Journal de l'année Édition 1972

Du 01 juillet 1971 au 30 juin 1972

Ça c'est passé le

France.

Les pensions de retraite et d'accidents du travail sont majorées de 11,5 %.

Ça c'est passé le

RAE.

Le Caire décide la rupture des relations diplomatiques entre l'Égypte et la Jordanie.

Sommaire

  • La vie politique en France
    • L'an I du « pompidolisme »

      On datera sans doute de l'année politique 1971-72, et plus exactement du printemps 1972, le début de l'ère Pompidolienne, une ère dont il serait évidemment imprudent de préjuger la durée. Tout se passe comme si les trois années qui ont suivi la mort politique du général de Gaulle avec son brusque départ du pouvoir (avril 1969), les dix-huit mois qui ont suivi sa mort physique (novembre 1970), avaient constitué une longue transition, une phase d'attente et de reclassement, vers la fin de l'après-gaullisme. Puis, à l'approche du troisième anniversaire de son entrée à l'Élysée, Georges Pompidou soudain s'affirmait. Il prenait des initiatives, il consultait le pays dans un référendum inattendu, il semblait prêt à passer à l'action, ou tout au moins il mettait en mesure la majorité et le régime d'affronter les élections législatives, prévues normalement pour mars 1973.

    • Le référendum du 23 avril 1972

      En deux phrases de sa conférence de presse du 16 mars 1972, le président de la République annonçait le référendum sur l'élargissement de la Communauté européenne par l'admission de quatre nouveaux membres dont la Grande-Bretagne, consultation qui devait ensuite être fixée au 23 avril. À deux reprises, Georges Pompidou s'adressait encore au pays — la veille de l'ouverture officielle de la campagne et l'avant-veille du scrutin — pour lui demander un « oui » massif, mais en évitant avec soin de mettre son propre sort en balance ou de dramatiser les conséquences d'un éventuel échec.

    • Monnaie

      Depuis le mois de mai 1971, lorsque le mark s'est mis à flotter vers le haut, jusqu'au mois de juin 1972, quand la livre sterling a été contrainte de flotter vers le bas, le monde n'a cessé de vivre en état de crise monétaire.

    • Conjoncture économique

      Les deux événements les plus marquants pour l'avenir de l'économie française en 1971-72 n'ont pas été spécifiquement français. La crise monétaire a été internationale et elle a frappé, en priorité, les monnaies anglo-saxonnes : en décembre 1971, le dollar était dévalué pour la première fois depuis 1934 ; en juin 1972, le gouvernement anglais renonçait à défendre la valeur officielle de la livre sterling, ce qui annonçait une nouvelle dévaluation moins de cinq ans après celle de 1967.

    • Productions

      Le gouvernement algérien et la compagnie française ELF-ERAP signent, le 15 décembre 1971, un accord réglant le contentieux ouvert au début de l'année par la nationalisation des installations pétrolières françaises, décidée unilatéralement par le gouvernement Boumediene. Un accord du même genre avait été conclu le 30 juin avec l'autre grand opérateur français en Afrique du Nord, la Compagnie française des pétroles (Total). Pour l'essentiel, ces accords entérinent les décisions algériennes, en arrêtant seulement le montant des indemnités dues aux sociétés françaises. Entre autres conséquences, ils réduisent des deux tiers le volume des livraisons de pétrole de l'Algérie à la France.

    • Relations sociales

      La grève du Joint français, l'accord sur la réduction du temps de travail dans la métallurgie, des grèves souvent longues et dures, mais un réseau de plus en plus dense de négociations. Ces visages contrastés des relations professionnelles ne marquent pas un absurde dérèglement du système français. Ils sont même complémentaires. Lorsque les négociations ne sont plus formelles et deviennent des confrontations cartes sur table, les conflits sont plus durs et vont jusqu'à mettre en jeu la vie de l'entreprise.

    • Finances

      Le budget de 1971 s'est contenté « d'accompagner » une expansion de l'économie française relativement forte par rapport à l'étranger. Mais, en 1972, les risques de contagion par la grisaille environnante se sont aggravés, et le budget a revêtu une physionomie beaucoup plus dynamique, à l'« intersection de la stabilité et de la croissance », selon la formule de Valéry Giscard d'Estaing.

    • Bourse

      Si la crise monétaire internationale, dont les premiers symptômes remontent à plusieurs années, se révèle dans toute son ampleur au mois de mai 1971, c'est en juillet seulement que l'attention et l'intérêt des opérateurs se portent sur le franc français.

    • Commerce extérieur

      Malgré un environnement international médiocre, le commerce extérieur français s'est finalement bien comporté en 1971. Il y a eu pourtant les incertitudes et la spéculation monétaires, les mesures Nixon d'août — suspension de la convertibilité en or du dollar, surtaxe de 10 % sur les importations —, les poussées inflationnistes, le ralentissement de la croissance économique chez nos principaux partenaires commerciaux, l'atonie du commerce mondial (dont l'augmentation en volume n'a pas dépassé 5 %).

    • Législation

      Dans le dessein de simplifier notre système juridique et de l'harmoniser avec celui de nos partenaires du Marché commun, la loi du 31 décembre 1971 réforme certaines professions judiciaires et réglemente l'usage du titre de conseil juridique. Elle entre en vigueur le 16 septembre 1972.

    • Aménagement du territoire

      « Libérale dans son principe, pragmatique dans son fonctionnement, ouverte sur l'avenir », l'institution régionale proposée au printemps 1972 par le Gouvernement porte bien la marque de son principal inspirateur : le président Pompidou.

    • Matières premières

      La recherche d'un nouvel équilibre à travers les vicissitudes économiques a marqué, en 1971 et pendant le premier semestre de 1972, les marchés des matières premières. Mais la reprise des affaires, tant espérée après la dépression des deux années précédentes, ne s'est pas manifestée pendant le premier semestre de 1972.

    • Armée

      En présidant la dernière phase des manœuvres nationales qui ont lieu à la fin de juin 1971 dans plusieurs départements du Sud-Est et en Méditerranée, Georges Pompidou s'emploie à remonter le moral des marins français, très déçus et amers sur leur avenir depuis la démission, l'année précédente, de leur chef d'état-major, l'amiral André Patou. Ce geste de confiance, le président de la République le renouvelle le 22 octobre 1971, à Brest, en visitant le premier sous-marin lance-missiles à propulsion nucléaire, le Redoutable.

  • La vie politique internationale
    • Marché commun

      Ce n'est pas sans fausses notes que les partenaires de la Communauté européenne ont exécuté leur partition en 1971-72. L'allégro de l'élargissement a été bien mené : le traité d'adhésion de la Grande-Bretagne, de l'Irlande, du Danemark et de la Norvège a été solennellement signé à Bruxelles le 22 janvier. En revanche, le menuet de l'union monétaire a connu de nombreux faux pas et l'adagio de la conférence au sommet a été si lent qu'on se demandait encore, à la fin du mois de juin 1972, si les musiciens arriveraient au bout.

    • Conflits

      Le bruit des armes n'a guère cessé dans l'ancien empire britannique des Indes depuis la partition en deux États (l'Inde et le Pakistan), le 15 août 1947. Le sous-développement ne vaccine pas contre la violence. Aux horreurs d'un raz de marée se succèdent au Bengale Oriental, en mars 1971, la guerre civile avec ses tueries, le choléra, la famine et l'exode massif d'habitants vers un Bengale Occidental où le gouvernement indien est plus que contesté (Journal de l'année 1970-71). Et, une fois encore, pris dans l'engrenage, l'Inde et le Pakistan massent leurs troupes aux frontières. L'objet n'est plus le contrôle d'une province convoitée mais l'éclatement du Pakistan. Quatorze jours de guerre, du 3 au 17 décembre, suffisent ; le Bengale Oriental devient un nouvel État : le Bangla Desh.

  • La vie politique à l'étranger
    • Afrique

      14 770 000. 7. 3 %. Économie. PNB (63) 248. Production (*69) : A 94. Énerg. (*69) : 470. C.E. (63) : 28 %. Transports. (*69) : 953 M pass./km, 1 344 M t/km. (*69) : 121 200 + 70 800. (*69) : 417 515 000 pass./km. Information. (68) : 4 quotidiens ; tirage global : 185 000. (69) : *700 000. (69) : *100 000. (67) : 159 100 fauteuils ; fréquentation : 28,7 M. (69) : 169 188. Santé. (66) : 1 356. Éducation. (68). Prim. : 1 585 682. Sec. et techn. : 177 382. Sup. : 10 681. Institutions. État indépendant le 3 juillet 1962. République proclamée le 25 septembre 1962. Constitution de 1963. Président du Conseil de la révolution et chef de l'exécutif : colonel Houari Boumediene, auteur du coup d'État qui renverse Ben Bella le 19 juin 1965.

    • Amérique

      21 410 000. 2. 1,8 %. Économie. PNB (68) 2 997. Production (69) : G 135 ; A *106 ; I 144. Énerg. (*69) : 8 794. C.E. (68) : 20 %. Transports. (*69) : 3 891 M pass./km, 140 830 M t/km. (*69) : 6 433 300 + 1 682 500.  : 2 400 000 tjb. (*69) : 12 996 885 000 pass./km. Information. (68) : 118 quotidiens ; tirage global : 4 527 000. (69) : *14 740 000. (68) : *6 100 000. (67) : 655 700 fauteuils ; fréquentation : 97,6 M. (69) : 9 303 000. Santé. (68-69) : 28 163. Mté inf. (68) : 20,8. Éducation. (68). Prim. : 3 832 309. Sec. et techn. : 1 616 920. Sup. : 477 967. Institutions. État fédéral indépendant en 1931 (Statut de Westminster). Constitution de 1867. Gouverneur général représentant la Couronne britannique : Daniel Roland Michener. Premier ministre : Pierre Elliot Trudeau.

    • Asie

      17 480 000. 27. 2,1 %. Économie. PNB (63) 60. Production (*69) : A 116. Énerg. (*69) : 26. Transports. (*69) : 30 800 + 18 200. (*69) : 84 888 000 pass./km. Information. (67) : 20 quotidiens ; tirage global : 105 000. (67) : *248 000. (65) : 9 900 fauteuils ; fréquentation : *6,1 M. (68) : *10 000. Santé. (69) : 808. Éducation. (69). Prim. : 500 665. Sec. et techn. : 99 158. Sup. : 5 680. Institutions. État indépendant depuis 1921. Monarchie constitutionnelle. Constitution de 1965. Souverain : Mohammed Zahir chah ; succède en 1933 à son père Mohammed Nadir, assassiné. Premier ministre : Abdul Zaher.

    • Europe

      2 170 000. 76. 2,8 %. Économie. Production : G (68) 147 ; I (67) 145. Énerg. (*69) : 608. Information. (69) : 2 quotidiens ; tirage global : 105 000. (69) : *160 000. (69) : 2 500. (65) : 20 200 fauteuils ; fréquentation : 7,8 M. Santé. (67) : 1 157. Mté inf. (65) : 86,8. Éducation. (68). Prim. : 473 687. Sec. et techn. : 52 695. Sup. : 16 649. Institutions. République populaire, proclamée le 11 janvier 1946. Constitution de 1946. Président du présidium : major général Hadji Lleshi, élu en 1953. Président du Conseil : colonel général Mehmet Chehou. Premier secrétaire du Parti : général Enver Hodja.

    • Océanie

      12 730 000. 2. 2 %. Économie. PNB (68) 2 476. Production : G (68) 129 ; A (*69) 120 ; I (69) 138. Énerg. (*69) : 5 200. C.E. (68) : 11 %. Transports. (*69) : 21 463 M t/km. (*69) : 3 677 000 + 949 900.  : 1 074 000 tjb. (*69) : 7 404 000 000 pass./km. Information. (68) : 61 quotidiens ; tirage global : 4 732 000. (68) : 2 650 000. (69) : 2 649 000. (66) : 638 700 fauteuils ; fréquentation : 37,5 M. (69) : 3 598 692. Santé. (66) : 13 697. Mté inf. (68) : *17,8. Éducation. (68). Prim. : 1 768 060. Sec. et techn. : 1 080 524. Sup. : 164 528. Institutions. Fédération de 6 États (Commonwealth of Australia), indépendante le 1er janvier 1901. Constitution de 1901. Gouverneur général représentant la Couronne britannique : sir Paul Hasluck. Premier ministre : William McMahon.

  • La vie intellectuelle
    • Lettres

      Dans le bilan de l'activité intellectuelle, il faut bien convenir que la part de la littérature d'imagination, et même la part de la littérature en général, n'est pas la plus importante ni la plus brillante. On a l'impression de traverser une période d'attente, et cette attente se prolonge singulièrement. Les livres sont publiés en grande abondance et sans beaucoup de discernement, les écrivains pourtant ne manquent pas.

    • Arts

      Une foule empressée s'efforçait de suivre, dans les hangars de l'ancienne cartoucherie de Vincennes, en septembre et octobre 1971, de longues flèches colorées peintes à même le sol. Ces pistes conduisaient aux différentes sections de la VIIe Biennale de Paris : jaunes pour l'Art conceptuel, blanches pour l'Intervention, oranges pour l'Hyperréalisme.

    • Architecture / Urbanisme

      La proclamation, au mois de juillet 1971, des résultats définitifs du concours international pour l'édification (plateau Beaubourg) du Centre national d'art contemporain, souhaité par le président Pompidou, aura-t-elle été le seul événement architectural de l'année.

    • Spectacles

      Musicalement, ce courant — dont on trouve les premiers indices dans des œuvres composées il y a une vingtaine d'années (Nono, par exemple) mais qui tend à se généraliser — se traduit de multiples manières. Il est toutefois possible de distinguer trois principes généraux : – utilisation d'un sujet politique dans une représentation musicale (Un contre tous d'Ivo Malec, d'après les discours politiques de Victor Hugo, présenté au festival d'Avignon, une œuvre controversée qui cependant ne manque pas de qualités musicales) ; ou bien citations de paroles ou d'événements, procédé que l'on retrouve dans un grand nombre d'œuvres électro-acoustiques de jeunes compositeurs (voix de Hitler, de Castro, bruits de fusillades... à l'instar de Bério, Pablo, etc.) ; – élaboration d'une forme musicale suivant une progression dramatique faisant allusion à un thème politique : plainte pour les victimes de la violence, de l'Espagnol Cristobal Halffter (festival de Donaueschingen, octobre 1971), une œuvre admirable où l'idéologie est totalement assumée musicalement dans un langage abstrait qui n'exclut pas le pathétique ; – subversion exprimée dans la matière même de l'œuvre, autant par le silence que par l'éclatement ou le désordre dont John Cage affirme qu'il « est le propre de la vie » : Oraison funèbre, du jeune compositeur grec Georges Aperghis (créée à la Cartoucherie de Vincennes en novembre 1971 par l'ensemble instrumental de Constantin Simonovitch), est significatif de cette volonté destructrice. Les symboles culturels bourgeois, dont l'Opéra, sont les objets de la mise à mort. Free jazz, musique pop, théâtre et musique éclatés se rencontrent à ce point de création dans une même opposition à un système de pensée et de vie.

    • Science

      EARL SUTHERLAND. Né en 1911 à Burlingame (Kansas). Études de pharmacologie et de biochimie à Washington et à Cleveland. Depuis 1963, il enseigne la physiologie à l'université Vanderbilt de Nashville. En étudiant le métabolisme du glucose, il a découvert le rôle de l'adénosine monophosphate, ou AMP cyclique. Quand l'organisme ressent un manque ou un excès de glucose, des hormones comme l'insuline ou l'adrénaline portent au foie l'ordre de libérer du glucose ou, au contraire, d'en stocker l'excédent sous forme de glycogène. L'AMP cyclique agit comme un relais portant le message hormonal à l'intérieur de la cellule hépatique. Depuis, on a découvert son rôle dans bien d'autres réactions biologiques. Des troubles dans la production de l'AMP pourraient être à l'origine d'un grand nombre de maladies, dont la psychose maniaco-dépressive.

  • La vie religieuse
    • La vie religieuse

      Deux cent dix cardinaux, patriarches, archevêques et évoques réunis en présence du pape, et avec le concours d'une quarantaine d'experts et de prêtres : c'est le Synode épiscopal, dont la deuxième Assemblée générale se tient à Rome du 30 septembre au 6 novembre 1971. Le monde catholique, anxieux de trouver des solutions à la crise de l'Église, attendait beaucoup de cette réunion du conseil du pape.

  • La vie quotidienne
    • Société

      Il est de plus en plus question de la qualité de la vie, dans les journaux, à la radio, à la télévision et dans les discours des hommes politiques. Cette notion invoquée à tout propos trahit une préoccupation qui colore l'époque. Que cache la formule ? En dernière analyse, elle pose la finalité des sociétés modernes, où les individus ont pris conscience que produire pour produire, sans tenir compte du bonheur individuel, n'avait plus de sens. Le produit national brut, la natalité, l'indice des salaires ou des prix, la production de tel ou tel secteur, l'équilibre de la balance du commerce extérieur ne peuvent plus à eux seuls témoigner. Ces chiffres, s'ils reflètent des progrès, restent d'une certaine manière muets sur les individus.

    • Consommation

      Le consommateur français est-il enfin devenu cet interlocuteur responsable, ni roi ni sujet, capable d'exercer un pouvoir qu'il détient grâce à son carnet de chèques ou à son portefeuille, et qu'il peut manifester en achetant — ou en n'achetant pas — les biens et services qui lui sont nécessaires ?

    • Éducation

      L'année scolaire 1971-72 s'ouvre sur une grève : le 15 septembre, jour de la rentrée, les professeurs du secondaire, à l'appel de leurs syndicats, refusent d'assurer leurs cours. C'est le début d'un vaste débat qui traduit l'existence d'un profond malaise dans le corps enseignant.

    • Information

      Après la réflexion, la crise. Après s'être interrogée sur son avenir (Journal de l'année 1970-71) sans toutefois parvenir à faire adopter des mesures pratiques, la presse se trouve confrontée, en 1972, aux réalités économiques qui, une fois de plus, posent le problème de sa survie.

    • Faits divers

      Le public apprend, en juillet 1971, à la suite d'une enquête lancée par le procureur de la République, que certaines sociétés, comme le Patrimoine foncier et la Garantie foncière, qui collectent l'épargne privée en vue de placements immobiliers, cachent des activités commerciales plus ou moins légales, sources de profits injustifiés.

    • Automobile

      Le 58e Salon de l'Auto a vécu sous le double signe de la contestation et du paradoxe.

    • La mode

      Bilan de deux saisons : des turbulences, le strass et le kitsch ; des coups de vent : l'air marin ; une vedette internationale : le débardeur. La haute couture navigue en eaux calmes, équilibrée et raffinée comme la voulait Chanel. Le strass a brillé tout l'hiver (on l'achète encore au mètre), en cœur, en flèche, en étoile, sur le noir et sur le soir, associant parfois ses éclats aux intempérances du kitsch. Le mot allemand désigne aujourd'hui un composé étrange et volatil, obtenu en assemblant au petit bonheur ce qui est bigarré, drôle et laid. C'est outrancier et irrévérencieux. Enfant du cinéma, l'air marin doit à Visconti son succès depuis Mort à Venise. On a vendu cet hiver des ancres en or place Vendôme, des ancres en plastique dans les bazars. Parmi les cols bleus et les pompons rouges, le débardeur, petit tricot sans col ni manches, court de taille, haut en couleur, s'affirme comme une vedette. Les jeunes filles le collectionnent, les touristes l'emportent en souvenir. Dans la rue, c'est toujours le spectacle, la mode vécue. Le vêtement parle, devient affiche, proclamation, opposition. Il porte des inscriptions pacifistes... ou le visage d'Angela Davis. Tandis que les mères s'habillent de soie plissée, les filles achètent, dans les surplus, des vestes militaires américaines ornées de badges dédorés — « c'est la mode du caniveau », soupirent les confectionneurs alarmés — ou bien, en cotillon de pilou et en sabots, l'œil ingénu et la joue peinte, elles jouent le retour à la terre. Le choix égalise les différences. Les mêmes tricots, les mêmes velours plus ou moins râpés font les adolescents semblables. On peut encore sur l'apparence juger de l'âge et des goûts, mais non des différences sociales, de l'origine, des nationalités. L'habit, souvent, fait le moine...

    • Sports

      Les jeux Olympiques d'hiver se sont déroulés, pour la première fois depuis leur création, sur le continent asiatique. La candidature de Sapporo avait déjà été retenue pour les olympiades de 1940, olympiades perturbées par la Seconde Guerre mondiale.

    • Les courses

      Vedette de l'année hippique 1971-72 : Monsieur X, dont le nom — Patrice des Moutis — a déjà été révélé au public à l'occasion de ses nombreux démêlés avec le PMU. Après une instruction qui n'a pas duré moins de neuf années, le procès de ce qu'on a appelé l'affaire du Prix de Bordeaux s'ouvre devant les juges de la 13e Chambre correctionnelle. À l'issue d'une course disputée à Vincennes le 2 décembre 1962, le PMU dénombra une accumulation anormale de paris tiercés comportant les cinq mêmes chevaux. 51 commissionnaires, représentant les commandos accusés d'avoir agi en violation de la loi de 1891 pour le compte d'un tiers à Marseille, Lyon, Lille et Bordeaux, sont présents dans la salle. L'interrogatoire d'identité révèle que certains collectionnent les condamnations. Considéré comme le cerveau de l'affaire, Patrice des Moutis, accusé de complicité de tentative d'escroquerie, transforme son propre procès en celui du PMU. Il expose sa conviction que cet organisme ne comptabilise pas tous les paris qu'il reçoit. Les débats durent six jours et, après un délibéré de deux mois, le tribunal rend sa sentence : Patrice des Moutis et ses coïnculpés sont relaxés. Phrase clé du jugement : « De simples spéculations à partir d'éléments incertains ne permettent pas de désigner Patrice des Moutis comme le maître d'œuvre d'une opération d'ensemble destinée à dépasser le plafond des enjeux... »

    • Échecs

      Les retentissantes prouesses du prodige américain Robert Fischer ont dominé l'année 1971-72. Ses résultats, obtenus dans diverses manifestations de haut niveau, tout en continuant son extraordinaire série de succès (Journal de l'année 1970-71), ont stupéfié même ses admirateurs.

    • Bridge

      Les Olympiades de bridge qui remplacent une année sur quatre les championnats continentaux et le championnat du monde, se sont déroulées en juin 1972 à Miami.

    • Philatélie

      Considérée à ses débuts comme un passe-temps anodin ou une innocente manie (certains ne l'appelaient-ils pas la timbromanie ?), la philatélie n'a cessé de prendre de l'importance dans le monde. Et, aujourd'hui, elle semble vouloir sortir résolument du hobby pour se transformer en sévère affaire commerciale, bien décidée à agrandir son trou. C'est la Grande-Bretagne, où le timbre fit ses premières dents, qui, tout naturellement, s'élance dans cette voie. À Dorking, petite ville du comté de Surrey, s'est tenue une réunion groupant des représentants de tous les organismes ayant intérêt à la diffusion et au commerce des timbres-poste. Une très sérieuse étude de marché a été présentée ; après des débats animés, un coordinateur, Michael Clarke, a été désigné. Il dispose de fonds solides qui doivent lui permettre d'utiliser toutes les méthodes modernes de publicité et de promotion afin d'imposer l'image de marque de la philatélie. Michael Clarke a sept ans devant lui pour doubler le nombre — déjà considérable — des collectionneurs britanniques.

  • Nécrologie

    Colonel Rudolf ABEL (68 ans), espion soviétique ; Moscou, le 15-XI-71.