Maintenus dans l'opposition, les libéraux de Claude Ryan remportent 42 circonscriptions. Cette bipolarisation du vote sonne le glas de l'Union nationale, qui n'obtient aucun siège, malgré l'appui de 4,1 % de l'électorat et en dépit des efforts de son nouveau chef, Rock Lasalle.

Sagesse

En reconduisant au pouvoir le PQ, dont ils avaient rejeté l'option constitutionnelle lors d'un référendum, un an plus tôt (Journal de l'année 1979-80), les Québécois confirment leur satisfaction envers un gouvernement social-démocrate qui tient tête aux prétentions centralisatrices du Premier ministre Trudeau. Ils rejettent du même coup le Parti libéral de Claude Ryan, qu'ils jugent trop lié à celui d'Ottawa pour être un rempart efficace contre le pouvoir fédéral.

Plus que le bilan positif de l'administration du Parti québécois, c'est la personnalité du Premier ministre René Lévesque qui est déterminante durant la campagne électorale.

Il convainc les Québécois que le coup de force fédéral est une atteinte aux pouvoirs centenaires de la province en matière de langue et d'éducation, consacrés par l'AANB. R. Lévesque profite des hésitations du chef de l'opposition, Claude Ryan, qui est prêt, comme Pierre Trudeau, à favoriser l'accès des francophones et des immigrants à l'école anglaise.

Le Premier ministre Trudeau doit admettre, après l'élection, que les Québécois ont fait preuve de sagesse « en ne mettant pas leurs œufs dans le même panier ».

Flambée

Les problèmes économiques ne laissent aucun répit aux Canadiens.

– Hausses records des taux d'intérêt, qui atteignent près de 20 % en mai 1981. Cette situation résulte en partie de la politique américaine, qui consiste à hausser les taux d'escompte pour enrayer l'inflation.

– La valeur du dollar canadien touche son point le plus bas depuis 50 ans. Il plonge, le 16 décembre 1980, vers un nouveau record, en passant sous la barre du 82,5 cents US.

– Les faillites augmentent de 16,7 %, pour atteindre le chiffre record de 21 808, à cause de l'incapacité des petites entreprises à trouver des prêts à des taux avantageux.

– Les prix à la consommation augmentent de 12 %, contre 10,1 % en 1975, année de l'imposition des contrôles des prix et des salaires.

– Le chômage, loin de régresser, se situe autour de 8 %.

Pressé d'agir par l'opposition et par les gouvernements provinciaux réunis à Ottawa le 17 décembre, le ministre fédéral des Finances, Allan Mac Eachen, avoue son impuissance à éteindre la flambée des taux d'intérêts. « Quoi que décide Washington, Ottawa va suivre », tel est son message.

À la veille de Noël, les conservateurs réclament un budget spécial, mais en vain. Au cours d'un débat d'urgence, qui durera 48 heures sans interruption, Allan Mac Eachen avoue que les théories économiques traditionnelles ne donnent aucun résultat, mais qu'il ne connaît pas d'autre solution.

Surtaxe

Il faut attendre le 25 février 1981 pour que le ministre des Finances dépose des prévisions budgétaires. Coincées entre une dette publique plus lourde (18,7 % des dépenses) et des engagements coûteux (pensions de vieillesse et équipements militaires), elles prévoient des dépenses de 67,6 milliards de dollars, soit une hausse de 12,8 %. Rien qui puisse redresser la situation.

Dans un budget précédent, déposé le 28 octobre 1980, le gouvernement Trudeau énonce sa nouvelle politique énergétique. Il ira chercher des revenus de 3 milliards de dollars supplémentaires en augmentant immédiatement de 80 cents le prix du baril de pétrole brut produit au Canada, lequel chaque année sera haussé de 4,50 dollars, pendant trois ans.

De plus, une surtaxe de 8 % est imposée sur les revenus des compagnies pétrolières, tandis qu'une nouvelle taxe touche la production et la vente de gaz naturel.

L'Alberta, productrice de pétrole, réagit violemment à ce budget. Le Premier ministre Peter Lougheed annonce, le 30 octobre, que sa province réduira, à compter du 1er mars et pendant neuf mois, sa production de pétrole : d'abord de 60 000 barils/jour, puis, trois mois plus tard, de 120 000 et, durant les trois derniers mois, de 180 000.