Dans la Loire, la conversion des mineurs s'est effectuée dans des conditions plutôt satisfaisantes. En quinze ans, 11 000 mineurs ont quitté volontairement la mine et ont trouvé des emplois plus stables et plus rémunérateurs dans la métallurgie.

Le recyclage des cadres est encore loin d'être satisfaisant. Une expérience s'est déroulée à Saint-Égrève, près de Grenoble. Une session de perfectionnement de trois mois a réuni 17 cadres. « Nous avons un instant cru à la vérité du perfectionnement, expliquent ces stagiaires dont la moyenne d'âge est de quarante-cinq ans. Mais nous restons très pessimistes. Il nous paraît à peu près impossible de retrouver une situation dans la région. Quant aux offres d'emploi traitées par ordinateurs au niveau national, elles sont vieilles de plus de deux semaines lorsqu'elles nous parviennent. Lorsque notre demande arrive, la place est occupée depuis longtemps. »

Le centre de formation professionnelle de la chaussure de La Côte-Saint-André (Isère) assure en revanche, après vingt-six semaines de stage, un placement à ses stagiaires, jeunes gens et jeunes filles.

Les véritables prolétaires

La perte de vitesse de l'économie régionale se fait sentir aussi sur le nombre des entrées des travailleurs étrangers : 17 467 en 1970, 13 533 en 1971. Le conflit survenu à l'usine Penarroya (février-mars 1972), et concernant 105 ouvriers algériens et marocains, a mis en relief les difficultés que connaissent ces véritables prolétaires de la classe ouvrière. Ce mouvement, qui a soulevé un élan de solidarité sans précédent depuis mai 68, a permis aux travailleurs immigrés d'obtenir un certain nombre d'améliorations (conditions de logement et surveillance médicale).

Dans la région Rhône-Alpes, le nombre des immigrés était de 425 000 au 1er janvier 1971. Le Rhône, avec 142 000 étrangers, arrive en tête devant l'Isère (96 000) et la Loire (58 000). L'industrie régionale du bâtiment compte à elle seule 60 000 Algériens, Italiens, Espagnols, Portugais, Tunisiens, Marocains et Yougoslaves sur les 150 000 ouvriers qu'elle emploie.

Le biscuit et les miettes

La conjoncture régionale suscite des réactions qui diffèrent, bien sûr, avec les appartenances des partenaires. « Les pouvoirs publics pèsent lourd dans le choix des investisseurs », estime Alfred de Valence, président du groupement interprofessionnel lyonnais. C'est aussi l'avis de beaucoup de syndicalistes. Pierre Lami, secrétaire général de l'UD CGT de l'Isère, considère que « c'est le développement économique national qui est en cause ». « Le biscuit va maintenant vers les villes nouvelles de la région parisienne. Seules les miettes tombent en province, plus précisément dans l'ouest de la France depuis quelque temps », renchérit le maire de Grenoble Hubert Dubedout.

Directeur de l'Agence nationale pour l'emploi de Saint-Étienne, Jean Goyet qualifie la situation de l'emploi dans la Loire de « ni bonne ni mauvaise ». « Il n'y a pas de crise de l'emploi, mais une situation stagnante peut-être plus inquiétante », remarquent les deux secrétaires de l'UD CFDT de ce département, Pierre Heritier et Roger Bonnevialle. Et, de son côté, Norbert Studer, secrétaire général du Comité d'expansion de la Loire, est plutôt optimiste, car il considère que « le département est en pleine mutation ».

Au rang des perspectives rassurantes : la récente signature de la convention pour le percement du tunnel sous le Fréjus et la confirmation par Jérôme Monod, délégué à l'Aménagement du territoire, que Satolas est bien appelé à devenir le second aéroport français.

Mais l'implantation d'entreprises du secondaire (les industries lourdes) reste la condition première pour que la région Rhône-Alpes retrouve son second souffle. Il faut pour cela que les responsables changent d'attitude envers l'industrie lourde. En attendant, la fondation scientifique Lyon-Sud-Est incite les universités à travailler avec les industriels, cela afin qu'elles forment des scientifiques sensibilisés aux préoccupations des entreprises, qui les embaucheront ainsi plus facilement.

Le déséquilibre entre les offres et les demandes d'emploi a atteint dans la région Rhône-Alpes son maximum à la fin de l'année 1971. Depuis le début de l'année 1972 une amélioration semble se dessiner. La conjoncture économique régionale indique une nette tendance au ralentissement du rythme de croissance de la production au cours de l'année 1971. Le regain d'activité enregistré au printemps 1971 n'a pas persisté au-delà de septembre.

Un chômeur sur 3 a moins de 25 ans. Dans l'Isère, la proportion est de 2 sur 3. 74 % des jeunes demandeurs sont inscrits depuis moins de trois mois. Dans la catégorie des plus de 50 ans, 75 % attendent un emploi depuis plus de trois mois et 60 % depuis plus de six mois. Cette catégorie constitue le groupe le plus important, en valeur absolue (8 444) comme en valeur relative (33,98 %).

Bourgogne

La physionomie de l'emploi est hétérogène suivant les départements d'une région disparate par elle-même et soumise à des attractions opposées.