Frustrée de sa demi-victoire du mois de juin, l'opposition repart à l'attaque avec vigueur. Elle inflige un cuisant échec au parti de Suleyman Demirel aux élections régionales et municipales du 11 décembre 1977. Il ne lui reste plus qu'à forcer son avantage sur le terrain parlementaire.

En quelques jours, onze députés abandonnent la coalition. Bülent Ecevit en profite pour déposer une motion de censure, qui est votée par 228 voix contre 218. Il n'a pas de mal cette fois à former une équipe de gouvernement où les transfuges sont largement récompensés. Il aura fallu huit mois pour que le verdict électoral se traduise dans les faits.

L'héritage est lourd. Le climat de violence s'est encore aggravé : une cinquantaine de personnes ont été assassinées au cours du seul mois de décembre ; les attentats à la bombe sont devenus une chronique quotidienne des journaux.

La situation financière est désastreuse. Le chômage touche 20 % de la population active, bien que la production ait encore un taux de croissance de 5 %. Les relations avec le gouvernement de Washington sont au plus bas, le différend gréco-turc aigu et l'affaire de Chypre reste sans solution.

Oxygène

Le nouveau Premier ministre, connu comme un esprit brillant et qui a, sur son prédécesseur, l'avantage de ne pas être usé par le pouvoir, bénéficie d'un préjugé favorable auprès de la communauté internationale. Il l'exploite sans perdre de temps. Dès le mois de mars, la Turquie reçoit une bouffée d'oxygène sur le plan financier : le FMI lui accorde un prêt de 400 millions de dollars et, dans son sillage, un consortium de banques étudie l'ouverture de très larges crédits, tandis qu'en mai ses quatorze principaux débiteurs décident d'alléger sa dette en lui accordant d'importantes facilités.

Mais l'initiative la plus spectaculaire de Bülent Ecevit est réservée à la Grèce : c'est la proposition d'une rencontre au sommet avec le Premier ministre grec, Constantin Caramanlis. Celle-ci a lieu à Montreux, les 10 et 12 mars. Elle n'aboutit à aucun résultat concret, mais contribue, au moins provisoirement, à détendre le climat. D'autant que la Turquie semble décidée à rechercher un règlement à Chypre. Bülent Ecevit y envoie un de ses proches conseillers, le Pr Mumtaz Soysal, pour préparer de nouvelles propositions.

Embargo

Manifestement sensible à ces initiatives, Jimmy Carter demande alors au Congrès de lever l'embargo sur les armes qui a été imposé à la Turquie, après le débarquement de ses forces à Chypre, le 20 juillet 1974 (Journal de l'année 1974-75). Mais le plan turc apparaît inacceptable aux Chypriotes grecs, la mansuétude du président des États-Unis soulève un tollé à Athènes, et le Congrès américain refuse d'ailleurs de l'avaliser.

Ankara menace alors de procéder à une révision déchirante de sa politique étrangère : Bülent Ecevit déclare, lors d'un voyage à Londres, que L'alliance atlantique n'est qu'« une structure laissée par la guerre froide », et que la sécurité de son pays dépend d'abord aujourd'hui de bonnes relations avec ses voisins. Le premier d'entre eux — l'URSS — multiplie d'ailleurs les ouvertures : offre de large coopération économique, crédits à l'industrie lourde, fourniture d'avions civils, le tout couronné, au mois d'avril 1978, par la visite à Ankara du chef d'état-major de l'armée rouge, le maréchal Orgarov. Bülent Ecevit se rend lui-même à Moscou, le 21 juin. Sans accepter le pacte de non-agression que proposent les Soviétiques, il souscrit à une charte de coopération et négocie un accord commercial qui permettra de tripler les échanges entre les deux pays.

Sur le plan intérieur, la tension s'aggrave. Terrorisme de droite et terrorisme de gauche se déchaînent, créant un climat de guerre civile larvée. En avril, l'attentat en pleine rue contre Server Tanilli, professeur à l'université d'Istanbul, connu pour ses opinions de gauche, puis l'assassinat d'une personnalité de droite, le maire de Malatya, Hamit Fandoglou, et de sa famille portent l'inquiétude à son comble.

Viêt-nam

Hanoi. 46 520 000. 140. 2,9 %.
Économie. Énerg. (*75) : 186.
Information. (74) : *2 550 000. (74) : *500 000.
Institutions. « République socialiste du Viêt-nam », nom officiel du nouvel État né de la réunification du Viêt-nam du Sud et de la République démocratique du Viêt-nam du Nord (2 juillet 1976). La partition résultait des accords de Genève du 20 juillet 1954. Constitution en vigueur : celle de l'ancienne république du Nord (1960). Président de la République : Ton Duc Than. Premier ministre : Pham Van Dong.

Un troisième conflit indochinois : la guerre Hanoi-Phnom Penh

La troisième guerre d'Indochine aurait-elle commencé ? Cette question, on se la pose à l'Est comme à l'Ouest, à Moscou comme à Pékin, après les sévères affrontements qui ont opposé tout au long de l'année troupes vietnamiennes et cambodgiennes à la frontière des deux pays.