90 ans, vieux révolutionnaire très respecté, le maulana Bashani donne le signal de l'opposition ouverte, le 2 avril 1972. Le 20 mai, la Ligue étudiante gouvernementale est battue à Dacca par les étudiants gauchistes et communistes alliés ; 45 000 ouvriers du textile font grève dix jours plus tard.

Opposition

La trêve de la guerre est terminée. Le seul point d'accord est intervenu sur les nationalisations (banques, assurances, jute, textile), à la libération. Depuis, c'est le clivage, reflété par les programmes : le socialisme démocratique de la ligue awami, appuyée par les communistes prosoviétiques face au gouvernement révolutionnaire de l'opposition maoïste (5 formations rivales, dont 4 issues de la plus ancienne, le parti national awami de Bashani).

La Ligue avait déjà refusé le partage du pouvoir dans le maquis, combattant les maoïstes avec une armée de 10 000 partisans. Une force paramilitaire lui succède en avril 1972, la Lal Bahini (l'Armée rouge), 100 000 hommes, portant le béret rouge. C'est moins elle, pourtant, que la distribution des secours et la reprise des activités — sensible en juin — qui amènent le retour de l'ordre.

Aide extérieure

Génie indien et techniciens soviétiques remettent en état les transports. L'Inde et l'URSS passent chacune avec Dacca un accord commercial, assorti, dans le cas de l'Inde, d'un traité d'amitié. L'Inde et l'URSS remplaceront le Pakistan-Occidental, client et fournisseur privilégié hier du Bengale-Oriental.

Les Indiens ne sont pas désintéressés. Le jute du Bengale-Oriental est attendu dans leurs usines. Son introduction en contrebande porte préjudice aux exportations du Bangla Desh. Le prix du poisson, dont le Bangla Desh s'est engagé à livrer à l'Inde pour 61,5 millions de F (sur 65 exportables), augmente de 50 % en trois semaines, comme celui du riz. La reconnaissance des Bengalis envers les Indiens fait place au ressentiment.

Mujibur Rahman a bien du mal à prendre ses distances vis-à-vis de sa voisine et libératrice. La prospection pétrolière est confiée à l'URSS, qui rouvre également les ports au trafic maritime. Le don par Moscou d'une flottille d'avions de transport et d'une escadrille de Mig, la taille de l'ambassade (90 personnes) montrent que les Soviétiques ne sont pas non plus dénués d'intentions.

Pour se libérer de la tutelle indo-soviétique, les dirigeants de Dacca s'essaient à une politique tous azimuts. Ils n'hésitent pas à se tourner vers les deux Grands qui ont soutenu le régime d'Islamabad. Dès que les États-Unis ont reconnu le Bangla Desh, le 4 avril, les secours américains peuvent se développer (un milliard de F pour l'été), avec comme symbole le pétrolier Manhattan (115 000 tonnes), spécialement aménagé en silo à blé. Le départ pour Pékin, en juin, d'une délégation commerciale est considéré comme le premier événement capable de dégeler les relations entre le Bangla Desh et la Chine, qui, par ailleurs, tient à regagner le terrain perdu chez ses sympathisants bengalis.

La libération de Dacca est-elle, comme le dit Chou En-lai, le « point de départ qui mènera à un affrontement perpétuel dans le sous-continent » ? Le contentieux entre le Bangla Desh et le Pakistan, l'Inde et le Pakistan, lui donnerait raison. Tout dépendra de la possibilité pour les dirigeants bengalis de forger une conscience nationale suffisamment forte pour imposer le respect du non-alignement et de la non-ingérence aux grandes puissances. Son meilleur gage consiste certainement à restaurer rapidement la stabilité intérieure et l'autorité.

Mujibur Rahman y parviendra-t-il ? Face au prestige du héros national et à un parti structuré, pour l'instant, les opposants, divisés, ne peuvent rien.

L'atout de Mujibur Rahman — il le proclame — est la modération qui caractérise le parti de notables qu'est la ligue awami. Est-ce un signe de force ou de faiblesse ? Cette question rend l'avenir du Bangla Desh incertain.

Bhoutan

770 000. 16.
Économie. PNB (63) 62.
Information. (68) : 3 000.
Éducation. (68). Prim. : 12 601. Sec. et techn. : 2 774.
Institutions. Monarchie. Souverain : Jigme Dorji Wangchuc ; succède à son père en 1952. Le roi exerce le pouvoir exécutif depuis 1954. Les relations internationales du Bhoutan sont assurées par l'Inde.

Birmanie

27 580 000. 41. 2,7 %.
Économie. PNB (68) 78. Production : G (67) 103 ; A (*69) 111. Énerg. (*69) : 58. C.E. (68) : 5 %.
Transports. (*69) : 2 016 M pass./km, 808 M t/km. (*69) : 29 400 + 30 000. (*69) : 114 618 000 pass./km.
Information. (66) : *27 quotidiens ; tirage global : 231 000. (69) : 399 000. (68) : 364 800 fauteuils ; fréquentation : 218 M. (69) : 24 754.
Santé. (66) : 2 635.
Éducation. (66). Prim. : 2 635 497. Sec. et techn. (65) : 425 214. Sup. : 28 890.
Institutions. République indépendante proclamée le 4 janvier 1948. Président du gouvernement révolutionnaire : général Ne Win, depuis le coup d'État du 2 mars 1962, qui renverse U Nu. Parlement dissous, constitution de 1947 suspendue. Le général Ne Win exerce l'ensemble des pouvoirs.

Cambodge

6 701 000. 37. 2,2 %.
Économie. PNB (66) 147. Production (66) : G 107. Énerg. (*69) : 42. C.E. (66) : 7 %.
Transports. (*69) : 170 M pass./km, 71 M t/km. (68) : 23 100 + 10 700. (*69) : 68 350 000 pass./km.
Information. (68) : 26 quotidiens ; tirage global : 145 000. (68) : *1 000 000. (69) : *50 000. (67) : 28 800 fauteuils ; fréquentation : *20 M. (69) : 8 024.
Santé. (66) : 282.
Éducation. (67). Prim. : 934 292. Sec. et techn. : 105 361. Sup. : 8 929.
Institutions. État indépendant le 9 novembre 1953. République proclamée le 9 octobre 1970 après la décision de l'Assemblée nationale et du Conseil du royaume (18 mars 1970) d'écarter du pouvoir le prince Norodom Sihanouk. Président de la République et président du Conseil des ministres : maréchal Lon Nol depuis le 10 mars 1972 après l'éviction de Cheng Heng. Premier ministre Son Ngoc Thanh.

Chine

787 180 000. 82. 1,4 %.
Transports.  : 868 000 tjb.
Information. (59) : *7 000 000. (69) : *300 000. (60) : fréquentation : *4 000 M.
Institutions. République populaire, proclamée le 1er octobre 1949. Constitution de 1954. Président de la République : Tung Pi-wu, nommé par intérim le 23 février 1972 ; succède à Liu Shao-chi, destitué par le Comité central en octobre 1968. Premier ministre : Chou En-lai. Président du Comité central du parti : Mao Tsé-toung.

Pékin entre dans le concert des nations

Fertile en coups de théâtre, c'est une année historique pour la Chine populaire enfin reconnue comme le troisième supergrand, champion officialisé du tiers monde, et pour le Premier ministre Chou En-lai qui joue et gagne sur tous les tableaux : admission à l'ONU et dans tous ses organismes annexes à la place de Formose, qui sera récupérée à échéance ; visite du président Nixon ; coexistence avec les États-Unis déplaçant vers le Pacifique le pôle de la diplomatie mondiale ; élimination du dauphin de Mao, Lin Piao, et des chefs de l'armée devenus obstacles. La place est nette pour Chou En-lai, n'était son âge, 74 ans, qui l'empêche de spéculer pour lui-même à trop long terme.

Les deux résolutions clés de l'ONU

RÉSOLUTION AMÉRICAINE qui exigeait une majorité des deux tiers pour expulser la Chine nationaliste : repoussée par 59 voix contre 55, 15 abstentions et 2 absents.