Tous les Hutu ayant fait des études ont été tués sur place ou arrêtés puis exécutés sommairement ensuite. Étudiants, professeurs, moniteurs d'enseignement, lycéens, employés de commerce ont été tués par milliers à Bujumbura, à Bururi et dans plusieurs autres agglomérations. Vieillards, femmes, enfants n'ont pas été épargnés et, après avoir nié que des troubles aient éclaté, la radio nationale du Burundi dut admettre qu'officiellement, en l'espace d'à peine trois semaines, plus de 50 000 personnes avaient été tuées.

Le gouvernement rejette l'entière responsabilité des tueries sur les Hutu, attitude d'autant plus paradoxale que depuis six ans les autorités de Bujumbura n'avaient cessé d'affirmer qu'il n'existait pas de rivalité ethnique dans le pays et que l'antagonisme Hutu-Tutsi était une invention forgée de toutes pièces par les adversaires ou les détracteurs du régime du colonel Micombero. Il aura fallu trois semaines de désordres pour que le monde apprenne enfin l'étendue du désastre sur lequel les dirigeants de Bujumbura étaient inexplicablement parvenus jusqu'alors à faire silence malgré la présence de nombreux coopérants.

Plusieurs séries de causes concordantes expliquent l'affrontement sanglant ; les unes empruntent à l'histoire, les autres sont la conséquence d'une évolution très récente. Vivant en osmose depuis plusieurs siècles, Hutu et Tutsi n'avaient en fait que des rapports de sujétion. Agriculteurs sédentaires, les Hutu étaient devenus par conquête les métayers des Tutsi, pour lesquels ils travaillaient, tandis que ces derniers leur prêtaient leur bétail en fermage et monopolisaient depuis leur arrivée dans le pays l'exercice des responsabilités politiques.

Les puissances coloniales qui se succédèrent au Burundi (que l'on appelait alors l'Urundi) pratiquèrent l'administration indirecte et s'appuyèrent sur la chefferie traditionnelle. Ainsi les Allemands jusqu'en 1918, puis les Belges de 1918 à 1962 — époque à laquelle ils exercèrent un mandat au nom de la Société des Nations, puis une tutelle au nom de l'ONU — renforcèrent-ils la suprématie Tutsi. Au moment de la proclamation de l'indépendance, le 1er juillet 1962, le souverain Mwambutsa IV manifesta rapidement son opposition à toute démocratisation du régime et, jusqu'à sa déposition en juillet 1966, règlements de compte entre Hutu et Tutsi se multiplièrent. Le court intermède que constitua le règne du prince Charles, proclamé roi sous le nom de Ntare V, déposé en novembre de la même année par une junte militaire, ne permit aucun changement notable.

Complots en chaîne

En juillet 1971, la liste des conspirations ourdies contre le régime militaire s'allonge encore. D'octobre à janvier se déroule un procès au cours duquel passent en jugement une dizaine de personnalités politiques qui seront condamnées à mort puis graciées par le colonel Michel Micombero. Il ne s'agit d'ailleurs pas de Hutu, mais de Tutsi, ce qui souligne à la fois l'impopularité du régime et l'existence de graves tensions entre clans Tutsi.

Les méthodes brutales des officiers qui contrôlent la junte inquiètent d'autant plus les élites que tout en multipliant les professions de foi progressistes et en recourant systématiquement aux slogans révolutionnaires, le colonel Micombero mène une politique réactionnaire. D'autre part, plusieurs familles princières qu'opposent des rivalités séculaires continuent de s'entre-déchirer et donnent libre cours à des haines ancestrales dont le sens et la portée sont souvent très difficilement perceptibles à des esprits européens.

Cameroun

5 840 000. 13. 2,3 %.
Économie. PNB (68) 165. Énerg. (*69) : 83. C.E. (68) : 21 %.
Transports. (*69) : 151 M pass./km, 213 M t/km. (*69) : 28 200 + 30 000. (*69) : 82 917 000 pass./km.
Information. (69) : 1 quotidien ; tirage global : 10 000. (69) : *210 000. (68) : 16 900 fauteuils. (69) : 12 303.
Santé. (69) : 225.
Éducation. (68). Prim. : 879 048. Sec. et techn. : 58 156. Sup. : 1 899.
Institutions. État fédéral (Cameroun ex-français, indépendant le 1er janvier 1960, et Cameroun méridional ex-britannique, indépendant le 1er octobre 1961). République fédérale proclamée le 1er octobre 1961. Constitution de 1961. Proclamation, après le référendum du 21 mai 1972 de la République unie du Cameroun. Président de la République : Ahmadou Ahidjo. Premier ministre : Mouna Tandeng.

Côte-d'Ivoire

4 420 000. 14. 2,3 %.
Économie. PNB (68) 304. Énerg. (*69) : 180. C.E. (68) : 34 %.
Transports. (*69) : 522 M pass./km, 394 M t/km. (*69) : 47 000 + 33 000. (*69) : 65 820 000 pass./km.
Information. (69) : 3 quotidiens. (69) : *70 000. (69) : *10 000. (65) : 28 800 fauteuils. (69) : 27 220.
Santé. (66) : 218.
Éducation. (68). Prim. : 427 029. Sec. et techn. : 50 086. Sup. : 2 943.
Institutions. État indépendant le 7 août 1960. République (4 décembre 1956). Constitution de 1960 ; régime présidentiel. Président de la République et chef du gouvernement : Félix Houphouët-Boigny, réélu le 29 novembre 1970.

Dialogue

Résolu à poursuivre le dialogue avec les Sud-Africains, Houphouët-Boigny évoque, en octobre 1971, la possibilité d'échanges de missions diplomatiques entre pays favorables au dialogue et le gouvernement de Pretoria, sans rejeter l'idée d'un éventuel déplacement en Afrique du Sud.