marché

(latin mercatus, de mercari, acheter, de merx, mercis, marchandise)

Vente de produits issus de l'agriculture biologique
Vente de produits issus de l'agriculture biologique

Terme désignant, à l'origine, l'accord passé entre le vendeur et l'acheteur d'une marchandise, le mot marché désigne par extension le lieu où s'opèrent les transactions, le cadre dans lequel s'effectuent les échanges, et la nature de l'objet des transactions (marchés agricoles, marché monétaire). Les marchés peuvent être plus ou moins étendus dans l'espace. On peut distinguer un marché local ou régional, de dimension restreinte, et un marché national, concentré dans les limites territoriales des nations. La mondialisation des économies s'est traduite par l'émergence d'un espace planétaire pour certaines productions (matières premières, produits manufacturés, technologies de l'information, biens culturels).

Marchés traditionnels et grandes surfaces

Le marché traditionnel est constitué par le rassemblement, à jours fixes, de commerçants. Il subsiste en de nombreux endroits, y compris dans les quartiers de grandes villes. Il tend toutefois à être concurrencé par les magasins à grandes surfaces : supermarchés et hypermarchés.

Les supermarchés sont des magasins de vente au détail, en libre-service, de produits alimentaires et de produits non alimentaires d'utilisation courante ; leur surface de vente varie entre 400 et 2 500 m2. Les hypermarchés proposent en libre-service des marchandises générales et des produits alimentaires. Ils comprennent également des boutiques et différents services tels que snack-bar, cafétéria, restaurant, centre-auto et centre-jardinage ; leur surface de vente est supérieure à 2 500 m2. (→ commerce)

Les marchés, objets de transactions

Les principaux marchés agricoles sont, sur le plan national, ceux de la viande, des produits laitiers, des fruits et légumes. Sur le plan international, les deux marchés les plus importants sont ceux du blé et des céréales secondaires, suivis par ceux de la viande, du riz, des matières grasses, des produits tropicaux et du sucre. Les aléas de la production agricole ont conduit les pouvoirs publics, ainsi que les professionnels, à mettre en place des dispositifs d'intervention sur le marché agricole, afin d'éviter des déséquilibres trop prononcés entre l'offre et la demande.

Sur le marché des capitaux, deux agents économiques jouent un rôle prépondérant : la banque et la Bourse. Plusieurs appellations sont utilisées pour définir les conditions dans lesquelles les transactions s'effectuent : marché au comptant ou à terme, marché à prime (versement d'une prime en cas d'annulation du marché), marché ferme (droit pour l'acheteur d'exiger la livraison). Le marché officiel est celui qui fonctionne par l'intermédiaire des agents de change, sur les valeurs cotées en Bourse. Le marché libre est celui où les banquiers négocient les valeurs sans cote officielle.

Le marché monétaire a été, à l'origine, une création des banques, désireuses de compenser entre elles leurs excédents et leurs déficits quotidiens. Il s'est ensuite élargi pour devenir un marché de capitaux à long terme. Il constitue le principal domaine d'intervention de la Banque de France, car il lui permet d'assurer l'ajustement des trésoreries bancaires tout en veillant à l'équilibre monétaire interne et en préservant l'économie nationale des mouvements de capitaux inopportuns. En France, le marché monétaire se tient à Paris, où les grandes banques centralisent leur trésorerie. Les intermédiaires (maisons de réescompte ou courtiers en banque) déterminent le taux du marché, qui dépend étroitement de celui que la Banque de France applique (laquelle voit une large part de ses pouvoirs transférée à la Banque centrale européenne [B.C.E.] depuis 1999).

Le marché du travail, au début limité aux Bourses du travail, regroupe aujourd'hui l'ensemble des disponibilités en main-d'œuvre, à l'échelle locale, nationale ou internationale.

ÉCONOMIE

Le terme marché renvoie au système économique qui sert de cadre aux échanges commerciaux : ainsi, on parle d’économie de marché pour désigner un système d'organisation économique dans lequel les mécanismes naturels tendent à assurer seuls l'équilibre de l'offre et de la demande (à l'exclusion de toute intervention des monopoles ou de l'État).

La structure des marchés

La naissance de l'économie politique et ses développements ultérieurs en tant que discipline autonome sont étroitement marqués par le projet libéral : justifier le « laisser-faire » en montrant la supériorité du système des marchés sur toute autre forme d'organisation de la production et des échanges. Or, on peut se demander comment un fonctionnement harmonieux du système économique pourrait résulter de l'action décentralisée d'individus isolés, libres et égaux, guidés par leur intérêt personnel. À la fin du xviiie s., l'économiste d'origine écossaise Adam Smith a recours à l'image célèbre de la « main invisible » qui guide chacun, sans qu'il en ait conscience, vers le meilleur état possible pour la société. Depuis lors, les économistes libéraux (classiques puis néoclassiques) s'attachent à forger un concept théorique pour aller au-delà de cette image : puisque la socialisation des individus s'accomplit à l'occasion de l'échange, c'est donc sur le marché, lieu de l'échange, que sont conciliées leurs décisions contradictoires.

L'économie de marché « pure » correspond à cet idéal théorique où le marché laissé à son libre fonctionnement assure les productions, les distributions et les répartitions les meilleures possible. Mais, dans la réalité, les économies de marché ne connaissent pas de situations purement concurrentielles et se caractérisent par la présence d'oligopoles ou de monopoles.

Le marché de « concurrence pure et parfaite »

Le marché de concurrence pure et parfaite est une construction théorique forgée par les économistes néoclassiques. Il repose, en partie, sur la loi de l'équilibre général, développée par Léon Walras (1834-1910) et complétée par Vilfredo Pareto (1848–1923), et sur d'autres contributions ultérieures. Il est articulé autour de cinq contraintes, dites walrasso-parétiennes. Les trois premières définissent la concurrence pure et les deux dernières, la concurrence parfaite. La réunion de ces cinq conditions aboutit à la concurrence pure et parfaite.

La première condition suppose l'atomicité de l'offre et de la demande, c'est-à-dire un grand nombre de vendeurs et de consommateurs tous égaux face au marché. Aucun intervenant ne peut influer, d'une quelconque façon, sur le niveau et le prix des transactions. Les entreprises acceptent les prix du marché ; elles sont en position de price takers mais non de price makers. La deuxième condition est liée à l'homogénéité des produits. Tous les produits sont identiques ; aucune caractéristique (emballage, marque) ne les différencie. La troisième condition est définie par la libre entrée dans l'industrie. Une nouvelle entreprise peut toujours s'ajouter aux centres de production déjà présents sur un marché : il n'existe pas de « barrières à l'entrée ».

Les deux dernières conditions de la concurrence parfaite sont : la transparence du marché relative à l'information des acheteurs et des vendeurs ; la fluidité du marché, c'est-à-dire la mobilité des facteurs de production (ce qui signifie la liberté d'entrée et de sortie du travail et du capital par rapport à une activité économique déjà existante).

Les marchés monopolistiques et oligopolistiques

Les marchés réels sont forcément des « marchés imparfaits », car ils ne peuvent que s'écarter de la logique de la concurrence pure et parfaite en raison, le plus souvent, d'une insuffisante atomicité de l'offre. Le faible nombre de vendeurs les amène à dominer les marchés et à imposer leurs prix aux consommateurs. Tel est notamment le cas du monopole et de l'oligopole.

Le monopole met en présence un vendeur unique face à la multitude des consommateurs. L'existence d'un monopole s’oppose à l’atomicité de l’offre mais aussi à la libre entrée dans l’industrie, puisque le marché est occupé par une seule entreprise.

L’oligopole, le cas le plus fréquent, réunit quelques très grandes entreprises, souvent d’envergure internationale, face à la multitude des consommateurs.

Le marché et la régulation de l’activité économique

La parabole de la « main invisible »

Selon Adam Smith, les économies modernes se caractérisent par la division du travail, chaque producteur se spécialisant dans la fabrication d'un produit particulier qu'il vend sur le marché contre une certaine quantité de monnaie avec laquelle il achète ce qu'il ne produit pas lui-même. Les mécanismes du marché dans une situation de concurrence (chaque producteur doit rivaliser avec tous les autres pour satisfaire le client) induisent un équilibre général entre les besoins des différents agents économiques. Le producteur qui chercherait à s'enrichir en s'épargnant la peine de répondre aux besoins des consommateurs, ou en pratiquant des prix prohibitifs, serait condamné à quitter l'espace du marché et donc à disparaître. Ainsi, en servant ses intérêts égoïstes, c'est-à-dire en recherchant le profit le plus élevé possible, le producteur est, presque malgré lui, incité à pourvoir aux besoins de la collectivité – comme s'il était mû par une « main invisible ».

La formation des prix

L'une des fonctions fondamentales du marché est d'assurer la formation des prix. C'est à l'économiste britannique John Stuart Mill (1806-1873) qu’il reviendra de formuler la loi de l'offre et de la demande dans ses Principes d’économie politique (1848).

La « loi de la demande » suppose que la demande d’un bien varie en fonction inverse de son prix : moins un produit est cher, plus les consommateurs sont nombreux à vouloir l’acquérir. Certains produits échappent cependant à la loi de la demande, comme les biens de première nécessité, qui sont achetés quel que soit leur prix (produits alimentaires), ou les produits de luxe, destinés aux catégories sociales les plus favorisées qui souhaitent afficher leurs capacités pécuniaires.

La « loi de l'offre » postule que l'offre d'un bien s'accroît au fur et à mesure de l'augmentation de son prix. La rencontre entre les quantités offertes et les quantités demandées, dans un climat de libre négociation des vendeurs et des acheteurs, permet d'aboutir à la formation d'un prix d'équilibre.

Les limites du marché

Les « externalités » économiques

Il existe des comportements économiques dont les conséquences se font sentir en dehors du marché et du système des prix ; aussi les désigne-t-on sous le terme d’« externalités ». Certaines externalités sont positives et se traduisent par un gain pour ceux qui en bénéficient. Ainsi, la transformation d'un terrain vague en jardin public accroît la valeur marchande des immeubles qui l'entourent. En revanche, il existe des « déséconomies » externes, par essence négatives, qui entraînent une perte de jouissance pour certains agents économiques – c’est le cas de la pollution produite par une entreprise de transformation.

L’existence d’externalités remet en cause le marché dans la fonction qui consiste à assurer une juste répartition de la valeur en fonction de la seule rencontre entre l’offre et la demande. Pour remédier à cette lacune de l’économie de marché, l’économiste néoclassique Arthur Cecil Pigou (1877-1959) souhaitait que l’on puisse « internaliser » les externalités en subventionnant les producteurs d’économies externes et en taxant les producteurs de « déséconomies » externes.

Les biens collectifs

Adam Smith assigne à l'État, en dehors des fonctions régaliennes qui sont celles de la puissance publique, la mission de produire des biens à usage collectif, tels que les infrastructures de communication (routes, ports, canaux). Indispensables à la croissance économique et au développement, favorables au bien-être de la collectivité, ces biens échappent à la logique de l'économie de marché, car leur prix ne peut résulter de la confrontation de l'offre et de la demande. Le financement des biens collectifs est alors assuré par les pouvoirs publics au moyen des recettes fiscales. Les biens collectifs sont ainsi des biens « hors marché », et leur production semble justifier l'existence d'une économie publique indépendante des mécanismes associés à la libre concurrence.

L’encadrement du marché

Les défaillances du marché comme organe de régulation rendent nécessaire l'élaboration d'un système de règles qui s'imposent aux agents présents sur les différents marchés. Le marché des biens et services est réglementé en ce qui concerne la production et la distribution des marchandises du point de vue de la sécurité des consommateurs, notamment pour les produits alimentaires.

Sur le marché du travail, les salaires ne sont pas uniquement déterminés par la rencontre entre l'offre et la demande. Dans la plupart des pays développés, les autorités étatiques ont défini un salaire minimum, tel le S.M.I.C. en France, afin de sauvegarder le pouvoir d'achat des catégories de salariés les moins qualifiés. Il en est de même sur les marchés financiers, où des organismes veillent à l'information des actionnaires et à la régularité des transactions ; c'est la mission de la Securities and Exchange Commission (SEC) pour la Bourse de New York et de l’Autorité des marchés financiers (A.M.F.) sur la place de Paris.

La défense des lois du marché et de la concurrence

Les pouvoirs publics interviennent également afin de défendre la concurrence contre certaines pratiques de dirigeants d'entreprise qui cherchent à s'en émanciper pour accroître leur profit. Ainsi sont nées, aux États-Unis, les lois antitrust, tel le Sherman Act de 1890, complété par le Clayton Act de 1914. L'objectif est de protéger le marché des ententes entre entreprises et d'empêcher l'émergence de monopoles. En France, le Conseil de la concurrence, institution indépendante créée en 1986, remplit ses missions sur les bases de la législation nationale (le Code du commerce) et des traités européens. Il exerce une surveillance de la structure des marchés en examinant et en contrôlant les fusions d'entreprises. Les stratégies illicites, comme les ententes entre firmes ou l'abus de position dominante, peuvent être sanctionnées par le Conseil.

Adam Smith
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Hypermarché
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