Cette loi sur le commerce (née de l'accord conclu avec Nixon en 1972) a été adoptée le 20 décembre 1974 par le Congrès américain, mais avec deux restrictions : d'une part, la limitation à 75 millions de dollars pendant quatre ans des crédits US ; d'autre part et surtout (amendement Jackson) la limitation à dix-huit mois de l'octroi à l'URSS de la clause de la nation la plus favorisée, sa reconduction n'étant envisagée que si l'Union soviétique se décidait à accorder plus généreusement des visas de sortie aux Juifs désireux d'émigrer (130 000 sur 3 millions seraient dans ce cas).

Brejnev semble s'être résigné à satisfaire cette exigence et à garantir (officieusement) l'émigration annuelle de 60 000 Juifs. Mais, le 18 décembre, l'agence Tass condamne « les ingérences inadmissibles dans les affaires intérieures soviétiques » et, le 15 janvier 1975, c'est la rupture. Quelques jours plus tard, cependant, les Izvestia imputent la responsabilité de la situation au seul Congrès, épargnant ainsi Gerald Ford et laissant surtout la porte ouverte à d'ultérieures négociations.

Les conversations de Kissinger avec Brejnev en octobre, puis avec Gromyko à Vienne en mai, ajoutées aux deux sommets, montrent, dans leurs résultats respectifs, un net progrès dans la négociation sur les armements stratégiques. Brejnev apporte pourtant un correctif en juin. Selon lui, ces discussions ne serviront à rien si l'on n'est pas déjà décidé à aller plus loin. Et sans préciser plus son propos, il évoque « la mise au point d'une arme encore plus redoutable que l'arme nucléaire » et affirme : « La raison et la conscience de l'humanité imposent la nécessité de placer un obstacle infranchissable sur la voie de l'apparition de cette arme. »

Europe

Le désir maintes fois exprimé par Brejnev de réunir en juillet (au plus tard en automne) le sommet paneuropéen d'Helsinki, conclusion de la Conférence sur la sécurité et la coopération, montre l'importance que le numéro un soviétique accorde à une authentique détente entre les deux Europes.

Lors du sommet de Rambouillet, en décembre, et au cours des conversations qu'a eues Chirac à Moscou en mars, ce sujet est resté au centre des préoccupations. Ce qui n'a pas empêché la conclusion d'accords commerciaux et industriels importants. Mais si les relations avec la France ont été le plus souvent chaleureuses, elles se sont cependant assombries à quatre reprises à cause des attaques du ministre de l'Intérieur Poniatowski contre le PCF ; des propos du ministre des Armées Yvon Bourges, indiquant qu'en cas de crise les forces armées françaises participeraient aux actions de l'OTAN ; de la décision de Giscard d'Estaing de ne plus fêter le 8 Mai ; des déclarations du Premier ministre Chirac lors de la visite du ministre chinois Teng Hsiao-ping sur « la concordance de vues constatée durant ces pourparlers à propos de la politique des blocs ».

La réception en septembre, à Moscou, d'une délégation espagnole venue confirmer des relations commerciales nouées en 1972 ; la visite, deux mois plus tard, du secrétaire général du PC portugais Alvaro Cunhal, qui ouvre la voie à une coopération économique avec le Portugal ; les conversations Schmidt-Brejnev où domine aussi le problème des échanges commerciaux ; la visite, en février, de Wilson, qui met ainsi fin à une longue période de froid entre les deux pays ; la venue, enfin, à Moscou, en juin, des souverains belges montrent la volonté d'ouverture tous azimuts.

Sur l'Europe, mais aussi sur le Proche-Orient à propos duquel l'URSS voudrait bien, après les très relatifs succès américains, retrouver le leadership. Seul moyen : la Conférence de Genève, dont la reprise est réclamée par Brejnev. Ce qui n'empêche pas, bien au contraire, Moscou, d'entretenir les meilleurs rapports avec Yasser Arafat, dirigeant de l'OLP.

Libéralisation, mais...

Cinquante-six savants soviétiques de presque toutes les disciplines sont membres du Séminaire des exclus, fondé en 1972 par le physicien Alexandre Voronel, lequel, après quelques mois de prison, reçoit en décembre 1974 son visa d'émigration pour Israël. À son avis, une incontestable libéralisation se fait jour en URSS à l'égard des intellectuels contestataires. On préfère les voir partir, comme Victor Nekrassov installé en Suisse, plutôt que de les emprisonner. Mais le mathématicien Pliouchtch, en faveur de qui s'est mobilisée la communauté scientifique internationale, est toujours interné dans un hôpital psychiatrique. L'historien ukrainien Valentin Moroz, privé de liberté pendant quatorze ans pour avoir critiqué le KGB dans des œuvres inédites, est toujours en prison. L'écrivain Mickhaïl Heifitz est en camp de travail. Et Martchenko, qui voulait partir pour les USA, est en résidence surveillée. Le sinologue Rubin endure de nombreuses persécutions. Indulgence pour Vladimir Maramzine, accusé d'avoir diffusé des documents antisoviétiques. Il s'en tire, grâce à son repentir, avec cinq ans de prison avec sursis. Mais l'académicien Sakharov, toujours en lutte pour les droits de l'homme, ne peut plus communiquer avec l'étranger ; il n'ose se faire hospitaliser quand il est frappé d'une crise cardiaque. Un peu partout les dissidents se manifestent, jusqu'en prison où les détenus politiques décident de faire la grève de la faim. Deux d'entre eux réussissent à faire sortir clandestinement un Manuel de psychiatrie plein d'humour amer, à l'usage des victimes d'internements arbitraires.

Fait divers à Moscou

Moscou, ville à coup sûr plus tranquille que New York, connaît à l'automne 1974 une véritable psychose de peur. Onze jeunes femmes au moins sont assassinées à la tombée de la nuit. Maniaque sexuel isolé ? Dangereux criminels de droit commun évadés ? Des rumeurs effrayantes circulent, d'autant plus qu'en URSS les média ne rendent jamais compte des faits divers. Exception remarquable cependant : devant l'ampleur de la panique, le quotidien populaire Moscou-Soirr publie une interview du chef de la police rassurant la population. Cependant, consigne est donnée dans certains quartiers de ne point laisser jouer les enfants dans les cours d'immeuble. Selon le mensuel juridique Sovietskoe Gossourdarstvo I Pravo, les causes de la criminalité montante résident dans « l'insuffisance de certains biens de consommation, le problème du logement, la part encore relativement importante du travail pénible et le manque de centres de loisirs ». Coupable aussi : la vodka ! Selon ce même journal, les délits crapuleux sont en régression relative, mais les affaires de mœurs augmentent et sont à l'origine de 70 % des assassinats. Un crime sur cinq est commis par des jeunes.

Yougoslavie

Belgrade. 20 960 000. 82. 1 %.
Économie. Production : G (71) 167 + A (72) 118 + I (72) 200. Énerg. (*72) : 1 610.
Transports. (*72) : 10 578 M pass./km, 19 179 M t/km. (*72) : 1 001 600 + 144 800.  : 1 667 000 tjb. (72) : 678 M pass./km.
Information. (72) : 25 quotidiens ; tirage global : 1 853 000. (72) : 3 556 000. (72) : 2 354 000. (72) : 480 000 fauteuils ; fréquentation : 83,5 M. (72) : 911 000.
Santé. (71) : 21 902. Mté inf. (72) : 43,2.
Éducation. (70). Prim. : 2 834 581. Sec. et techn. : 726 501. Sup. : 261 203.
Institutions. République socialiste fédérative de Yougoslavie, proclamée le 29 novembre 1945. Devient République fédérale le 31 janvier 1946. Constitution de 1963, amendée pour la quatrième fois en février 1974. Président à vie de la République et président à vie du Parti : Josip Broz Tito, par décision du 16 mai 1974. Président du conseil exécutif fédéral : Djemal Bjeditc.

Une certaine peur du vide

Le maréchal Tito, qui a fêté son 83e anniversaire le 25 mai 1975, demeure plus que jamais le ciment de l'unité du pays. Chaque rumeur de maladie du maréchal (comme ce fut le cas début mai) provoque immédiatement une tension à Belgrade. Cette année encore, le principal souci de Tito et du régime a été de préparer l'après-titisme.

Après-titisme

Après avoir procédé à quatre réformes constitutionnelles en l'espace de quelques années, après avoir créé une présidence collective, Belgrade a constitué en février un nouvel organisme collégial qui apparaît comme un supergouvernement restreint. Il s'agit du Conseil fédéral pour la défense de l'ordre constitutionnel, dirigé par Vladimir Bakaric (63 ans), qui semble être l'un des plus sérieux candidats à la succession de Josip Broz Tito. !