L'intensification de la guerre civile est telle que, sortant de leur réserve habituelle, les autorités de la Croix-Rouge internationale demandent en mars au gouvernement rhodésien et aux nationalistes noirs de mettre un terme à leurs atrocités respectives. L'aggravation du conflit se manifeste de plusieurs façons : apparition du terrorisme urbain, attaques nationalistes contre des avions civils, multiplication des actions violentes contre les Blancs et leurs amis noirs suspects de collaboration, extension des raids de représailles menés à l'étranger par les forces armées rhodésiennes.

Pour la première fois depuis le début des hostilités, en 1972 (Journal de l'année 1971-72), une fusillade éclate, le 24 juillet 1978, dans les faubourgs de la capitale entre forces de l'ordre et rebelles. Le 29 février 1979, l'aéroport international de Salisbury est attaqué au mortier par les guérilleros du Front patriotique.

Le 3 septembre 1978, un missile détruit en vol un Viscount de la compagnie aérienne nationale, et tous les survivants — tous des civils — sont massacrés par les nationalistes. Le 12 février 1979, un deuxième Viscount est abattu dans des conditions à peu près identiques, et 54 personnes périssent dans cette nouvelle catastrophe.

Les assassinats de civils blancs sont de plus en plus fréquents. Ainsi, au cours du seul mois de juin, sont assassinées, les 7 et 8 juin, 2 missionnaires blanches près de Bulawayo ; sont massacrés dans une mission proche de la frontière du Mozambique 13 Blancs dont plusieurs enfants, le 23 juin ; sont tués, le 27 juin, deux missionnaires allemands. On comprend dès lors qu'au cours de la seule année 1978 plus de 15 000 Blancs aient quitté le pays définitivement (alors que 4 194 y arrivaient) et que le bilan de la totalité des tués pour l'année 1978 s'élève à 5 000 personnes (soit 12 000 depuis 1972).

De son côté, le gouvernement rhodésien recourt systématiquement aux raids de représailles contre les sanctuaires nationalistes installés dans les pays voisins. Le 30 juillet 1978, un raid au Mozambique, le quatrième de ce style depuis 1972, porte à 1 500 le nombre des morts au cours de telles opérations. Dans la deuxième quinzaine de septembre, les forces armées rhodésiennes restent trois jours en territoire mozambicain, y faisant de nombreuses victimes. En octobre, une nouvelle offensive éclair fait plus de 1 500 morts, en majorité civils. En novembre-décembre 1978 et février 1979, de violents bombardements sont effectués par l'aviation rhodésienne en Zambie et au Mozambique. Le 26 février, pour la première fois depuis le début de la guerre, c'est en Angola, à plus de 1 500 km de leurs bases, que les avions rhodésiens vont porter la mort. En mars, ils effectuent trois raids au Mozambique en deux semaines. Le 13 avril, l'aviation rhodésienne appuie une opération héliportée contre le QG des nationalistes du Front patriotique à Lusaka, capitale de la Zambie.

Ballet diplomatique

À l'étranger, pourtant, les efforts pour la recherche d'un règlement négocié ne se sont à aucun moment relâchés, tandis que, le 19 août 1978, Ian Smith rencontrait sans succès, à Lusaka, Josuah Nkomo, leader du Front patriotique.

Les Britanniques rendent public, en août 1978, un rapport selon lequel Shell et BP ont délibérément violé l'embargo sur le pétrole pour aider les Rhodésiens et, le mois suivant, James Callaghan, alors Premier ministre, accuse la France d'avoir agi de façon analogue en violation des résolutions votées par l'ONU.

Le président Kaunda de Zambie décide, en octobre, pour des raisons strictement économiques, de rouvrir les frontières entre son pays et la Rhodésie. Au cours du même mois, Smith se rend à Washington pour y défendre ses thèses. Cyrus Vance vient à Londres évoquer l'affaire rhodésienne avec ses collègues britanniques en mai 1979. Ces quelques déplacements ne rendent que très partiellement compte du véritable ballet diplomatique qui se déroule entre les capitales occidentales et diverses capitales africaines pour tenter de contraindre les 260 000 Blancs de Rhodésie à s'incliner devant la majorité noire.