart, dont il établit le catalogue chronologique et thématique de toutes les œuvres (Chronologisch thematisches Verzeichnis Sämtlicher Tonwerke, Leipzig, 1862). Il rassembla une quantité importante de matériel d'origines diverses (dont une partie lui fut fournie par son ami Otto Jahn, à qui il dédia son travail), mais sa tâche la plus ardue consista à établir rigoureusement l'ordre chronologique des œuvres, puisque beaucoup étaient encore autographes. Il rédigea ensuite un bref commentaire stylistique pour chaque pièce et fournit un appendice donnant la liste des œuvres et des fragments perdus ou d'attribution douteuse.

   À partir de ces recherches, il publia en 1862 un article important : Uber den Umfang der musikalischen Produktivität W. A. Mozarts, qui servit de préambule au catalogue. Les révisions de celui-ci, par Paul Waldersee en 1905, puis par Alfred Einstein, en 1937 et en 1947, le complétèrent et le corrigèrent de façon substantielle. L'éditeur Breitkopf und Härtel fit paraître encore en 1951 Der Kleine Köchel, abrégé de l'édition de 1937. Une nouvelle révision intervint en 1964 (Franz Giegling, Alexander Weinmann, Gerd Sievers). On doit également à Köchel un important ouvrage sur Johann Joseph Fux (Vienne, 1872).

Kocsis (Zoltán)

Pianiste hongrois (Budapest 1952).

Il commence ses études de piano à l'âge de six ans et entre en 1963 au Conservatoire Béla Bartók, où il étudie la composition et le piano. De 1968 à 1970, il se perfectionne à l'Académie de musique Franz Liszt auprès de P. Kadosa et F. Rados. Premier prix en 1970 du concours Beethoven de la radio hongroise, prix Franz Liszt en 1973, il commence à donner des concerts dans toute l'Europe. En 1977, il donne avec S. Richter un récital de piano à quatre mains, participe aux Semaines internationales de musique de Lucerne, remplace M. Pollini à la Grange de Meslay. En 1976, il est nommé professeur à l'Académie Franz Liszt de Budapest. Il fonde en 1983 l'orchestre du Festival de Budapest, dirigé par Ivan Fischer. Parallèlement au répertoire romantique (Liszt en particulier), il s'intéresse à la musique contemporaine et a assuré la création d'œuvres de G. Kurtag.

Kodály (Zoltán)

Compositeur hongrois (Kecskemét 1882 – Budapest 1967).

Issu d'une famille musicienne (son père était violoniste amateur, sa mère, pianiste), ouverte aux influences tziganes, pratiquant la musique de chambre, il fit ses études secondaires à Galanta, puis à Nagyszombat (aujourd'hui Trnava, en Slovaquie), où il chantait dans les chœurs de la cathédrale et rendait fréquemment visite à la bibliothèque musicale. Il apprit le violoncelle en autodidacte, et s'installa à Budapest pour y poursuivre des études supérieures de lettres. Il s'inscrivit alors dans la classe d'H. Koessler (composition) à l'académie Franz-Liszt, où il rencontra Béla Bartók, qui, jusqu'à sa mort (1945), devait rester son plus fidèle ami. Kodály devint professeur diplômé en 1905, et décida d'enquêter dans les campagnes hongroises, comme suite à sa thèse de doctorat sur la structure « strophique » des chansons populaires. Docteur ès lettres en 1906, il se rendit à Paris, y suivit les cours de Ch. M. Widor au Conservatoire et découvrit l'univers debussyste. Il écrivit alors sa Méditation sur un motif de Claude Debussy pour piano (1907). Professeur de théorie musicale à l'académie Franz-Liszt en 1907, il y enseigna jusqu'en 1940 et y fut chargé d'une classe de composition dès 1908. Dès 1906, il réalisa avec Bartók, puis avec Emma Sandor, qu'il épousa le 3 août 1910 et qui allait être sa compagne et collaboratrice un demi-siècle durant, des études systématiques pour recueillir et noter les mélodies paysannes hongroises. Son activité simultanée de compositeur, de pédagogue, de folkloriste, de musicologue, et de journaliste fit de lui le maître à penser de la musique hongroise contemporaine. En 1921, les éditions Universal de Vienne achetèrent le droit exclusif d'édition de ses compositions. En 1925, un concert de ses œuvres pour chœur d'enfants le révéla comme un maître incontesté du contrepoint vocal.

   Farouche figure du nationalisme culturel de la Hongrie, inventeur de méthodes d'enseignement de la musique permettant une initiation au chant choral dès le plus jeune âge, patriarche vénéré et entré dans l'histoire de son vivant, Kodály sut se faire respecter des contre-révolutionnaires du comte Horty, comme des autorités nazies pendant la dernière guerre. Trois fois prix Kossuth, membre correspondant de toutes les grandes universités mondiales, président de l'International Folk Music Council, il fut le plus éminent représentant de l'humanisme culturel de son pays pendant plus d'un demi-siècle.

   Son œuvre, du point de vue de l'auditeur occidental, peut approximativement se diviser en deux ensembles. L'un regroupe les partitions de forme classique où Kodály fait la synthèse de la tradition allant de Bach à Debussy, en passant par Beethoven, Brahms et Wagner. L'autre, les quelque 1 500 pièces chorales consignées par lui-même dans un souci d'abord didactique : l'art d'un Palestrina s'y revivifie au contact des composantes mélodiques et rythmiques de la chanson populaire hongroise.

   L'activité créatrice de Kodály intéresse d'abord la musique de chambre, avec deux Quatuors à cordes (1908-1909, 1916-1918), un Duo pour violon et violoncelle (1914), une Sérénade (1918-1920) pour deux violons et alto et surtout deux étonnantes Sonates pour violoncelle, l'une avec piano (1909-10), l'autre pour violoncelle seul (1915). Dans cette dernière partition, l'instrument devient harpe, cithare, orchestre tzigane, tout en conservant son lyrisme grandiose dans la tradition de Bach.

   Kodály parvint à la notoriété internationale en faisant jouer ses œuvres par les membres du Quatuor Waldbauer-Kerpely à Salzbourg, Vienne, Amsterdam… En 1923, la création du Psalmus hungaricus l'imposa au public hongrois comme chantre de la tradition héroïque de son peuple. Dans cette même veine, suivirent un Te Deum (de Budavar, 1936), créé pour le 250e anniversaire de la libération de Buda de la domination turque, une Missa brevis (1944) et le Psaume de Genève no 114 (1952).

   Sa musique symphonique doit à Toscanini son succès international. Soir d'été (1906) fut remanié en 1929-30. Des Danses de Marosszek (1930), l'original pour piano demeure l'un des sommets de la musique pour clavier. En 1927, naquirent deux œuvres brillantes : la suite d'orchestre tirée de Hary Janos et l'Ouverture de théâtre. Toscanini fit ensuite connaître les Danses de Galanta, créées à Budapest en 1933. Wilhelm Mengelberg créa en 1939 les Variations sur une mélodie populaire hongroise (Le paon s'est envolé), dédiées au Concertgebouw d'Amsterdam, tandis que F. Stock donnait à Chicago la première du Concerto pour orchestre (1941). Enfin, F. Fricsay dirigea au festival de Lucerne (1961) la première de la Symphonie en ut, dédiée à la mémoire de Toscanini.

   Le style orchestral de Kodály, apparemment conservateur, est d'une grande unité : rythmique hongroise, harmonie modale naturelle, structure classique, procédés impressionnistes. Sa musique exprime souvent gaieté, santé, exubérance, des idées proches de celles d'un Janáček qui tranchent avec le romantisme allemand, dont il ne reprend que la grammaire et non l'humeur sombre et les volontés autobiographiques.

   Il est encore bien difficile de cerner l'œuvre chorale immense de Kodály : cinq Tantum ergo (1928), dix mélodies (Lengyel Làszlo, Pünküsdölö, 1929), les quatre cahiers des Bicinia hungarica, bible du chant pour chorale d'enfants (1937-1942), la fresque grandiose des Tableaux de Matra, pour chœur mixte a cappella (1931) les Chants de Karad, Le paon s'est posé, l'Appel de Zrinyi, etc. Quelques exemples d'une œuvre extrêmement variée, utilisant chansons, ballades, contes, mélodies populaires, reprenant, avec l'accent magyar, des scènes de la vie paysanne, des thèmes bibliques ou héroïques.

   Ses œuvres scéniques, parmi lesquelles Hary Janos (1925-26) et Soirée des fileuses sicules (Fileuses de Transylvanie, 1924 ; rév. 1932, 1948), montrent le souffle épique, picaresque ou dramatique, dont il était capable. Aujourd'hui, l'héritage culturel de Kodály est d'une telle richesse qu'il faudra attendre la pénétration de la méthode Kodály dans notre enseignement musical pour que les futures générations aient pleinement conscience de l'apport privilégié fait par ce compositeur à la musique savante en faisant la synthèse de la tradition de Bach et Palestrina et des tournures naturelles de la mélodie populaire. Kodály restera sans doute comme le créateur de l'art choral du XXe siècle.