Les puissances étrangères cherchent néanmoins à établir des relations diplomatiques et économiques avec le nouvel État. La France décide, le 5 janvier, d'ouvrir une ambassade à Manama ; en avril, une importante délégation, conduite par J. de Lipkowski, engage des pourparlers avec les dirigeants de l'émirat afin de développer les échanges entre les deux pays. En revanche, l'URSS (qui a reconnu l'indépendance de l'émirat) n'est pas parvenue, en juin 1972, à installer une quelconque représentation diplomatique, essentiellement en raison de l'opposition de l'Arabie Saoudite, dont l'influence est grande à Manama. En effet, la raffinerie de l'archipel dépend largement (à plus de 60 %) du pétrole en provenance du royaume wahabite.

Troubles

Malgré une économie relativement saine, Bahreïn a connu de sérieux troubles sociaux. Le 12 mars 1972, les principaux dirigeants syndicalistes sont arrêtés. Le lendemain, de violentes manifestations (qui prennent une tournure politique) se déroulent à Manama ; après quoi le droit de grève est aboli. L'agitation paraît devoir reprendre, car une partie de l'opinion serait hostile au régime autocratique du cheikh Khalifa et à sa politique plutôt conservatrice, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur.

Bangla Desh

65 000 000*. 455.
Institutions. État indépendant le 16 décembre 1971. République démocratique parlementaire instituée par le décret constitutionnel provisoire du 11 janvier 1972. Président de la République : Syed Chouchury. Premier ministre : cheikh Mujibur Rahman.

Une indépendance née dans la violence et le chaos

Du cyclone (novembre 1970) à l'extermination, de la résistance à la libération (décembre 1971), le Bangla Desh naît du Pakistan-Oriental dans la violence. Il faut plusieurs mois pour que les passions tombent. Le Premier ministre, Mujibur Rahman, prend les rênes à son retour de détention, le 10 janvier 1972, dans les pires conditions : économie désorganisée, anarchie.

Bouleversée par la répression pakistanaise, l'opinion mondiale est tout aussi émue par certaines manifestations du nationalisme bengali : exécutions sommaires de collaborateurs et de razakars (supplétifs militaires) au cours de la semaine sanglante qui suit la libération (le 18 décembre 1971, sur le champ de courses de Dacca, quatre hommes sont suppliciés à coups de baïonnettes) ; actions de représailles contre la communauté bihari, musulmans venus du Bihar indien en 1947, partenaires des Pakistanais et parlant la même langue, l'urdu. Leur nombre est estimé à un million. Certains voudraient émigrer. Mais ni l'Inde ni le Pakistan n'en veulent.

Rançonnés, expulsés de leurs maisons, les Biharis subissent la vindicte populaire (dont les débordements, cependant, n'ont rien de comparable aux massacres systématiques pakistanais). Plusieurs centaines, 2 000 peut-être, sont tués à Khulna. Ce n'est qu'en juin 1972 que les Biharis commencent à pouvoir de nouveau circuler librement dans leurs quartiers jusque-là transformés en ghettos.

Insuffisances

La tâche de reconstruction nationale à laquelle le gouvernement appelle tous les concours est immense. De nombreuses terres, dévastées ou désertées, n'ont pas été cultivées pendant des mois. Il faut importer 3 millions de tonnes de céréales avant la mousson (fin juin), réintégrer les millions de réfugiés rentrés en deux mois et demi, leur allouer chacun 30 roupies (27 F), de la nourriture et des vêtements, reconstruire les maisons détruites (1 600 000), remplacer 7 000 camions (sur 8 000), réparer les routes, les voies ferrées, les ponts, remettre en fonctionnement les usines, employer des centaines de milliers de chômeurs (ils sont plus de 400 000 à Dacca).

Les profiteurs ont beau jeu. Des cargaisons de riz sont écoulées en Inde et vendues 50 % plus cher. Un train entier est pillé à Khulna. Des Biharis aisés passent clandestinement en Inde grâce à des sauf-conduits monnayés. Une amitié d'exil ou une recommandation vaut un poste. Les adversaires du régime dénoncent la corruption et le favoritisme de certains responsables. Des affrontements avec les partisans du gouvernement se soldent par des centaines de victimes chaque mois.